(Québec) Dominique Anglade revient au jeu de base du Parti libéral du Québec (PLQ) en choisissant de lancer sa campagne sur le thème de l’économie, accusant François Legault de ne pas s’attaquer à la pénurie de main-d’œuvre. Si la cheffe libérale promet de redonner de l’argent aux Québécois frappés par la hausse du coût de la vie, elle soutient que ce ne sera pas au prix d’un plus gros déficit ou de politiques d’austérité.

« L’économie va être la question de l’urne », a déclaré la cheffe libérale sur la colline parlementaire, devant son autocar de campagne, avant de prendre la route pour un rassemblement à Montréal dimanche.

« Quand on parle de l’économie, c’est de s’assurer qu’on réponde [à la hausse] du coût de la vie d’abord et avant tout. Ça veut dire que les Québécois doivent ravoir de l’argent dans leurs poches », a-t-elle affirmé, déplorant que certains soient forcés de choisir entre « payer le loyer et acheter de la nourriture ».

On s’attend à ce que cette campagne électorale porte beaucoup sur le portefeuille des Québécois. Dans sa plateforme dévoilée ce printemps, le PLQ propose de réduire de 1,5 point de pourcentage les deux premiers paliers d’imposition (46 295 $ et moins, et supérieur à 46 295 $ et moins de 92 580 $). Cela représenterait une baisse d’impôt allant jusqu’à 1000 $ par année. Le parti s’engage à verser une allocation allant jusqu’à 2000 $ par année aux personnes de 70 ans et plus.

Dominique Anglade a choisi l’ancien ministre des Finances et député sortant Carlos Leitão comme président de campagne. Ce n’est pas un signe que son parti pourrait utiliser des politiques d’austérité pour retrouver l’équilibre budgétaire s’il est élu.

Ce n’est pas le moment de réduire les dépenses en fonction de ça. Au contraire, les gens ont besoin d’avoir de l’air.

Dominique Anglade, chef du PLQ

Plus tôt ce mois-ci, M. Leitão, qui ne se représente pas, laissait entendre que la baisse d’impôt promise par son parti pourrait « probablement » entraîner « un petit déficit ». « Si, en faisant ça, on trouve qu’à la fin de l’année 2022-2023 on serait encore légèrement en déficit selon la Loi sur l’équilibre budgétaire, donc après versement des fonds des générations, “ so, be it ”. Ce n’est pas quelque chose qui nous arrêterait, parce qu’on propose de faire une baisse d’impôt », disait-il.

Dominique Anglade n’est pas allée dans le même sens dimanche. « Quand on dit qu’on va retourner de l’argent dans les poches des Québécois de la classe moyenne, c’est aussi parce qu’on va aller en chercher ailleurs, notamment dans les paradis fiscaux, notamment dans les grandes sociétés pour que les plus riches aient à payer un certain montant », a-t-elle indiqué.

Un nouveau palier d’imposition plus élevé pour les personnes qui gagnent au-delà de 300 000 $ serait créé, selon la plateforme libérale.

Dans une flèche en direction de François Legault, Dominique Anglade avance que « personne ne peut s’appeler un parti de l’économie s’il n’est pas capable de reconnaître que le frein principal au développement économique est la pénurie de main-d’œuvre ».

Des entreprises ferment leurs portes et des citoyens sont privés de service entre autres dans les CHSLD, une réalité qu’a négligée le premier ministre sortant au cours de son mandat, a-t-elle ajouté. Elle « met au défi François Legault » d’aller à leur rencontre et de répéter que la situation actuelle est une « mosus de bonne nouvelle ». Le premier ministre sortant avait utilisé ces mots le printemps dernier en parlant plus précisément des travailleurs, car ceux-ci ont le gros bout du bâton maintenant pour demander des hausses de salaire.

Des indicateurs économiques en apparence positifs sont trompeurs selon elle. « Le chômage ? Il est bas et va continuer à l’être parce qu’on a une pénurie de main-d’œuvre. On a plus d’emplois qui ne sont pas comblés que de chômeurs. C’est une situation inédite », a-t-elle relevé.

Elle dit proposer « un grand projet de société », comme ceux auquels « le parti a vraiment habitué les Québécois ». Il s’agit de son projet ÉCO visant à nationaliser l’hydrogène vert et à augmenter la production d’énergie renouvelable et l’efficacité énergétique. Il y aurait des investissements publics et privés estimés à 100 milliards d’ici 2050, selon le PLQ.

Il lui reste une dizaine de candidatures à annoncer alors que tous les autres partis ont une équipe complète. C’est une situation qui a déjà existé dans le passé, a-t-elle indiqué. En 2014, le parti avait présenté après le déclenchement des élections le trio économique formé de Carlos Leitão, Martin Coiteux et Jacques Daoust, par exemple. L’annonce de candidatures économiques se profile pour les prochains jours ? « On a déjà une équipe économique aguerrie », avec entre autres Frédéric Beauchemin, ex-directeur général et chef des marchés des capitaux à la Banque Scotia, a répondu Mme Anglade.

La cheffe libérale balaie d’un revers de main les sondages défavorables. « Une campagne électorale, on repart les compteurs à zéro, a-t-elle lancé. Tout le monde part sur un même pied d’égalité. »

J’entame cette campagne à l’offensive. C’est une course pour former l’alternative à François Legault, c’est être un gouvernement.

Dominique Anglade, chef du PLQ

Elle donnera le coup d’envoi de sa campagne à Montréal, où se trouve la grande majorité de ses députés sortants mais aussi où des bastions sont menacés. La lutte s’annonce d’ailleurs serrée dans sa propre circonscription, Saint-Henri–Sainte-Anne.

Le rassemblement libéral se tiendra en lieu sûr, dans LaFontaine, un château-fort libéral depuis 1985 dont le territoire couvre l’arrondissement de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles. C’est une façon de favoriser la présence d’un maximum de militants pour le jour 1 – après tout, le parti atteint un creux historique de 20 000 membres selon ses propres chiffres et n’a eu qu’environ 2200 donateurs jusqu’ici cette année.