Le Parti conservateur du Canada mène une campagne sur la tarification du carbone qui repose sur un grand mensonge : les Canadiens ne pourraient supporter une augmentation de 15 $ du prix du carbone, malgré le fait que le directeur parlementaire du budget a calculé que 80 % des Canadiens reçoivent un remboursement qui égale ou dépasse le coût que représente pour eux cette tarification du carbone.

Les conservateurs refusent de parler de ce chèque trimestriel de compensation que reçoivent les Canadiens. Les conservateurs prétendent également que la tarification du carbone ne fonctionne pas. Voici deux exemples qui suggèrent le contraire.

La société albertaine Capital Power a annoncé le 8 mars 2021, quelques jours avant la décision de la Cour suprême sur la tarification du carbone, un investissement de 1 milliard pour remplacer le charbon par le gaz naturel à sa centrale Genesee. Elle espère obtenir un rendement de plus de 20 % sur le capital investi si le tarif sur le carbone augmente à 170 $ la tonne d’ici 2030. La société réduira ses émissions annuelles de 3,5 mégatonnes à compter de juin 2024 avec ce projet.

La société Advantage Energy de Calgary a quant à elle développé, à partir des résultats de la recherche de l’Université de la Saskatchewan, une technologie de pointe en captage et stockage de carbone qu’elle tente maintenant de commercialiser. Elle a créé à cette fin, en 2020, une filiale appelée Entropy qui a reçu un investissement de 300 millions du Fonds de transition de Brookfield en mars 2022.

Le Fonds de croissance du Canada (FCC) a convenu le 20 décembre 2023 d’effectuer un investissement de 200 millions dans Entropy, jumelé à un achat de crédits carbone à tarif fixe pouvant aller jusqu’à 1 million de tonnes par année.

Parallèlement à cet investissement, le FCC s’est engagé à acquérir jusqu’à 600 000 tonnes de crédits carbone annuellement sur une période de 15 ans. Le premier projet qui bénéficiera de cette entente est le Glacier phase 2 d’Advantage Energy qui pourrait générer 185 000 tonnes de crédits vendues à un tarif de 86,50 $ par tonne. Par cet accord, le FCC absorbe le risque de tarification du carbone, ce qui permettra à Entropy de lancer son projet de captage de carbone dans les meilleurs délais.

Si le projet de captage de Glacier phase 2 devait être opérationnel au début de 2025 comme prévu, le prix à payer pour émettre une tonne de carbone dans l’atmosphère en Alberta sera alors de 95 $ la tonne. Entropy accepte de recevoir moins d’argent pour chaque tonne de carbone captée et séquestrée afin d’obtenir l’assurance d’obtenir 86,50 $ de façon certaine pendant 15 ans, ce qui lui permettra d’amortir entièrement l’investissement consenti pour installer son système de captage et de séquestration du carbone, quelle que soit l’évolution du prix du carbone dans l’avenir.

Le FCC monnaiera ses crédits de carbone auprès du gouvernement fédéral, ce qui lui permettra de réaliser des bénéfices tant que la politique fédérale actuelle de droits sur le carbone sera en vigueur, bénéfices qui lui permettront de garantir le financement d’autres projets semblables partout au Canada.

Ces exemples démontrent que la tarification du carbone peut générer des investissements importants pour réduire les émissions si le prix est relativement élevé ou si les acteurs économiques ont la certitude qu’il continuera d’augmenter. Il y a d’autres projets de captage de carbone prêts à démarrer dans l’Ouest canadien, tous plus importants que celui d’Advantage Energy.

Le grand mensonge conservateur alimente un climat d’incertitude qui ne favorise pas la prise de décision sur ces investissements importants qui pourraient réduire de plus d’une dizaine de mégatonnes les émissions canadiennes. C’est le discours conservateur plutôt que la tarification du carbone qui est responsable de ces délais.

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