Peu avant de mourir, un cinéphile en fin de vie du Saguenay avait exprimé un dernier souhait : voir le deuxième volet de l’épique saga Dune, réalisé par Denis Villeneuve. Sauf que le film ne prenait pas l’affiche avant plus d’un mois. Et lui n’en avait plus pour longtemps.

L’histoire a fait le tour des réseaux sociaux depuis vendredi, jour de sortie du très attendu Dune : Part Two.

De son lit en maison de soins palliatifs, un homme a eu la chance de visionner le film de science-fiction avant le monde entier.

Un moment « de pure magie », « qui démontre que tout est possible quand on fait quelque chose avec son cœur », fait valoir l’instigatrice de cette projection privée, Josée Gagnon.

Cofondatrice d’un organisme œuvrant auprès des personnes mourantes, la comédienne a rencontré l’homme lors d’une de ses tournées habituelles.

PHOTO FOURNIE PAR JOSÉE GAGNON

Josée Gagnon, cofondatrice de Clowns Thérapeutiques Saguenay

« Je le trouvais très touchant. Il n’avait pas eu un début de vie facile, le décrit-elle en entrevue avec La Presse. On a commencé à parler de ses passions, de ce qu’il aimait dans la vie. C’était un homme très simple. »

Cinéphile, il avait lancé un peu en l’air le souhait de visionner la deuxième partie de Dune. Un peu en l’air, parce que le film ne prenait pas l’affiche avant plus d’un mois. Or, son état se détériorait rapidement. Il n’en avait plus pour longtemps, quelques jours tout au plus. Il aurait fallu un miracle, et encore…

Sauf que Josée Gagnon a tout de même voulu tenter le coup.

« C’était quelque chose d’un peu farfelu. Clairement, ça n’allait pas arriver ! Mais on s’est dit, peut-être qu’on peut le faire rêver autrement, essayer d’avoir un message de Denis Villeneuve », raconte-t-elle.

Une bouteille à la mer

Début janvier, la comédienne a donc fait un appel à tous sur les réseaux sociaux.

« Quelqu’un serait capable de me mettre en contact avec le cinéaste Denis Villeneuve (réalisateur de Dune) par hasard ? », avait-elle écrit sur Facebook.

C’était une bouteille à la mer, elle le savait. Mais c’était aussi sa seule chance. Et contre toute attente, ça a marché.

« Ça a fait une traînée de poudre. Plusieurs personnes se sont mobilisées pour me mettre en lien avec son équipe », raconte-t-elle, citant notamment le cinéaste Sébastien Pilote.

En l’espace de quelques heures, l’histoire s’était rendue jusqu’à Denis Villeneuve et sa conjointe, la productrice Tanya Lapointe, qui ont voulu aider.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Tanya Lapointe et Denis Villeneuve

[Denis Villeneuve et sa conjointe, Tanya Lapointe] ont été très touchés. Ils disaient que c’est pour ça qu’ils font du cinéma. Pour le gars qui veut voir un film avant de mourir. C’est comme une consécration.

Josée Gagnon

Tout n’était pas joué. Même avec l’approbation de Denis Villeneuve, il fallait encore trouver le moyen de procéder.

Un film de cette ampleur est hautement confidentiel. Il y a des ententes, des règlements à respecter. Avec l’équipe du réalisateur québécois, Mme Gagnon a exploré « toutes les avenues ».

« On a essayé de faire venir l’homme à Montréal, mais c’était impossible. Il était en fin de vie. C’était une course contre la montre », résume-t-elle.

Le jour J

Le temps passait. L’homme pouvait mourir d’un jour à l’autre. Puis, un matin, une assistante de Denis Villeneuve est débarquée à la maison de soins palliatifs avec l’ordinateur du réalisateur.

« Nous avons donné nos téléphones cellulaires, signé des décharges, fermé les rideaux », raconte Josée Gagnon dans une publication devenue virale sur les réseaux sociaux.

« L’homme était si faible que nous croyions qu’il mourrait peut-être en écoutant le film. Il n’a pas eu la force de l’écouter au complet. Ça n’avait aucune importance », poursuit-elle.

Après le visionnement, l’assistante est repartie en avion. L’homme, lui, est décédé quelques jours plus tard.

« Il y avait quelque chose de grandiose. C’était quand même épique tout ça. Et lui était extrêmement touché de voir tout le monde se mobiliser pour réaliser un de ses rêves », se souvient Mme Gagnon.

« C’est beau de voir que les gens ont encore envie de donner, d’aider, de faire rêver les autres. Et de voir l’engouement que ça suscite, ça prouve que les gens ont envie d’avoir de l’espoir envers l’humanité », conclut-elle.