Pendant quelques années, les Oscars semblaient ne tenir qu’à un fil. L’audience était en chute libre. Et vint une pandémie qui n’a pas aidé. En plus, l’Académie à l’origine de la plus grande soirée d’Hollywood ne cessait de se retrouver du mauvais côté de la conversation – pensons à #OscarsSoWhite, à la bourde de la mauvaise enveloppe, aux prix décernés hors d’ondes, ou à la sinistre gifle de Will Smith.

Et puis, une chose amusante s’est produite : l’intérêt a commencé à augmenter, à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de l’Académie. Il semblait que les gens étaient enthousiasmés par les films et, espère l’Académie, par les Oscars.

« On a connu une année incroyable pour le cinéma en général, a déclaré Bill Kramer, directeur général de l’Académie, dans une récente entrevue avec l’Associated Press. Notre discipline artistique n’a jamais été aussi pertinente. »

L’ampleur et l’adhésion du large public aux 10 titres en nomination cette année pour le prix du meilleur film en sont la preuve. On y retrouve des films à gros budgets, de petites productions indépendantes, deux films internationaux et deux films bilingues.

Et que vous estimiez ou non que Barbie a été snobée dans quelques autres catégories, les gens continuent de parler et de débattre de ce qui se passera lors de la 96e cérémonie des Oscars, le 10 mars.

Un moment fédérateur

Après quelques moments difficiles, les Oscars ont peut-être enfin atteint « leur X ». Mais cela n’est pas une surprise pour les dirigeants de l’Académie, qui ont travaillé en coulisses pour favoriser ce type d’évolution à l’approche du 100e anniversaire. Bill Kramer et Janet Yang, la présidente de l’Académie, qui ont pris leurs fonctions en 2022, considèrent l’organisation comme une entité internationale. Ils ne sont plus sur la défensive, mais se tournent plutôt vers l’avenir.

« Nous sommes uniques dans le sens où nous représentons toutes les disciplines de l’industrie. Aucune autre organisation ne peut revendiquer cela », a déclaré Mme Yang.

Il y a près d’un siècle, cette « unification » ne faisait pas partie du plan. En fait, Louis B. Mayer avait eu l’idée de créer l’Académie en partie pour contrecarrer les efforts de syndicalisation des artisans, sous prétexte que cela contribuerait à établir des normes. En réalité, il espérait que les grands propriétaires de studios fixent ces normes en pensant uniquement à leurs propres intérêts.

Mais le rêve de Mayer s’est rapidement évanoui et dans les années 1930, scénaristes, acteurs et réalisateurs se sont tous regroupés en syndicats.

PHOTO CHRIS PIZZELLO, INVISION/ASSOCIATED PRESS

Janet Yang et Bill Kramer, dirigeants de l’Académie des Oscars

Une Académie plus diversifiée

L’Académie en tant que « catalyseur de changement », ce n’est pas nouveau : elle offre depuis longtemps des programmes pour aider les artistes émergents. Et sa démarche musclée visant à diversifier ses effectifs était en place avant que Janet Yang et Bill Kramer ne posent des gestes en réponse aux #OscarsSoWhite et aux révélations publiques selon lesquelles l’Académie était en grande partie composée d’hommes blancs plus âgés.

Les deux dirigeants ont également pris des mesures plus proactives ces dernières années pour avoir un impact sur l’industrie à laquelle ils décernent des prix, notamment en mettant en œuvre des normes strictes en matière de diversité et d’inclusion, entrées en vigueur cette année, pour accepter les candidatures dans la catégorie du meilleur film.

L’Académie compte désormais plus de 10 500 membres, représentant plus de 75 pays et territoires. Bien que la parité soit encore un travail en cours, 20 % des membres viennent de l’extérieur des États-Unis, 34 % s’identifient comme des femmes et 18 % sont issus de communautés ethniques sous-représentées.

« Tout le monde ne chante pas au diapason et tout le monde ne ressent pas la même chose. Mais nous pouvons rassembler tout le monde », déclare Bill Kramer.

Se rapprocher du public

L’accent a également été mis sur l’engagement du public via les médias sociaux, en s’appuyant souvent sur les très riches archives de l’Académie – qu’il s’agisse de discours d’acceptation d’époque ou simplement de moments mémorables des Oscars passés.

Le compte Instagram compte près de 4 millions d’abonnés et la chaîne YouTube regorge de vidéos amusantes ou touchantes.

L’intérêt pour l’histoire du cinéma a également suscité l’enthousiasme autour du Musée de l’Académie du cinéma, à Los Angeles, qui abrite plus de 23 millions d’objets souvenirs et a accueilli des expositions sur tout, de Hayao Miyazaki à l’histoire du cinéma afro-américain en passant par Le Parrain ou les films de John Waters.

M. Kramer souligne qu’environ la moitié des visiteurs ont moins de 40 ans.