Il y a des marques qui ont traversé le temps, comme Ford, Mercedes et Renault, pour ne nommer que celles-là. D'autres pourraient bien disparaître dans les prochaines semaines et d'autres, enfin, sont revenues à la vie avant de subir définitivement le jugement implacable du marché. C'est le cas de Rambler.

Un peu d'histoire

Les férus d'histoire automobile vous diront que le nom Rambler (qui signifie promeneur ou excursionniste) a été utilisé pour la première fois aux États-Unis en 1897, par Philip Gormully et Thomas B. Jeffery, propriétaires de la deuxième usine de bicyclettes en importance en Amérique. Mais Jeffery a été séduit par la nouveauté de l'heure, l'automobile. Pressé par son fils Charles tout aussi enthousiaste, Thomas Jeffery a vendu son entreprise de bicyclettes et s'est lancé à l'assaut du marché de l'automobile. Au tout début du XXe siècle, Jeffery a acquis les droits sur le nom Rambler. Les choses ont tourné rondement pour la famille Jeffery, et des milliers de Rambler sont sorties de son usine chaque année. Rambler a été à cette époque le deuxième constructeur automobile en importance des États-Unis, après Oldsmobile (un autre disparu).

 

Pompéi et le Lusitania

Malheureusement, Thomas Jeffery est mort subitement en 1910, lors d'une visite à Pompéi, laissant l'entreprise à son fils Charles. En l'honneur du paternel, Charles a décidé qu'à partir de 1913, les Rambler porteraient le nom Jeffery. En mai 1915, le jeune entrepreneur a décidé de faire un voyage en Europe et s'est embarqué sur le Lusitania. Vous connaissez peut-être la suite... Ce paquebot de grand luxe a été torpillé par un sous-marin allemand au large de l'Irlande. Par miracle, Charles Jeffery a été l'un des survivants, mais les quatre heures qu'il a passées dans les eaux glacées de l'Atlantique Nord avant d'être rescapé ont changé à jamais sa vision de la vie. À l'âge de 40 ans, il a décidé de prendre sa retraite et, en 1917, la marque Jeffery a été vendue à un certain Charles Nash.

De Nash et Hudson à AMC

Nash Motors, qui a fait revivre la marque Rambler en 1950, est devenue Nash-Kelvinator puis, en 1954, a acquis la Hudson Motor Car Company pour former American Motors Corporation. J'espère que vous suivez encore...

Après cette deuxième naissance, Rambler a vécu dans le giron d'AMC jusqu'en 1969. Précisons que les Rambler ont hérité de la structure monocoque des Hudson, une architecture bien plus moderne et rigide que le désuet châssis-carrosserie qui a fait des petits chez les Trois Grands pendant plusieurs années. C'est d'ailleurs grâce à cette structure monocoque que les «petites» Rambler ont pu offrir une habitabilité équivalant à celle de leurs plus grandes concurrentes. Mais le look plus tapageur qui plaisait alors à la majorité des acheteurs nord-américains n'y était pas, sans compter que la pauvre Rambler était affublée d'un six cylindres vieillot qui n'a rien fait pour mousser sa popularité.

Pataude mais séduisante

C'est d'ailleurs l'avis de Dominic Sauvé, propriétaire de notre Rambler American 440. Il estime que le moteur de 3,2 litres (199 pouces cubes) n'est pas particulièrement puissant, mais qu'il se fait pardonner cette lacune par la présence d'un couple appréciable à bas régime. Notons que ce moteur n'a été utilisé sur les American qu'entre 1966 et 1970, et qu'un nouveau et plus gros moteur de 3,8 litres a équipé les Rambler American entre 1964 et 1979. Notre Rambler est aussi dotée d'une transmission automatique à trois rapports qui provient de chez Borg-Warner et qui porte chez AMC le nom de Flash-O-Matic. Non, ce n'est pas un produit à déboucher les éviers...

Cette jolie décapotable à toit rétractable électrique séduit par ses lignes sobres, mais esthétiques, que l'on doit au designer Richard A. Teague, créateur des mémorables Javelin et AMX 1968. Ce style semble d'ailleurs mieux convenir aux années 2000 qu'aux extravagances des années 60. Précisons pour conclure que les Rambler American se déclinaient en quatre versions, soit la berline quatre portes, le coupé deux portes, la familiale et le cabriolet.

Autre fait à noter, cette voiture a été construite à Brampton, en Ontario, dans une usine ouverte en 1961 et complètement modernisée par Renault (acquéreur d'AMC) dans les années 80, puis revendue à Chrysler qui y construit aujourd'hui ses Chrysler 300 et Dodge Charger.

En somme, une histoire aux multiples rebondissements dignes des meilleurs romans-savon américains!

 

DANS LE RÉTROVISEUR DE L'AMC AMERICAN RAMBLER 440 1966

Empattement/longueur/largeur, cm (po): 269 (106)/450 (177 po)/178 (70)

Poids: 1262 kg (2782 lb)

Moteur: six cyl. en ligne, 3,2 L (199 po3) 128 ch à 4400 tr/min, 182 lb-pi à 1600 tr/min

Transmission: automatique, trois rapports

Pneus: 6.45 x 14

Production: 2092 unités (440 décapotable)

Prix 1966: 2486$US

Valeur 2008: environ 10 000$CAN

La même année (1966):

- La jeune et jolie actrice française Brigitte Bardot se marie pour une troisième fois. Dans un autre registre, Bourvil et Louis de Funès font un tabac avec leur film La grande vadrouille.

- La sonde russe Saturn III s'écrase sur le sol de la planète aux anneaux avant d'avoir pu retransmettre une seule donnée. Il s'agit du premier objet terrestre à toucher un autre astre que la Lune. Le 4 février, par contre, le laboratoire russe Luna IX s'était posé sans encombre sur la Lune.

- Walt Disney, un grand du cinéma pour les petits, s'éteint à la suite d'un cancer des poumons.

- Ronald Reagan, entre sa carrière d'acteur et celle de président des États-Unis, devient gouverneur de la Californie.

- Jackie Stewart (BRM), suivi de Lorenzo Bandini (Ferrari) et de Graham Hill (BRM), remporte le Grand Prix de Monaco. Jack Brabham ne termine qu'à la 12e place, mais il est quand même sacré champion du monde de F1 cette année-là.