L'automobile a cessé de faire la fête hier, au Palais des congrès de Montréal. Ce matin, on lui demande de rendre des comptes.

Tout se conjugue aujourd'hui pour brouiller l'image triomphante de la voiture: les prix affichés à la pompe, les accidents tragiques, les mille et un obstacles de la circulation, les aléas climatiques de plus en plus importants, les menaces que pourraient faire peser les émissions de CO2 sur la planète. C'est une certitude: on n'utilisera plus la voiture comme hier. Et on ne la conduira plus comme avant. Allier plaisir et écologie, joie de vivre et environnement... La ficelle est certes un peu grosse. Mais pourquoi pas?

Après tout, la voiture est, aujourd'hui, moins polluante qu'elle ne l'était il y a 10 ou 15 ans. Les véhicules neufs causent moins d'émissions polluantes, mais les centres urbains ne se sont pas transformés pour autant en havres d'air pur.

Car dans le même temps, le parc automobile a considérablement augmenté. Et augmentera encore, ce qui inquiète la Direction de la santé publique de Montréal, qui sonnait l'alarme la semaine dernière en attribuant la responsabilité d'au moins 1500 décès prématurés et de plus de 6000 cas de bronchite infantile à la pollution atmosphérique chaque année dans la métropole.

L'organisme demande par conséquent à la Ville de Montréal de revoir en profondeur ses politiques de transport urbain pour réduire l'achalandage automobile. Un discours qui ressemble à celui des écologistes, qui pensent que, pour réduire la pollution et pour lutter contre l'effet de serre, il n'y a pas de politique sérieuse hors du développement des transports en commun.

Il est vrai que, sans un réseau de transports en commun dense, rapide et confortable, il y a peu de chances d'extraire l'automobiliste de sa coquille métallique.

 

Pourquoi irait-il s'entasser avec 100 inconnus dans un wagon de train ou de métro, alors que sa voiture l'attend dans le garage... Nous sommes des centaines de milliers à tenir ce raisonnement. En fait, comment nier l'autonomie que confère la possession d'une voiture? Aller où l'on veut, quand on veut, avec qui l'on veut, est une possibilité à laquelle personne ne veut renoncer.

Impossible, alors, de concevoir son quotidien sans automobile? C'est du moins la première impression qui se dégage de la plus récente étude de Statistique Canada sur notre dépendance à l'automobile. Selon l'enquête de l'organisme fédéral, la proportion de ceux qui ont utilisé leur auto pour tous leurs déplacements est passée de 68% en 1992 à 74% en 2005. Mais en y regardant de plus près, il y a de l'espoir: Montréal affiche le taux de dépendance à l'auto le plus bas au pays.

S'il faut encourager le développement des transports collectifs, il faut aussi défendre l'automobile parce qu'elle peut non seulement devenir «propre» - électrique ou hybride - mais aussi citadine. Et ce jour, pas si lointain, fera disparaître l'opposition entre liberté individuelle et responsabilité collective.

Équilibre urbain

On devine facilement que la bataille de l'automobile ne fait que commencer. Elle ne se gagnera pas en un jour ni même en 10 ans. Elle nécessitera certainement une révolution des mentalités, réclamera une grande ténacité et provoquera de nombreux grincements de dents. Mais c'est là un mal nécessaire.

Car la ville et l'automobile sont condamnées à vivre, à vieillir et à mourir ensemble. Un nouvel équilibre urbain est à rechercher. Reste à savoir lequel. Il faudrait peut-être d'abord réfléchir sur le type de voitures circulant en ville. Ainsi, est-il normal d'y voir autant de H3, de 4Runner et de X5 qui ne verront jamais un sous-bois de leur vie? Affaire de marketing...

Bien sûr, apparemment, les constructeurs font quelques efforts. Tous (enfin presque) ont exposé, au Salon de l'auto, des modèles plus verts. Bravo, mais aucun ne propose aujourd'hui une voiture taillée sur mesure pour la ville.

Bien sûr il y a la Smart qui passe pour la citadine la plus branchée de l'heure. Elle est hyper rationnelle, mais son concept n'a hélas pas fait école et, en plus, elle est trop chère. Et moins économe aussi. Depuis son renouvellement, la Smart dispose d'un moteur à essence tout neuf, mais il tète plus de carburant que son prédécesseur qui, lui, carburait au gazole. En outre, ce moteur est amputé du dispositif d'arrêt automatique «Stop&Go» pourtant offert en Europe. Cette «invention» peu coûteuse devrait être généralisée à l'ensemble de la production mondiale, car elle fait des miracles en ville, où la conduite n'est faite que d'accélérations et de freinages.

À quand des voitures faites pour la ville? Petites, sobres et, surtout, pas trop chères? Dites, c'est pour bientôt? Ma ville n'en peut plus, elle tousse et s'étouffe.