C'est bien connu, les vieilles autos polluent plus que les nouvelles. Alors, faut-il promouvoir une prime à la casse pour accélérer le renouvellement du parc automobile canadien et freiner la pollution ? Les élections fédérales se préparent, alors pourquoi ne pas suggérer pareille idée ?

Que diriez-vous, disons, d'obtenir un rabais gouvernemental de quelques milliers de dollars à l'achat d'un nouveau véhicule ? Et plus encore si ce véhicule compte une motorisation hybride ou encore électrique ? Voilà la promesse que les partis politiques fédéraux pourraient insérer dans leur plateforme électorale : consentir à nous verser une subvention à la condition d'envoyer notre vieille bagnole à la ferraille. Une bonne idée ? Elle a déjà été appliquée ailleurs dans le monde, alors pourquoi ne pas nous en inspirer nous aussi ?

Pourtant, cette « prime verte » ou à la casse, c'est comme vous voulez, a généralement été lancée par le puissant lobby des constructeurs automobiles... On le devine bien, l'hostilité des constructeurs envers les vieilles autos n'est pas totalement innocente, surtout lorsque l'industrie cherche à maintenir ses ventes. Une prime à la casse est un excellent outil de promotion pour regonfler les carnets de commandes des constructeurs.

Il est vrai que cette mesure, si elle devait un jour être adoptée sur notre territoire (on peut toujours rêver, non ?), ne résoudrait pas le problème de la pollution automobile pour autant. Pas dans les grandes villes à tout le moins.

Car le vrai problème posé par l'automobile n'est pas la pollution proprement dite (nos automobiles sont de plus en plus propres), mais l'engorgement des villes et ses nuisances : embouteillages, bruits, atteintes à la qualité de vie. Et une telle mesure incitative n'y changerait rien.

On abandonne l'idée d'une prime alors ? Pourquoi ne pas militer pour son instauration en y ajoutant un autre argument : celui de la sécurité ? S'il y a bien un grief, tout aussi important, à adresser aux vieilles autos, c'est bien leur faible niveau de sécurité.

Par exemple, il y a un fossé entre une Camry 1990 et une Camry 2015. La nouvelle freine mieux, accélère mieux et consomme moins que son aînée.

Comme en matière de pollution, la décennie 90 fut une période charnière dans le domaine de la sécurité : apparition progressive des coussins de sécurité gonflables, de l'ABS, des carrosseries à zones déformantes et autres dispositifs de sécurité électronique. Les normes de sécurité imposées par les législations gouvernementales et la mise sur pied de tests de collision sans cesse plus sophistiqués ont joué un rôle prépondérant dans cette évolution. Aujourd'hui, plusieurs véhicules sur le marché obtiennent la cote de sécurité maximale décernée par la National Highway Trafic Safety (NHTSA).

La sécurité étant un souci premier pour l'automobiliste et ses occupants, et donc un argument de vente pour les constructeurs, aucune voiture récente ne saurait se satisfaire d'une note inférieure à trois étoiles (cinq étant le maximum). Pour tout dire, le niveau de sécurité offert par une voiture est inversement proportionnel à son âge.

Comme s'il y avait des vérités que les constructeurs aiment dire (« les voitures anciennes polluent ») et d'autres qu'ils aiment cacher (« les voitures anciennes sont plus dangereuses »). Cet élément supplémentaire devrait sans doute nous inciter à militer en faveur d'une prime à la casse. S'il est prouvé qu'en cas d'accident, le taux de mortalité des passagers d'une vieille voiture est très supérieur à celui des passagers d'un modèle récent, alors une prime à la casse trouverait une justification plus profonde encore que le seul prétexte de la pollution.

Quel parti politique entend la proposer ?

Photo Ina Fassbender, Archives Reuters

L’idée de verser une subvention aux automobilistes afin qu’ils envoient plus rapidement leurs vieilles bagnoles à la ferraille a déjà été appliquée ailleurs dans le monde. Pourquoi ne pas profiter de l’approche des élections fédérales pour promouvoir une « prime verte » afin d’accélérer le renouvellement du parc automobile canadien et ainsi freiner la pollution ?