Pourquoi la berline intermédiaire, longtemps le type de voiture le plus populaire, est-elle en perte de vitesse?

Puisque la statistique est reine, autant s'en affranchir illico: les berlines intermédiaires (Chevrolet Malibu, Honda Accord, Toyota Camry) composeront 21% du parc automobile canadien en 2009, une diminution de 2% par rapport à l'année précédente. Isolée de la sorte, cette statistique ne veut à peu près rien dire dans le contexte économique actuel. Cependant, en jetant un oeil aux statistiques compilées ces dernières années, la demande des consommateurs pour les véhicules de cette catégorie diminue pourtant de façon alarmante.

 

Rassurez-vous, la berline intermédiaire n'est pas sur le point de s'éclipser: cette catégorie pèse encore pour le quart des ventes d'automobiles neuves au pays. Mais elle recule régulièrement. Les coupés et cabriolets, voire les familiales, n'ont constitué que des épiphénomènes. Puis sont arrivés les fourgonnettes, VUS et autres déclinaisons nées d'un esprit marketing parfois un peu tordu, qui ont fini par diluer la fonction purement familiale de la trop sage berline en lui donnant les habits du loisir ou du design plus exclusif.

 

Ce sont les faiblesses de la berline intermédiaire qui ont conduit à une hypersegmentation de l'offre automobile. Des niches d'alors sont en quelque sorte devenues des catégories à part entière (coupés, cabriolets); de nouveaux créneaux ont fait leur apparition (multisegments, hybrides et autres véhicules de loisirs), et d'autres se sont renforcés (sous-compactes et compactes). Aujourd'hui, tous ces marchés ont un taux de croissance à deux chiffres et leur taille pourrait finir, dans certains cas, par dépasser celle de segments plus classiques.

 

Ne pas ressembler au voisin

 

Tout comme les États-Unis, l'Allemagne ou le Japon, le Canada est un marché mûr. Tout le contraire de la Chine, de la Russie ou encore de l'Inde, les nouveaux moteurs de croissance de l'industrie automobile. Le Canada est donc devenu un marché de renouvellement, dans la mesure où la plupart des foyers ont déjà un véhicule, voire plusieurs.

 

La nécessité de se distinguer de son voisin ou du chauffeur de taxi est un critère qu'aucun service de marketing ne néglige aujourd'hui. Voilà pourquoi le consommateur ne s'y retrouve plus aujourd'hui dans cette "hybridation" des silhouettes. Qu'est-ce qu'un VUS? "Euh, un doux ou un dur?" Et un multisegment? "Avec cinq ou sept places?" Ou alors un VLU (véhicule de loisirs urbains)? "Un quoi?"

 

Si le consommateur ne sait plus où donner de la tête, c'est la faute des concepteurs de berlines, qui n'ont pas su anticiper les attentes des consommateurs et leur nouveau mode de vie. Il y a bien eu quelques tentatives, comme en font foi le "coupé 4-portes" (VW Passat CC) ou la voiture rehaussée (Suzuki SX-4), mais cela n'empêche pas la guerre de faire rage. Qui détient la solution? Qui fait fausse route? Au client de trancher, mais sans doute souhaiterait-il toujours avoir le choix. Et c'est justement ce que l'on se propose de faire chez les constructeurs en multipliant les carrosseries sur une même base, dans le but de permettre à la clientèle de s'afficher autrement.

 

Aujourd'hui, en croisant la taille des véhicules et les silhouettes, pas moins d'une dizaine de nouvelles catégories sont apparues sur l'échiquier automobile. Et ce nombre se multiplie par trois lorsque toutes les gammes (entrée, milieu et haut de gamme) sont prises en compte. Pour illustrer cette tendance, sachez que BMW a, à lui seul, augmenté le nombre de ses silhouettes de près de 75% au cours des 20 dernières années. Et certaines d'entre elles ont été (la X6 par exemple) ou seront inclassables (5 GT) pendant encore un certain temps. Le constructeur bavarois n'est pas seul. Tout le monde s'est lancé dans cette folle course à l'enrichissement de l'offre. Le consommateur n'a jamais été aussi chouchouté. Ni aussi confus...

 

À qui profite le malaise des berlines au juste? Au consommateur ou à l'industrie?

 

Photo Toyota

L'an dernier, la plus vendue des berlines intermédiaires au pays a été la Camry de Toyota (notre photo), avec 24 618 unités. Au cours de la même période, le constructeur nippon a fait immatriculer 21 578 Yaris au Québec seulement.