Chaque motocycliste a certainement remarqué qu'un nouveau fascicule sur la sécurité accompagnait son renouvellement d'immatriculation. De plus, la page d'accueil du site internet de la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) fait une belle place à la campagne de sécurité à moto et une publicité télé est diffusée sur nos écrans depuis le 30 mars.

On rappelle les conseils de base que sont de faire attention aux conditions routières, de rester vigilant et de se donner le temps de reprendre contact avec sa monture après les longs mois d'hiver. La Fédération des motocyclistes du Québec, qui a collaboré avec la SAAQ à la réalisation du fascicule Une sortie, ça se prépare, soutient que les efforts de la société d'État sont louables mais loin d'être suffisants.

 

C'est que certains mythes semblent avoir la vie dure dans les bureaux des fonctionnaires de la SAAQ, notamment celui selon lequel la vitesse et les motos sportives sont les causes de nombreux accidents.

Mauvais côté

Jean-Pierre Belmonte, président de la Fondation Promocycle, l'un des trois experts canadiens présents à Lillehammer, en Norvège, en juin dernier, pour participer au Groupe de travail de l'OCDE sur la sécurité des usagers de deux-roues motorisés, soutient que l'on regarde du mauvais côté de la lorgnette.

«Je ne blâme pas la SAAQ, elle s'en tient à ses statistiques et voit que les accidents qui lui coûtent le plus cher sont ceux impliquant des motos sportives, explique M. Belmonte. Mais cette déduction n'a aucune pertinence scientifique. Le principal facteur aggravant, c'est l'âge. Et ce sont les jeunes qui achètent des motos sportives.

«En fait, un seul type de moto est clairement surreprésenté dans les accidents: les motos modifiées, poursuit M. Belmonte. La SAAQ, en demandant une surprime d'assurance pour les motos sport, pousse certaines personnes à modifier des motos qui ne sont pas classées comme étant sportives. La société d'État encourage ainsi la prolifération de la seule classe de motos qui est réellement dangereuse.»

À la lumière de ces conclusions, la décision de la SAAQ de cibler les motos sportives a été présentée à Lillehammer comme l'un des cinq pires exemples de législation en vigueur sur la planète...

Pour une formation et une technologie plus poussées

Selon Jean-Pierre Belmonte, le salut passe d'abord et avant tout par la formation et la technologie.

 

«Le bilan des victimes d'accidents de moto s'est grandement amélioré au cours des 20 dernières années, mais, contrairement à l'auto, cela s'est fait sans changement sur le plan de la sécurité passive, affirme-t-il. Les motocyclistes ont vieilli, leur comportement est plus responsable, on a ainsi amélioré le bilan sans l'aide de nouvelles technologies. Mais ça commence à évoluer et ça va changer la donne.»

Bien sûr, le motocycliste doit être en mesure de tirer profit de ces avancées techniques. «Dans un accident sur trois, on ne dénote aucune action préventive de la part du motocycliste, explique M. Belmonte. Les gens qui pensent pouvoir rouler tranquillement sans jamais se mettre en situation précaire font une grave erreur.»

Concentrer nos efforts à vouloir réduire la vitesse est donc une fausse solution.

 

«On doit pouvoir analyser adéquatement la performance des gens, enchaîne-t-il. Si la loi te permet d'aller à 100 km/h, il faut apprendre à freiner à 100 km/h!»

Mais, comme rien n'est parfait, M. Belmonte reconnaît qu'avec la formation plus poussée pourrait naître chez les motocyclistes un faux sentiment de sécurité. Le défi est donc de les aider tout en leur faisant comprendre qu'ils sont toujours vulnérables.

Pas une mince affaire, mais on garde espoir!