Que diriez-vous de voir au-delà du gros camion qui vous bouche la vue sur l’autoroute ? De laisser votre voiture réguler sa vitesse pour éviter les bouchons ? De lui permettre de devenir plus futée grâce à un serveur distant bien plus puissant que son ordinateur de bord ?

Ces trois exemples, Bernard Bureau, vice-président à la stratégie réseau et à l’architecture sans-fil chez Telus, les lance en rafale pour montrer tout le potentiel de la plus récente collaboration avec GM Canada. Les deux entreprises ont annoncé la semaine dernière un partenariat faisant de Telus le fournisseur de services pour la prochaine génération de voitures 5G de GM. On s’attend à ce que les modèles 2025, qui seront disponibles l’année précédente, soient les premiers véhicules qui profiteront de cette avancée.

« On est vraiment excités par cette entente, la première de cette envergure avec un constructeur automobile au Canada, se réjouit M. Bureau. On est vraiment axés sur le futur et on investit énormément dans la 5G, alors que les applications commencent à peine à émerger. »

Un avant-goût

La 5G, encore embryonnaire au Canada, promet d’ici quelques années une bande passante pouvant aller jusqu’à 20 Go/s, une latence de moins de 1 milliseconde et une capacité à desservir jusqu’à 10 millions d’appareils au kilomètre carré. En 2021, on est très loin de ces statistiques, même avec la 5G annoncée en grande pompe par les principaux fournisseurs canadiens, Telus, Rogers, Bell et, à plus petite échelle, Vidéotron. La 4G offerte actuellement pour le sans-fil ne va généralement pas plus vite que 300 Mo/s, avec une latence inconstante entre 50 et 20 ms et une capacité de 2000 appareils au kilomètre carré.

Le vice-président chez Telus le reconnaît, la 5G actuelle « ne change pas tant de choses que ça dans le quotidien des gens ». Arriver à télécharger un film sur Netflix en deux secondes plutôt qu’en dix ou disposer d’une vitesse imbattable pour naviguer avec Google Maps ne sont pas des arguments très convaincants.

Ce n’est qu’un avant-goût, promet-il.

Il y a beaucoup de cas de figure qui sont en développement dans l’industrie. La 5G amène plusieurs possibilités assez importantes qui vont plus loin qu’une vitesse de téléchargement plus grande.

Bernard Bureau, vice-président à la stratégie réseau et à l’architecture sans-fil, Telus

Pour des voitures roulant en grand nombre à pleine vitesse sur l’autoroute, c’est la latence extrêmement réduite et la robustesse des communications qui est l’avantage marquant de la 5G, explique-t-il. Passer de 50 ms à 1 ms, c’est réduire la distance de réaction de 50 fois. Permettre un million de dispositifs au kilomètre carré, c’est assurer que les réseaux ne seront pas débordés. La robustesse et l’implantation des serveurs à proximité des utilisateurs, ce qu’on appelle l’informatique de proximité ou edge computing en anglais, permettent aux véhicules d’avoir accès à des ressources de calcul bien plus puissantes.

Freinage et congestion

Ce sont ces facteurs qui permettront notamment l’arrivée de voitures de plus en plus autonomes. Il est peu réaliste qu’on retrouve en grand nombre dès 2024 sur les routes des véhicules qui peuvent se passer entièrement d’un conducteur humain, mais ils compteront de plus en plus de fonctions avancées d’aide à la conduite.

Voir au-delà du camion qui vous bouche la vue, « ça permet de faire du freinage préventif, ça peut t’éviter un nid-de-poule », illustre M. Bureau. Coordonner plusieurs véhicules pour minimiser la congestion, ce qu’on appelle la mise en peloton (platooning), devient plus efficace. Compter sur la capacité rapide de réaction d’une voiture pour freiner quand elle détecte un piéton ou un cycliste devient envisageable.

« Il faut voir ça plus comme un marathon que comme un sprint, précise le vice-président chez Telus. De nouvelles capacités vont apparaître. En 2025, elles vont être pleinement disponibles, absolument, mais il reste beaucoup de travail à faire : il va falloir déployer les applications, les tester. »

Telus estime offrir la 5G actuellement à 36 % de la population canadienne, et prévoit de monter à 70 % d’ici la fin de l’année. Ses deux concurrents, Rogers et Bell, affichent essentiellement les mêmes statistiques.