Avec près d'une nouvelle immatriculation sur cinq l'an dernier, la voiture électrique s'arroge en Norvège une part de marché sans équivalent dans le monde grâce à de généreuses mesures incitatives que les autres pays peinent à imiter.

Près de 26 000 voitures zéro émission -toutes à propulsion électrique à l'exception de neuf véhicules à hydrogène- ont été immatriculées en 2015 dans ce pays scandinave sur un total d'environ 150 700 véhicules particuliers neufs, selon les chiffres du Conseil d'information sur le trafic routier (OFV).

Leur part de marché est ainsi passée de 12,5% en 2014 à 17,1% l'année dernière.

«La Norvège a un rôle incroyablement important. Elle est l'étoile du Nord pour ce qui se passe dans le reste du monde» en la matière, estime Christina Bu, responsable de l'Association norvégienne pour la voiture électrique.

Ce pays, qui paradoxalement s'est enrichi grâce au pétrole et au gaz de la mer du Nord, a pris de nombreuses mesures pour encourager à l'achat de véhicules propres.

Ainsi, alors que les voitures à moteur thermique sont très lourdement taxées, celles à propulsion électrique sont exemptées de la quasi-totalité des taxes, ce qui les rend très compétitives à l'achat.

Avec un prix de 254 000 couronnes (39 900$), la version électrique de la Golf, voiture zéro émission la plus populaire en Norvège en 2015, est nettement moins chère qu'un modèle diesel à équipement comparable, proposé à 327 000 couronnes (51 300$).

Conséquence de cette défiscalisation, environ les deux tiers des e-Golf produites par Volkswagen prennent le chemin de ce royaume, qui est en outre, derrière les États-Unis, le deuxième marché de la Tesla S, une luxueuse berline aujourd'hui très répandue dans les rues d'Oslo.

Les conducteurs de voitures électriques y bénéficient par ailleurs de nombreux autres avantages comme la gratuité des péages urbains et du stationnement dans les stationnements publics et le droit -de plus en plus encadré- d'emprunter les couloirs réservés au transport collectif.

Oslo, la capitale norvégienne, devrait aussi ouvrir dans les prochaines semaines ce qui est probablement le plus grand stationnement pour voitures électriques du monde avec 86 points de recharge accessibles sans rien débourser.

Les autres pays à la traîne

Les autres pays sont loin derrière.

En France, où le gouvernement offre 10 000 euros (15 000$) pour le troc d'un vieux diesel contre une voiture électrique neuve, celle-ci n'a représenté l'an dernier que 0,9% des nouvelles immatriculations malgré également les efforts déployés en matière d'infrastructures.

Aux Pays-Bas, autre marché relativement porteur, la part des voitures électriques était d'environ 2% sur les onze premiers mois de 2015 et, selon ING, la principale banque néerlandaise, cette proportion devrait atteindre 7% en 2020.

«C'est un peu difficile pour les autres pays de copier la Norvège car ils n'ont pas une fiscalité très élevée sur les voitures classiques», souligne Christina Bu.

«Mais il y a de nombreux aspects de la politique norvégienne qui peuvent être transposés sans poser de problèmes budgétaires par exemple le droit de circuler dans les couloirs de bus : ça ne coûte rien et ça peut même permettre de fluidifier la circulation», fait-elle valoir.

Face à la nécessité de lutter contre le changement climatique encore affirmée en décembre par l'accord conclu à Paris par 195 pays, la transition semble inévitable.

En marge des négociations de la COP 21, 13 pays européens et États nord-américains, parmi lesquels l'Allemagne, le Royaume-Uni, la Norvège, les Pays-Bas, Québec et la Californie, se sont engagés à ce que tous leurs véhicules neufs soient zéro émission en 2050.

Après avoir atteint l'an dernier l'objectif de 50 000 voitures électriques circulant sur ses routes, la Norvège envisage pourtant de réduire -très graduellement- une (petite) partie de ses aides, lesquelles sont contestées en raison notamment de leur coût.

«Nous espérons et tablons sur le fait que les mesures incitatives resteront en place encore un moment, jusqu'à ce que cette nouvelle technologie ait pris solidement racine et soit réellement compétitive sans les avantages» qui lui sont octroyés, explique à l'AFP Anita Svanes, porte-parole de Volkswagen en Norvège.

«Ça prendra un peu de temps avant que les volumes de production n'atteignent un niveau tel que la voiture électrique soit compétitive par rapport aux autres voitures», ajoute-t-elle.