Dans les laboratoires de l'Institut de recherche d'Hydro-Québec (IREQ), Karim Zaghib et son équipe donnent un coup d'accélérateur aux fameuses batteries au lithium-ion des véhicules de demain. Au-delà de la performance recherchée - et obtenue -, la sécurité reste le principal cheval de bataille de ce chercheur en électrochimie.

«Pour moi, la sécurité, c'est l'objectif numéro un. Avant les performances. [...] La sécurité, pour nous, est très, très importante», souligne celui qui est l'administrateur du département Stockage et conversion d'énergie à l'IREQ.

«Importante» au point que s'il n'est pas définitivement réglé, le problème de la sécurité des batteries au lithium-ion «peut tuer la voiture électrique», confesse le chercheur, rencontré dans ses laboratoires à Varennes.

Rien de moins.

Au vu des expériences qui y sont menées, on comprend mieux l'enjeu. Dans le poste de contrôle de l'une des «chambres climatiques» où sont effectués, entre autres, des tests de sécurité sur les packs de batterie, M. Zaghib nous montre les vidéos d'expériences récentes. Les images sont édifiantes: le perçage d'un bloc à l'aide d'un pieu métallique fait exploser l'ensemble des cellules qui compose une batterie. Dans le meilleur des cas, on observe une combustion lente.

Cette particularité est connue depuis des années: le cocktail cobalt-graphite-lithium-ion qui compose les cellules peut être explosif en cas de perforation.

Pour accroître la stabilité et la sécurité des batteries, l'équipe de M. Zaghib propose que leurs cellules soient composées d'un matériau idoine: le phosphate de fer-lithium. Et qu'elles contiennent du nanotitanate, pour augmenter leur durée de vie et leur performance.

Qu'est ce que cela signifie? En laboratoire, le résultat - montré au représentant de La Presse - apparaît concluant. Sous l'action d'un pieu, les cellules ne s'enflamment pas. La recharge ne demande que quelques minutes. Leur durée de vie est de 30 000 cycles de charge et décharge. «Le cycle, c'est la vie d'une batterie. Un grand nombre de cycles indique que la batterie a une longue vie. [...] Dans une voiture électrique, il faut avoir au minimum 3500 cycles. Pour une voiture hybride, il faut de 8000 à 10 000 cycles. Plus dans ce cas, parce que ce ne sont jamais des cycles complets sur les hybrides», explique Karim Zaghib.

Ce genre de résultats suscite des convoitises. Et va générer des redevances. Hydro-Québec détient le brevet nord-américain et européen pour le phosphate de fer-lithium et détient la propriété intellectuelle mondiale pour le nanotitanate. À ce jour, 22 millions de dollars ont été encaissés par la société d'État à ce titre.

Ces matériaux que met au point le laboratoire de l'IREQ ont un talon d'Achille: ils confèrent moins d'autonomie à la batterie d'aujourd'hui. C'est pourquoi leur application est plus envisageable dans les véhicules hybrides, les scooters et les vélos électriques. Mais moins dans une voiture 100% électrique.

Pour M. Zaghib, associer sa batterie à une batterie longue durée serait une voie envisageable. Mais pour cela, il faut redimensionner la voiture. Et confondre les sceptiques.