Mettons-nous d'accord sur un point: aucune automobile ne sera jamais propre. Pas même une hybride. Cette technologie est, hélas, vu le nombre d'immatriculations, l'arbre qui cache le parc automobile, où la cylindrée moyenne et la puissance ne cessent d'augmenter depuis 10 ans. Hybrides comprises. La confusion est délibérée. La technique progresse tous azimuts. La pollution aussi. Il suffit de regarder la Chine et l'Inde pour s'en convaincre.

Cela dit, la hausse des prix du pétrole profite beaucoup aux hybrides. La symétrie est parfaite. Suffit que le prix à la pompe monte en flèche pour que la demande des consommateurs augmente elle aussi. C'est le délire! Les listes d'attente s'allongent sur plusieurs mois. Mais replaçons tout cela en contexte. Le phénomène n'est, pour l'heure, qu'une goutte d'eau dans l'océan que représente le parc automobile mondial. Aux États-Unis, par exemple, la firme J.D. Powers estime que les ventes de véhicules hybrides représenteront 3,5% des quelque 16 millions de véhicules immatriculés sur ce territoire à l'horizon de 2012. À titre de comparaison, J.D. Powers estime que, à cette même période, la part de marché des diesels aura augmenté à 7,5%... On s'arrache les hybrides, vous dites?

Hormis la Prius, qui ne fait pas de cachette au sujet de sa diffusion (ndlr: il s'en est écoulé 341 au Québec l'an dernier, et 382 en 2006) aucun constructeur ne veut révéler ses chiffres, ni la disponibilité de ces modèles. Dix doigts suffisent parfois pour dénombrer l'offre réelle d'un constructeur sur le marché québécois.

Une question d'image

La motorisation hybride est avant tout un formidable outil de marketing et vise essentiellement à promouvoir l'image vertueuse d'un constructeur à l'égard de l'environnement. Et cette stratégie réussit plutôt bien à Toyota, qui parvient avec ses Prius et consorts à nous faire oublier qu'elle produit également des éponges comme les Sequoia, Tundra et autres LX570.

En outre, cette communication d'entreprise fonctionne seulement sur des marchés historiquement allergiques au diesel, jugé - à tort - vibrant, bruyant et polluant, et réservé aux poids lourds. Car ni le Japon, ni les États-Unis n'ont encore véritablement connu la révolution technologique des moteurs diesel. Or, à puissance équivalente, ces nouveaux moteurs réduisent de 20% la consommation de carburant et les émissions de gaz, qui sont directement proportionnelles. Une économie de même ampleur que les moteurs hybrides, mais pour beaucoup moins cher. Et le diesel peut encore faire mieux. Greffez-lui, comme à la plupart des hybrides, une boîte à variation continue (CVT) et un dispositif d'arrêt automatique à l'arrêt, et l'avantage bascule en faveur de l'invention de ce bon vieux Rudolf.

Sceptique? Au cours des deux dernières années, le cahier L'Auto a réalisé trois tests comparatifs entre les deux technologies (diesel et hybride). Hormis une consommation plus faible en milieu urbain, l'hybride n'a jamais été en mesure de prendre avantage sur le diesel.

Toujours une question de coût

Comprenons-nous bien, les hybrides peuvent représenter une solution là où le diesel est peu implanté. Mais il reste un écueil, toujours le même: le coût. La technologie coûte encore très cher.

«L'hybride est une belle histoire, mais pas une histoire de profits, a dit Carlos Ghosn, président et chef de la direction de Renault-Nissan. Et nous ne voulons pas vendre des véhicules qui ne rapportent pas d'argent.» Pour Toyota, la donne diffère radicalement. Le constructeur japonais est assis sur un lourd coffre-fort et peut se permettre de ne pas trop regarder à la dépense, même s'il insiste aujourd'hui pour dire que, depuis la vente de la 150 000e Prius, l'opération est rentable. La concurrence accueille cette affirmation avec un sourire en coin. Toyota a déposé près de 500 brevets sur l'hybride et vend aujourd'hui sa technologie, en totalité ou en partie, à ses concurrents. La rentabilité de l'opération trouve son explication dans les revenus de licences encaissés par le numéro 1 de l'automobile japonaise.

La technologie hybride coûte cher et, forcément, l'industrie automobile refile en totalité ou en partie la facture au client. Vrai que les prix ont baissé et que des subsides gouvernementaux existent encore (le gouvernement fédéral doit abolir son programme de subvention le 31 décembre prochain), mais les conditions de financement ne sont pas toujours très avantageuses, d'où la nécessité pour le consommateur de faire usage d'une calculette pour s'assurer que l'équation financière (remises, taux d'intérêt, consommation, entretien, etc.) représente une bonne affaire. Et l'ennui, c'est que ce n'est pas toujours le cas.