La hausse du prix de l'essence a fait connaître «l'hyperkilométrage». Les adeptes de ce mouvement, qui compte des milliers de membres dans le monde, sont constamment en quête de moyens pour réduire leur consommation de carburant. Mais attention, plusieurs de leurs pratiques sont dangereuses, affirment les autorités et professionnels de la route.

Wayne Gerdes se fait envoyer promener au moins deux fois par semaine. La plupart du temps, le majeur dressé devant lui appartient à un conducteur exaspéré qui le dépasse en accélérant.

«J'essaie de les ignorer, dit-il. Je les appelle les mad rabbits (lapins fous). Ils accélèrent pour arriver plus vite au prochain feu rouge. Je trouve ça insensé, mais qu'est-ce que je peux y faire?»

Wayne Gerdes ne peut rien y faire. Il ne peut changer le comportement des autres. Mais il a modifié le sien quand il s'est rendu compte que sa conduite avait un effet direct sur la consommation d'essence de sa voiture. Il est depuis devenu l'hyperkilométreur le plus radical d'Amérique.

Si vous avez déjà éteint votre moteur dans un bouchon de circulation, ou réduit votre vitesse pour attraper les feux verts sur un long boulevard, vous avez une idée de ce qu'est l'hyperkilométrage (hypermiling en anglais).

Wayne Gerdes pousse le concept plus loin. Sur l'autoroute, il roule souvent à 90 km/h, dans la voie de droite - parfois même plus lentement, sur l'accotement pour ne pas gêner le trafic. Il éteint son moteur chaque fois qu'il le peut: à un feu rouge, par exemple, où lorsqu'il descend une côte. Et il utilise le moins possible les freins. Freiner fait grimper en flèche la consommation d'essence.

M. Gerdes conduit une Honda Accord 2005, qui a une consommation d'essence de 10 litres aux 100 kilomètres. Avec sa technique, il dit doubler l'économie d'essence, pour atteindre 4,9 litres aux 100 kilomètres en moyenne. Sur une voiture hybride, les performances sont encore plus frappantes.

Contexte géopolitique

Ce résidant de Chicago n'a pas toujours été aussi préoccupé par l'état de son réservoir d'essence. Sur l'autoroute, il roulait toujours dans la voie de gauche, à 120 km/h. «Je sacrais tout le temps contre les conducteurs plus lents.»

Tout cela a changé le 11 septembre 2001, quand il a vu les tours jumelles s'effondrer en direct à CNN. Le lendemain, il a commencé à ralentir.

«Nos achats d'essence envoient des milliards de dollars par mois au Moyen-Orient. En fait, nous payons la balle qui revient nous tuer. C'est un non-sens. C'est un crime de consommer autant de pétrole. Appuyer sur l'accélérateur constamment réduit le temps de transport de 4% en moyenne. Sur un voyage de 30 minutes, ça correspond à 72 secondes», dit-il.

Son premier geste a été de lancer un site web, CleanMPG.com, sur lequel il diffuse des trucs pour économiser l'essence. Le site compte aujourd'hui des milliers de membres, et le mouvement des hyperkilométreurs compte entre 25 000 et 50 000 adeptes dans le monde, affirme-t-il.

Courses d'économies

M. Gerdes a aussi commencé à organiser des «courses». Il s'agit de parcourir une distance donnée en utilisant le moins de carburant possible. Il gagne plusieurs concours chaque année. Si bien qu'il est devenu une célébrité dans cet univers parallèle. En 2005, il a parcouru une distance record de 2248 kilomètres au volant d'une Toyota Prius avec un plein d'essence. Il a réalisé cet exploit en roulant très lentement, en donnant rarement des coups de frein, en gardant les vitres relevées (pour être plus aérodynamique) et en n'utilisant pas le climatiseur, qui nécessite de l'essence pour fonctionner.

Mais les concours, dit-il, ne le passionnent pas outre mesure. «C'est éphémère, tout ça. Le bon côté, c'est que ça montre aux gens que c'est possible de faire 1,9 litre aux 100 kilomètres avec une voiture. Ma vraie victoire, c'est de réussir à convertir les gens. Pas besoin d'acheter une hybride pour économiser de l'essence. Changer ses habitudes est tout aussi efficace, voire plus efficace.»