Élyse Marquis l’a vécu. À la caméra, par-dessus le marché. Sa fille Alice a quitté le nid, est partie voir ailleurs si elle y était, pour s’installer en appartement. Un documentaire de quatre épisodes déposés sur l’Extra de Tou.tv dès mardi expose ce sujet délicat, aux émotions en dents de scie : le syndrome du nid vide.

Nous avons rencontré les principales intéressées, la mère et la fille, la semaine dernière, pour en discuter. Premier constat : de toute évidence, le fameux « syndrome », tristesse, nostalgie, ou « vertige », comme dit Élyse Marquis, comédienne et animatrice, qui se livre dans Quand les enfants quittent le nid à titre de « maman d’Alice », a été de courte durée. Mère et fille pouffent de rire ici, s’échangent des clins d’œil complices là. La fameuse fin de quelque chose a sans doute eu lieu, mais semble avoir évolué vers du mieux.

Tant mieux, d’ailleurs, puisque c’est précisément le but de la série, une idée originale d’Ève Déziel, réalisée par Marianne L’Heureux, pour Véro.tv : mettre des mots sur une étape de vie dont on parle bien peu, et qui pend plus ou moins au nez de tous les parents.

Vous savez, ce moment où la fierté se mêle à une douloureuse nostalgie, quand on se sent déchiré entre le sentiment du travail accompli et la tristesse de constater que le temps a passé ? Si vite, trop vite ? Ce passage peut-il se faire en « douceur » ? C’est la question qui sous-tend, on l’aura compris, les quatre épisodes, qui suivent Élyse Marquis et sa fille, jusqu’au déménagement, tout en présentant ici et là quelques témoignages variés.

La parole aux parents

Si la série survole le phénomène et demeure essentiellement en surface, pour ne pas dire dans l’anecdote (on aurait pris beaucoup plus d’experts de champs différents, mais une seule et même psychologue – excellente Geneviève Beaulieu-Pelletier – intervient dans les deux premiers épisodes que nous avons pu visionner), elle a l’immense mérite de donner la parole à plusieurs parents, qui mettent ainsi des mots, et du ressenti, sur cette étape charnière dans la vie des parents.

IMAGE FOURNIE PAR RADIO-CANADA

Élyse Marquis et sa fille, Alice, se livrent dans Quand les enfants quittent le nid, sur Véro.tv.

Soulignons, dans le troisième épisode, l’angle culturel avec la comédienne Nathalie Doummar, ou, dans le quatrième, le phénomène vu par les pères (avec Sophie Faucher et Michel Labrecque).

En matière de ressenti, justement : « c’est surtout avant que j’ai vécu beaucoup de stress », reprend Élyse Marquis, avec la même authenticité qu’on lui retrouve dans le documentaire. Ces longs mois qui ont précédé le jour J, à la fin de l’été dernier, elle s’est beaucoup questionnée : « Qu’est-ce qui va m’arriver ? »

Ce questionnement identitaire, face à cet « énorme changement » que la psychologue interrogée expose ici avec justesse et sensibilité. « Je ne peux plus être un parent de la même façon », analyse Geneviève Beaulieu-Pelletier dans le documentaire. En gros : il faut « accueillir l’inconnu », et une fois cela dit, s’ouvrir à un éventail de possibilités. « Maintenant, qu’est-ce que je fais avec cet espace ? » Une question ouverte qui invite à la créativité, faut-il le souligner.

Pourquoi tant de stress, au juste ? Élyse Marquis émet quelques hypothèses : « Il y a quelque chose d’un peu tabou, croit-elle. On est fier, ils volent de leurs propres ailes [...], mais il y a un vide aussi, vraiment. » Un « deuil » carrément, soulignent plusieurs parents. Conséquence : « beaucoup le vivent dans le silence, et se sentent seuls. »

À noter que, de son côté, sa fille Alice n’a vécu que du bonheur. « Moi, j’avais hâte, dit-elle en souriant. Ça faisait longtemps que j’avais hâte ! »

L’importance du dialogue

Finalement, non, on l’a dit, mère et fille n’ont pas perdu leur fameux « lien ».

Je suis encore une mère, mais ça se transforme ! Je fais encore le taxi, j’organise encore des affaires ! [...] Mais je ne suis plus la mère qui dirige, je suis plus la mère ou l’amie qui s’intéresse et s’émerveille !

Élyse Marquis

Un conseil pour y arriver ? « Ne pas avoir peur d’en parler », répond Élyse Marquis sans hésiter. Elle ajoute ce conseil livré par un père dans la série : poursuivre les activités qu’on faisait avant avec notre enfant, que ce soit l’entraînement, le théâtre ou autre chose, même seul. « C’est dur, confirme-t-elle, mais sinon, on reste figé ! » Et puis au lieu de s’éparpiller à droite ou à gauche, « trouver le bonheur dans ce qu’on a » !

On ose une dernière question à Élyse Marquis : à quel âge est-elle partie du nid, elle ? « Seize ans, éclate-t-elle de rire. Et je ne me suis jamais demandé ce que ça allait faire à mes parents ! Et c’est très bien, c’est dans l’ordre des choses : quand on est jeune, on vole de nos propres ailes. Les parents doivent encourager leurs enfants, puis... on deale avec nos émotions après ! »

Dès le mardi 19 mars sur Véro.tv (Tou.tv Extra)