Nahéma Ricci et Stéphane Gagnon forment un duo aussi redoutable qu’improbable dans Motel Paradis. Leurs personnages n’ont « rien pour s’entendre » et pourtant, ils joignent leurs forces pour résoudre un profond mystère. En entrevue, par contre, les acteurs s’accordent sur plusieurs choses, dont l’état spectaculaire du motel dans lequel ils ont tourné plusieurs scènes, le respect qu’ils vouent à l’auteure et réalisatrice Sophie Deraspe et, surtout, leur difficulté à décrire la série.

En entrevue, quand nous avouons au tandem à quel point nous peinons à mettre des mots sur Motel Paradis depuis que nous avons englouti ses deux premiers épisodes, un silence hébété envahit la pièce. « Nous aussi », répond Nahéma Ricci après quelques secondes. « C’est un objet particulier », ajoute Stéphane Gagnon.

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Nahéma Ricci et Stéphane Gagnon tiennent la vedette de Motel Paradis.

Au Festival du nouveau cinéma (FNC) plus tôt en octobre, où Motel Paradis a fait l’objet d’une projection spéciale avant son atterrissage prévu sur Club illico, le vice-président aux contenus originaux de Québecor Média, Denis Dubois, a parlé d’une série d’auteure, « unique mais accessible ». Une série « signature », comme Le temps des framboises de Philippe Falardeau, ou encore La nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé de Xavier Dolan, attendue en novembre.

Nahéma Ricci acquiesce.

Avec Sophie [Deraspe], c’est sûr que Motel Paradis n’allait pas être un thriller traditionnel. Elle joue avec des codes différents. Elle révolutionne un peu le genre. On n’est plus dans l’intrigue policière classique. On emploie des mécanismes d’investigation inédits.

Nahéma Ricci

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Nahéma Ricci

Motel Paradis relate l’enquête que mène Jen (Nahéma Ricci) qui, après avoir connu une expérience de mort imminente, croit fermement que sa sœur, disparue trois ans plus tôt, ne s’est pas suicidée, comme la police l’avait initialement conclu. Déterminée à élucider cette nébuleuse affaire une fois pour toutes, la jeune femme convainc un enquêteur retraité (Stéphane Gagnon) de l’aider en l’accompagnant à Val-Paradis, son patelin d’enfance, qui renferme autant de secrets bien gardés que d’habitants légèrement décalés.

« Pour Jen, c’est comme une seconde chance, explique Nahéma Ricci. Parce qu’elle se sent coupable de tout ce qui est arrivé. Elle devient donc complètement obsédée par cette idée que sa sœur n’aurait pas mis fin à ses jours, qu’elle aurait peut-être été tuée. Elle ne pense à rien d’autre. C’est son unique focus. Elle veut savoir. »

Pour sa part, l’ancien flic Alain, tassé pour inconduite, accepte d’épauler Jen non pas parce qu’il croit particulièrement aux raisons ésotériques derrière son initiative, mais parce qu’en pleine crise existentielle, il cherche une raison de continuer.

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Stéphane Gagnon

« Si Jen était venue voir Alain 12 mois avant, il l’aurait revirée de bord en trois minutes et quart, croit Stéphane Gagnon. Il aurait dit : “Tes bibittes, va les régler.” C’est un policier. Il mène des enquêtes. Il veut des faits, pas des visions. Il n’a pas de temps à perdre avec ça. Mais aujourd’hui, il est tout perdu. Tout ce qu’il a construit s’écroule, et Jen lui offre une ouverture qu’il n’avait jamais imaginée, une porte qu’il n’aurait jamais osé franchir. »

En confiance

Le tournage de Motel Paradis n’a pas été de tout repos. Il s’est non seulement déroulé l’automne dernier, en pleine pandémie, mais il s’est produit en pénurie de main-d’œuvre, en grande partie dans un motel « assez olé olé » situé à Sorel-Tracy, comme l’a souligné Sophie Deraspe au FNC.

Nahéma Ricci et Stéphane Gagnon conviennent que l’établissement « un peu tout croche », et dont ils taisent le nom, leur en a fait voir de toutes les couleurs.

Il y a des scènes où j’étais comme : “Wow ! Le décor, vous y êtes allés fort !” Et l’équipe [de Motel Paradis] disait : “On n’a rien touché. C’est tel quel.”

Nahéma Ricci

Délabré ou non, le fameux motel n’a jamais ébranlé la confiance des comédiens en Sophie Deraspe, avec qui ils avaient déjà travaillé avant : Nahéma Ricci dans Antigone (2019) et Stéphane Gagnon dans Bête noire (2021), entre autres. La paire salue le calme olympien de l’auteure, réalisatrice et directrice photo.

« Tourner, ça demande une gymnastique mentale hallucinante, mais Sophie reste toujours en contrôle, affirme Nahéma Ricci. Travailler avec quelqu’un comme ça, c’est hyper rassurant… »

« … surtout en télévision, poursuit Stéphane Gagnon. Parce que Dieu sait que c’est déstabilisant, les journées qu’on fait. Quand tu as un capitaine comme elle au bout du navire, ça rassure tout le monde. »

« Son calme lui confère une autorité naturelle, renchérit Nahéma Ricci. Je ne sais pas à quel point elle s’en rend compte, mais elle a une grande autorité. Les gens ont envie de travailler avec elle. C’est l’effet qu’elle a sur son équipe. »

Motel Paradis atterrit sur Club illico jeudi.