C’est confirmé : les messages publicitaires débarquent sur Netflix. Bien qu’en offrant des espaces aux annonceurs, le géant américain vient concurrencer les diffuseurs québécois, TVA, Radio-Canada, Noovo et compagnie devraient s’en tirer presque indemnes, estiment les experts.

Netflix proposera un plan « De base avec publicité » pour 5,99 $ par mois. Ce forfait sera offert à partir du 1er novembre au Canada.

Ce plan se greffe aux trois plans existants du populaire service de vidéo sur demande : « De base » (9,99 $ par mois), « Standard » (16,49 $ par mois) et « Premium » (20,99 $ par mois).

Selon les informations divulguées par l’entreprise lors d’un point de presse virtuel jeudi, pour chaque heure de contenu, en moyenne, de 4 à 5 minutes de messages publicitaires sera diffusée. Ces pubs d’une durée de 15 ou 30 secondes seront présentées avant et pendant les films et séries.

Les publicités qui seront diffusées durant les épisodes surgiront « aux moments opportuns », ont précisé les dirigeants de l’entreprise durant une séance de questions-réponses.

En d’autres termes, une promo de vols au rabais pour l’Asie ne devrait pas émerger en plein milieu d’une scène hyper dramatique de Squid Game.

En raison de restrictions de licences, quelques séries et films ne seront pas offerts aux abonnés du nouveau forfait avec pub. Il s’agit toutefois d’un nombre limité de contenus, qui tournerait autour de 5 % à 10 %, compte tenu du territoire, a précisé Netflix.

Netflix ne relaiera aucune publicité de cigarettes ou d’armes à feu. Les messages de nature politique seront également écartés.

Rien à craindre au Québec

Netflix ne devrait pas trop gruger dans « la tarte publicitaire » des réseaux québécois, estiment les experts.

« Il y a un truc sur lequel Netflix a encore du mal à compétitionner au Québec, malgré toutes ces années chez nous, et c’est les contenus québécois et francophones, souligne Catalina Briceño, professeure à l’École des médias de l’UQAM. Sur ce plan, les Québécois et Québécoises aiment encore beaucoup ICI Tou. tv et Club illico. Je ne dis pas que c’est une protection à toute épreuve, mais c’est une consolation. »

Même son de cloche chez Sarah Thompson, présidente de l’agence de publicité dentsu media. Selon elle, les diffuseurs d’ici n’ont rien à craindre. « Jusqu’à présent, le coût d’entrée pour la publicité sur Netflix est très élevé, ce qui limite le nombre de personnes qui peuvent en faire. De plus, le contenu en français sur Netflix, ainsi que sur d’autres plateformes de diffusion en continu, est faible. […] En tant que responsables des médias, nous savons que nous devons investir où l’audience se trouve, et celle-ci se trouve chez les diffuseurs québécois. »

Radio-Canada n’a pas voulu commenter la nouvelle et ses possibles répercussions au Québec. Nos demandes d’entrevue sont demeurées sans réponse chez TVA et Noovo.

Une mesure qui arrive à point

Pour Netflix, l’ajout d’une offre avec publicité s’inscrit dans une stratégie visant à diversifier ses sources de revenus. Son entrée en vigueur arrive à point, juge Christine Thoër, professeure au département de communication sociale et publique de l’UQAM.

« Netflix a perdu plus de 1 million d’abonnés en 2022. La concurrence avec les autres géants, Prime Video, Disney+, Apple TV, est de plus en plus sévère, et s’est ajoutée la fermeture du service Netflix en Russie. »

De surcroît, en septembre, une enquête menée par Reviews.org auprès de 1000 Américains a révélé qu’une personne sur quatre envisage de résilier son abonnement à Netflix d’ici 2023. La principale raison ? L’augmentation du coût des abonnements, d’après 40,5 % des utilisateurs qui songent à quitter le bateau.

La capacité de fidéliser les abonnés actuels et d’attirer de nouveaux abonnés est cruciale pour Netflix, et joue fortement auprès des actionnaires. Mais dans le contexte de concurrence actuelle, c’est de plus en plus difficile.

Christine Thoër, professeure au département de communication sociale et publique de l’UQAM

« Or, si les revenus baissent, cela porte atteinte à la capacité de Netflix de produire de nouveaux contenus ou d’acheter des droits de diffusion et donc de fidéliser les abonnés et d’en attirer de nouveaux. »

Doit-on s’inquiéter pour l’avenir de Netflix ? Non, répond Sarah Thompson de dentsu media. « Ils restent les leaders du marché. Mais ils ont davantage de concurrence. La récession qui s’annonce incitera les gens à surveiller de plus près leurs dépenses. »

Soulignons qu’au printemps, Disney a annoncé son intention de concocter un forfait avec publicité pour Disney+. Ce dernier devrait arriver au cours des prochains mois.

Production effrénée

Netflix continue de produire des contenus originaux à vitesse grand V. Au troisième trimestre, la plateforme a battu son propre record en publiant pas moins de 1026 épisodes, très loin devant Prime Video, qui arrive 2e avec 223 épisodes inédits, d’après les données recensées par l’agence de Wall Street MoffetNathanson.

« Pour Netflix, la question est maintenant de savoir comment trouver un équilibre entre la création de contenu pour servir le public, la publicité et la poursuite de la croissance », souligne Sarah Thompson.

Plans mensuels des plateformes au Québec

Netflix

  • De base avec publicité : 5,99 $
  • De base : 9,99 $
  • Standard : 16,49 $
  • Premium : 20,99 $

Club illico

  • 15 $
  • 10 $ (pour les clients de Vidéotron)

ICI Tou. tv

  • Gratuit (avec publicité)
  • Extra : 6,99 $

Crave

  • Crave Total : 19,99 $
  • Crave Mobile : 9,99 $

Disney+

  • 11,99 $

Prime Video

  • 9,99 $
  • 4,99 $ (pour les étudiants)

Apple TV+

  • 5,99 $

* Tarifs mensuels, taxes non incluses