L’an dernier, Suzanne Clément a joué une scène de combat. Nue. Dans les douches d’une prison pour femmes. La séquence, destinée au film L’origine du mal, a beaucoup stressé l’actrice. Tellement, qu’elle y a pensé pendant des mois. « Mais je l’ai fait, déclare-t-elle fièrement. Je savais que ça allait me faire peur et que j’allais capoter, mais fallait que j’y aille. »

STAT, c’est un peu comme cette scène de douche, lance la comédienne en rigolant. « J’étais comme : Oh my God ! Ça risque d’être gros. Je sais pas par quel bout pogner ça, mais go ! Je fonce ! »

Nouvelle quotidienne d’ICI Télé que de nombreux fans endeuillés de District 31 attendent avec impatience, STAT marque le retour de Suzanne Clément au petit écran québécois, 10 ans après avoir brièvement incarné la détenue Shandy dans Unité 9 (Catherine-Anne Toupin a repris le flambeau après une saison).

Dans cette fiction signée Marie-Andrée Labbé (Sans rendez-vous, Trop), l’actrice fétiche de Xavier Dolan défend le rôle d’Emmanuelle St-Cyr, la cheffe urgentologue de l’hôpital Saint-Vincent de Montréal. Les premiers épisodes nous révèlent une médecin passionnée et compétente dotée d’un esprit vif, mais également une femme endeuillée, qui s’est forgé une carapace pour cacher son côté vulnérable.

PHOTO ÉRIC MYRE, ARCHIVES RADIO-CANADA

Suzanne Clément incarne l’urgentologue Emmanuelle St-Cyr dans STAT.

Après huit semaines de tournage, la comédienne de 53 ans parle avec enthousiasme de l’aventure qu’elle partage avec Lou-Pascal Tremblay, Patrick Labbé, Geneviève Schmidt, Stéphane Rousseau et plusieurs autres collègues acteurs. Et bien qu’elle éprouve beaucoup de plaisir à plonger dans l’univers médical, gérer son stress demeure un défi.

Je suis beaucoup plus nerveuse aujourd’hui. Des journées, des fois, je suis comme : coudonc, est-ce que je vais passer au travers ? Quand j’étais plus jeune, je n’étais pas comme ça. Peut-être parce qu’avec l’âge, je comprends davantage les enjeux…

Suzanne Clément

Heureusement pour elle (et pour nous), ses montées d’angoisse, qu’elle semble plutôt bien cacher, n’ont jamais freiné ses élans. Marie-Andrée Labbé la décrit même comme « quelqu’un qui n’a peur de rien ».

« Elle est game, commente la scénariste. Elle m’impressionne. Sa façon de lire mes textes, avec rigueur, m’oblige à réfléchir encore plus. Je suis privilégiée. Entre elle et Emmanuelle, c’est un match parfait. Ensemble, je crois qu’on va pouvoir amener ce personnage vraiment loin. »

Un kaléidoscope

La Presse s’est entretenue avec Suzanne Clément au visionnement de presse de STAT à Radio-Canada. Une fois la projection terminée, l’actrice — qui sera assurément finaliste aux prix Gémeaux l’an prochain – s’est montrée sévère envers son travail. Elle pensait notamment aux choses qu’elle allait changer dans son jeu, pourtant d’une grande justesse, aux yeux des critiques sur place.

J’ai toujours été critique envers moi-même. Avec le temps, c’est encore pire.

Suzanne Clément

Pour incarner une urgentologue expérimentée, Suzanne Clément a effectué plusieurs stages d’observation auprès de divers médecins. Elle a notamment suivi la Dre Renée Blondin, qu’on peut voir dans l’émission documentaire De garde 24/7 à Télé-Québec. « C’est une femme extraordinaire, commente la comédienne. Elle est très, très forte. La manière dont elle approche ses patients… Elle impose quelque chose tout en gardant une grande humanité. Les patients se sentent en confiance. J’espère que je vais réussir à ajouter ça comme ingrédient. »

Suzanne Clément décrit STAT comme un kaléidoscope, soit une succession rapide et variée d’émotions. Elle apprécie la touche d’humour qui colore certains dialogues, et qui apporte une légèreté salutaire entre deux situations parfois très dramatiques.

« Je suis en train de regarder Ted Lasso. C’est plein de bons sentiments. Ça fait du bien. Il ne faut pas perdre le rire et l’humanité. Récemment, j’ai rencontré un infirmier qui m’a dit : plus les cas sont graves, plus on fait des jokes qui n’ont pas d’allure. Ça fait partie de leur façon de gérer. »

Face aux attentes

Le mot « quotidienne » n’a pas effrayé Suzanne Clément lorsqu’elle a reçu l’offre de tenir la vedette de STAT, l’hiver dernier. Il faut dire que l’invitation arrivait à point. Après avoir perdu son père en 2021, l’actrice, qui menait depuis plusieurs années une fructueuse carrière en Europe, est revenue au Québec, histoire de passer du temps en famille.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Suzanne Clément

En tant que téléspectatrice de District 31 (elle a d’ailleurs failli y jouer), la comédienne savait dans quoi elle s’embarquait en acceptant la proposition des producteurs Fabienne Larouche, Michel Trudeau (Aetios) et Guillaume Lespérance (A Média). Elle devinait également l’énorme battage médiatique qui entourerait l’entrée en ondes du drame, après l’immense popularité des aventures du bon commandant Chiasson et compagnie.

Elle tente aujourd’hui de l’ignorer.

Je n’ai plus le temps de penser aux attentes, parce qu’il y a tellement de texte à apprendre ! Mon cerveau fait des jumping jacks. C’est capoté ! C’est au-delà de tout ce que j’ai vécu. Et j’en ai appris du texte, dans ma vie. Mais STAT, c’est une coche de plus.

Suzanne Clément

Mais revenons au long métrage L’origine du mal, du réalisateur français Sébastien Marnier. Projeté à la Mostra de Venise la semaine dernière, ce thriller est également présenté au Festival international du film de Toronto, qui bat son plein jusqu’à dimanche.

L’offrande, qui doit prendre l’affiche cet automne dans l’Hexagone, raconte l’histoire d’une modeste ouvrière de poissonnerie qui reprend contact avec son père biologique, et découvre son étrange famille. Suzanne Clément y campe l’amoureuse de l’héroïne, qui purge une peine de prison.

« C’était un tournage agréable, avec une belle gang, indique-t-elle. Mon papa est décédé en même temps. Je l’ai accompagné le plus longtemps possible, mais j’avais un tournage de prévu. Je devais le quitter. Ça n’a pas été une décision facile à prendre, mais bon… C’est fait. »

Une envie de liberté

L’origine du mal fait partie d’une longue liste de productions de premier plan auxquelles Suzanne Clément a participé au cours des dernières années, de l’autre côté de l’Atlantique. On peut aussi mentionner les séries Dérapages sur Arte France, Versailles sur Canal+et Bulle sur RTS, sans compter une dizaine de longs métrages.

Bien qu’elle soit sous contrat avec STAT, Suzanne Clément n’a pas l’impression de mettre sa carrière européenne en veilleuse.

« La liberté, c’est super important pour moi. C’est un sujet avec ma psy, disons. Mais j’ai beaucoup de plaisir avec STAT. Il n’y a rien de plate. Les réalisateurs changent, les rôles épisodiques changent, les cas changent… Ça stimule beaucoup d’affaires. »

« Et puis, on a quatre mois de congé par année… Ça laisse des possibilités. »

ICI Télé présentera STAT du lundi au jeudi à 19 h à partir du 12 septembre. Quatre épisodes d’une durée exceptionnelle d’une heure lanceront la première semaine.