Le Québec n'a pas fini d'entendre parler de Mehdi Meskar. En vedette aux côtés de Rose-Marie Perreault dans la minisérie Le Monstre, inspirée du drame vécu par Ingrid Falaise, l'acteur d'origine italo-marocaine de 23 ans compte bien poursuivre son aventure québécoise, mais dans la peau d'un personnage un peu plus sympathique qu'un violent pervers narcissique la prochaine fois.

Vous avez été choisi par le réalisateur Patrice Sauvé parmi plus de 80 comédiens passés en audition pour Le Monstre. Pourquoi avoir tenté votre chance au Québec?

C'était la première fois que je passais une audition ici. J'ai reçu un courriel de la directrice de casting demandant à mon agent que j'auditionne pour le personnage. J'ai envoyé une vidéo de Lyon où j'étais en tournage. Deux jours plus tard, Patrice Sauvé voulait me rencontrer pour le rôle de M.

Le personnage de M étant d'origine maghrébine, avez-vous pensé que cela pourrait encourager le stéréotype persistant du batteur de femmes d'origine arabe auprès des spectateurs québécois?

C'était une question importante pour moi à la lecture du scénario. On en a parlé avec Patrice Sauvé. Ce qui était plus grand que tout, c'est de comprendre que cette réalité de violence conjugale existe partout, en France, au Québec, en Italie ou au Maghreb. Qu'on sauve une Sophie ici ou ailleurs, c'est pareil pour moi. Je n'ai pas le pouvoir sur le public: ceux qui voudront y voir du mauvais y verront du mauvais, ou le contraire. C'est certain que des gens vont se réconforter dans des idées négatives sur les Maghrébins; d'autres vont comprendre le message réel que porte cette histoire-là. Ce qui a été fait dans la série, c'est que M n'est pas le seul personnage maghrébin de l'histoire. Beaucoup d'autres personnages ne partagent pas du tout sa vision comme ses amis, ses proches et un médecin à qui parle Sophie. Ça démontre la diversité dans toutes les communautés, tous les pays.

La France et le Québec ont deux réalités différentes en termes de diversité à l'écran. Vous êtes d'origine italo-marocaine. Quels genres de rôles vous faites-vous offrir en France?

Je me rends compte que c'est très divers. Je n'ai jamais été pris en France pour jouer le rôle d'un Maghrébin. Il y a beaucoup d'acteurs de mon âge qui ont des origines maghrébines et c'est tout à fait normal là-bas. Ce sont de bons acteurs respectés. Tahar Rahim (Un prophète) a gagné deux Césars la même année! Nous sommes bien représentés en France.

Comment vous êtes-vous préparé à vous glisser dans la peau du monstre?

J'ai fait le tour des entrevues qu'Ingrid a données à ce sujet. J'ai lu ses livres et j'ai été frappé par la puissance de ce récit et par la violence de M. Le travail s'est essentiellement fait en lisant sur les pervers narcissiques et en regardant des vidéos sur YouTube. Mais aussi en parlant avec Ingrid, même pendant le tournage. Quand on joue un rôle comme ça, on a besoin de quelqu'un qui nous porte avec son message et nous conforte dans l'idée qu'on peut aussi sauver des vies à travers cette histoire en montrant les mécanismes du pervers narcissique. C'est bouleversant. Je n'ai pas pris ça à la légère. Je sentais la responsabilité de respecter et de rendre justice à l'histoire d'Ingrid et aussi de tout donner pour monter au grand public cette réalité qui existe partout dans le monde.

Certaines scènes sont très difficiles à regarder. Aviez-vous déjà joué un personnage d'une telle violence?

Non, au contraire ! C'est presque un contre-emploi. J'ai toujours joué des mecs très gentils ou des rôles où les gens pleurent le décès de mon personnage. C'était un vrai défi qui me faisait peur. Je n'étais pas certain de pouvoir porter ce rôle pendant plusieurs mois. Ce n'est pas facile. La violence de M est basée sur sa violence, mais aussi ses mots. Je pouvais compter sur les textes du scénario, très bien écrit. Mais ce qui était dur pour moi était de voir Sophie face à M, en train de souffrir. On a beau se préparer, quand tu es sur le plateau, il y a toujours un facteur inconnu que tu ne peux pas préparer. J'ai parfois eu du mal le soir en rentrant chez moi avec cette image de Sophie devant M en train de la frapper. C'était très difficile. J'ai été très bien accueilli par l'équipe et surtout Rose-Marie. Après une scène de violence, on se faisait un câlin avant de rentrer tranquille à la maison.

En France, vous serez en vedette dans la deuxième saison de la série Les engagés et vous tiendrez le premier rôle dans deux longs métrages en Allemagne. Avez-vous d'autres projets au Québec ou ailleurs?

Je me suis vraiment bien senti accueilli au Québec. Si je peux travailler avec d'autres réalisateurs comme Patrice Sauvé, j'en serai très heureux! J'ai désormais un agent ici: Maxime Vanasse. J'ai hâte de voir ce qui va se passer. Peut-être que j'aurai des rôles où je suis plus sympa. Remarquez, ce n'est pas difficile! Je viens aussi de finir de tourner dans une série originale Netflix qui sortira l'automne prochain, dans un rôle vraiment différent...

Le Monstre, disponible dès maintenant sur ICI Tou.tv Extra.