La nouvelle pièce acrobatique du Cirque Éloize a enfin été présentée à Montréal (pour quatre représentations), près d’un an et demi après sa création aux Îles-de-la-Madeleine. Un spectacle porté par le conteur madelinot Cédric Landry et les trois musiciens du groupe trad Suroît.

Ce retour aux sources est un joli clin d’œil pour la compagnie qui célèbre son 30e anniversaire et qui a récemment transformé l’ancienne église de Havre-Aubert des Îles-de-la-Madeleine en salle de spectacle.

Difficile de comparer cette nouvelle mouture mise en scène par Félix Dagenais avec la version originale créée à l’été 2022 par Michel-Maxime Legault – puisque nous ne l’avons pas vu ! – mais ce qu’on peut vous dire, c’est que le conteur Cédric Landry y joue un rôle central. En fait, il est le sel d’Entre ciel et mer.

Ses contes, anecdotes et autres apartés sont livrés avec charme, charisme, bienveillance et d’un naturel désarmant, qui élèvent ce spectacle éminemment musical. Car disons les choses franchement, le volet acrobatique, assez classique, ne réinvente rien.

Avec son petit accent acadien tout à fait séduisant, Cédric Landry prend le temps de nous « amariner », c’est-à-dire de nous « accoutumer » avec la culture de son archipel.

Son oncle Roger, dira-t-il, n’aurait jamais fait le voyage à Montréal, « parce qu’il ne connaît pas la moitié du monde là-bas… » Un texte qu’il doit de toute évidence adapter selon le lieu de la représentation…

PHOTO LUCILLE AUDOINEAU-MAIRE, FOURNIE PAR ÉLOIZE

Une scène au mât chinois tirée d’Entre ciel et mer.

Petit à petit, le conteur nous déballe ses histoires dans la pure tradition de ces récits oraux imaginaires, et il en raconte de très bonnes, pleines d’esprit et de tendresse, appuyé par les trois musiciens du groupe trad – au violon, à la mandoline ou à la guitare, dans un décor épuré avec une toile de fond qui change de couleur.

Mentions spéciales pour son histoire de la construction – par trois fois – d’une église de village ; et aussi de ce récit amoureux entre Claire et Louis, séparés des Îles un temps jusqu’à leur réunion… à Verdun. Des contes savoureux, où notre capitaine de bateau manie le verbe avec une efficacité et une simplicité déroutantes.

Cédric Landry pousse la note du récit jusque dans l’exécution des numéros de cirque – qu’il accompagne bien souvent. Ces numéros, comme nous le disions, sont de facture assez classique, et servent en quelque sorte à illustrer ses histoires. De manière parfois un peu trop littérale d’ailleurs.

S’il parle d’une tempête, on entend le bruit du vent, s’il mentionne un bateau, on entend un klaxon naval ; quand il est question de la construction de l’église du village, les acrobates grimpent au sommet d’un mât chinois ; lorsqu’on célébrera le mariage de deux amoureux, la mariée fera un numéro de tissu aérien drapé… dans un drap blanc.

PHOTO NIGEL QUINN, FOURNIE PAR ÉLOIZE

Une partie de la distribution du spectacle

Bref, les liens sont évidents, il n’y a pas d’erreur possible, mais ils le sont tellement, qu’il n’y a plus d’évocation possible pour le spectateur, ce pouvoir magique qui nous permet de faire notre propre film. Au lieu de cela, même si on comprend le désir du metteur en scène de nous mettre dans l’ambiance, on a peu l’impression de voir surligner à doubles traits les mêmes propos.

On a tout de même apprécié le numéro de roue Cyr tout en douceur de Cléa Périon (avec le très beau texte sur le temps), ainsi que les numéros aériens périlleux – au cerceau et au tissu – de Florence Amar.

Mais encore une fois, c’est Cédric Landry, par sa grande sensibilité – avec l’histoire de ce père mourant qui s’apprête à passer de l’autre côté de la ligne d’horizon, entre ciel et mer, qui nous touche et qui donne de la profondeur à un spectacle qui autrement aurait fait figure de simple cabaret.

Consultez les dates de tournée du spectacle Entre ciel et mer
Entre ciel et mer

Entre ciel et mer

Du Cirque Éloize

Au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, Jusqu’au 18 novembre, puis en tournée

7/10