Stop ou encore ?, s’est demandé cette année Nadine Marchand, à la tête du festival Montréal complètement cirque depuis ses débuts. Pourquoi pas les deux ? Elle restera productrice de la création phare Les trois géants, mais délaissera la direction de l’évènement, qui s’est terminé dimanche. Elle estime que le festival a atteint sa vitesse de croisière et de croissance.

Nadine Marchand dresse un bilan positif des 13 premières éditions du festival Montréal complètement cirque (MCC). À la direction depuis le début, elle a aidé le poupon à voir le jour, à faire ses premiers pas et à devenir un adolescent vigoureux.

« J’ai senti que le festival était arrivé à maturité, donc je peux me concentrer sur la production des Trois géants, explique-t-elle en entrevue exclusive avec La Presse. Ce spectacle fait partie de la relance touristique de Montréal. Il y a là un énorme potentiel, appuyé d’ailleurs par Tourisme Montréal, pour que ça devienne encore plus grand. »

Les trois géants ont attiré des milliers de spectateurs pendant le festival, sur trois sites différents occupés par des troupes d’ici : le Cirque Éloize, Les 7 Doigts de la main et Machine de cirque. Un défi technique et artistique énorme relevé avec brio.

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, ARCHIVES LA PRESSE

Les trois géants de Montréal complètement cirque, à l’esplanade Place Ville Marie (PVM) avec Les 7 Doigts de la main

« La structure comme telle est une réalisation du génie québécois, à partir d’une idée de Michel Laprise, qui a demandé beaucoup de travail. Les artistes de cirque n’en ont pris possession que trois jours avant la première. On veut aller plus loin avec ce projet. MCC était déjà présent à la place Émilie-Gamelin, mais Place Ville Marie s’est imposée aussi, puisque située au cœur du centre-ville. C’était un bonheur de voir les spectateurs au rendez-vous et souriants. »

Le festival a présenté beaucoup de créations cette année, y compris le spectacle d’ouverture Après la nuit qui a été revu et amélioré en cours de représentations. Il n’est pas impossible, d’ailleurs, que cette mise en scène de Benoit Landry soit reprise à la TOHU.

Montréal, capitale des arts du cirque

Encouragé par le ministre libéral Raymond Bachand au début, Montréal complètement cirque a connu un lancement grandiose en 2010. L’évènement a ensuite dû naviguer au rythme des subventions et des intempéries, comme la pandémie. Nadine Marchand estime que la dernière édition a permis au festival de retrouver ses couleurs.

« C’était important au début d’envoyer un signal à l’effet que Montréal est la capitale internationale des arts du cirque. Cette année, on l’a rendu plus complètement cirque que jamais, avec une programmation en salle diversifiée », dit-elle.

Le cirque, c’est plus que des acrobaties. C’est en lien avec le théâtre, la danse, le cabaret, l’humour, la musique. L’important a été de créer en rendez-vous annuel où c’est ici que ça se passe.

Nadine Marchand, directrice de Montréal complètement cirque

Le retour des compagnies internationales était donc un enjeu du 7 au 17 juillet. Même si une troupe italienne a dû renoncer au voyage à la dernière minute en raison de la COVID-19, trois spectacles scandinaves et un français ont été offerts au public. En outre, le Marché international de cirque contemporain (MICC) a attiré des acheteurs de 18 pays cet été.

« Après avoir présenté Timber à Montréal, le Cirque Alphonse a tourné ce spectacle pendant trois ans un peu partout. Ce qui est formidable, c’est que le festival a suscité la formation de compagnies. Les spectacles extérieurs gratuits sont importants aussi. Dès la première année, on avait les Minutes complètement cirque, on s’est installé ensuite à la place Émilie-Gamelin, à la place Pasteur et ailleurs en ville. Toujours avec des créations originales, c’est notre signature. »

La famille cirque

Diriger un festival dans ses premières années, en slalomant entre les grands évènements comme le jazz ou l’humour, relevait du défi, sinon de la folie, mais Nadine Marchand est une joueuse d’équipe avant tout. Elle a créé des partenariats, des alliances, des codiffusions, comme avec Juste pour rire, et au premier chef avec la TOHU, toujours dirigée par Stéphane Lavoie, qui comprend une salle et plusieurs chapiteaux extérieurs.

« Ce qui me motive personnellement, ce sont les rencontres d’équipes de travail que j’ai pu faire en 13 ans. Avec les artistes et le public aussi. Les gens de cirque sont des artistes très créatifs et prêts à improviser bien souvent. On a également fait venir à Montréal des compagnies et des spectacles qui étaient de l’ordre du jamais vu. Un festival, c’est toujours à recommencer, mais c’est très gratifiant. »

Art encore jeune, le cirque doit constamment penser au développement de public. « C’est encore une discipline à faire découvrir à plein de gens. Le financement, les commandites et les ventes ne sont pas gagnés d’avance, mais le potentiel est toujours là, notamment à la télé et sur le web », affirme Mme Marchand.

Et Montréal reste cirque pour encore plusieurs semaines, conclut-elle. Le festival est terminé, mais la programmation se poursuit les fins de semaine avec Destination TOHU jusqu’au 4 septembre. Très couru lors du festival, l’énergique spectacle Barka est à l’affiche avec 17 autres propositions pour les petits et les grands.