Le musicien congolais, établi à Montréal depuis dix ans, pige dans le folklore traditionnel de son pays et n’a qu’une mission : vous faire danser !

« Pour moi, Kizaba, c’est la musique de demain que je veux dévoiler à un grand public à l’international », annonce Lionel Kizaba, Congolais d’origine, installé au Québec depuis 2011.

Mission louable pour le batteur, percussionniste, chanteur et réalisateur, qui était en tournée en Colombie-Britannique au moment où nous l’avons joint et qui sera en spectacle le 22 juillet dans le cadre du festival Nuits d’Afrique.

Je mets ma sauce du Congo dans un concept électronique et pop, au lieu de faire de la musique purement traditionnelle, bien que je puise abondamment dans cette source.

Lionel Kizaba

Un processus créatif qui est à l’image de moult productions de musiques du monde.

« Ensuite, je mixe le résultat avec le soukous congolais, ce qui est, par définition, la rumba congolaise. L’objectif est de rejoindre le plus grand public possible, sans dépayser personne. Je veux que tout le monde soit à l’aise. »

Une affaire de famille

La vie de Kizaba aurait pris un autre tournant s’il n’y avait pas eu la musique… et la famille.

Son oncle, le guitariste jazz François Mantuila, qui a longtemps accompagné des icônes de son pays, Ray Lema et Tabu Ley, l’a pris sous son aile à l’âge de 5 ans.

« Je jouais sur des assiettes », raconte le fils du quartier Matonge, qui deviendra plus tard diplômé en musique jazz de l’Institut national des arts de Kinshasa.

Sa mamie a aussi été fondamentale dans son parcours.

Mes parents sont morts tôt dans ma vie, et j’ai été élevé par ma grand-mère, Julienne Lusingi, qui m’a transmis sa passion pour la percussion. Tout le côté sonore, vocal de ma musique, ça vient d’elle.

Lionel Kizaba

« Tout petit, j’allais cueillir des légumes avec elle, et elle chantait tout le temps », confie l’expatrié qui n’a pas oublié ses aïeux.

C’est aussi sa grand-mère qui lui a appris à aimer le bomda, une percussion « plus subtile que le djembé », qu’il utilise dans son petit arsenal du rythme, au même titre que le jitoumba, un instrument fait à base de bois, « avec de l’eau à l’intérieur avec un petit sachet sur le côté pour la résonance ».

Un clip filmé à Kinshasa

Aujourd’hui, le chanteur-percussionniste utilise ces influences pour créer sa propre musique.

Ses chansons sont nappées de mélodies accrocheuses chantées en lingala, en français, en anglais ou en kikongo.

« Je parle de mes ancêtres, de l’amour, de la vie quotidienne, mais avec du groove. Il y a des gens de mon pays qui ne se retrouvent pas dans cette mixture et qui préfèrent la rumba congolaise ou le soukous. Et si je ne joue pas certains classiques du répertoire traditionnel, il va y avoir de la chicane », dit-il en riant.

Parlant de chicane, l’une de ses chansons les plus récentes, Soso (qui veut dire poulet), parle d’une querelle entre voisins autour d’une volaille à apprêter. Dans le clip, filmé à Kinshasa, un homme âgé est au centre de la dispute. « Ce monsieur-là est une superstar chez nous ! », souligne celui qui lancera son second album, Congolese Music, le 19 novembre prochain sous étiquette DNA dans le cadre de M pour Montréal.

La cadence, produite par le beatmaker Pierre Beliveau, est superposée à des instruments congolais enregistrés à Kinshasa. On y observe une grande tradition du mouvement culturel congolais : la SAPE (Société des ambianceurs et des personnes élégantes). Ou la sapologie, terme couramment utilisé.

« Les gens préfèrent mourir de faim pour être bien habillés. Chez nous, on les appelle les léopards de la sape, comme dans “bien sapé”. On le voit clairement dans le clip de Soso. Les femmes aussi exhibent leurs vêtements chics, il y a des femmes sapeurs aussi. C’est comme une drogue. Assouvir ce besoin d’abord, c’est au top des priorités ! »

Beaucoup de visuel

Un concert de Kizaba, c’est aussi un dispositif visuel à la clé. Masques africains virtuels, dessinés par le chanteur et ensuite projetés en 3D, vidéos réalisées avec des artistes plasticiens congolais.

« J’ai développé un branding avec des vêtements, axé essentiellement sur les masques traditionnels africains. J’ai même rajouté des images de ma grand-mère, à qui je dois ma carrière », évoque-t-il.

Dans le feu de l’action, Kizaba alterne entre sa guitare, ses deux batteries et le micro, le tout avec un charisme fédérateur. « Et je veux surtout exploiter au maximum mes qualités naturelles de mélodiste, ce qui est loin d’être incompatible avec le plaisir ! »

Que de chemin parcouru pour celui qui a fait ses débuts au Québec avec Mario Saint-Amand dans son hommage… à Gerry Boulet !

Au Théâtre Fairmount (5240, av. du Parc) le 22 juillet, à 21 h (première partie : Akpossoul)

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