Fred Fortin est en terrain connu au Club Soda. On a encore en mémoire son incroyable spectacle de la tournée Ultramarr à l’automne 2016, suivi de la supplémentaire du printemps suivant à l’occasion des Francos. Cette fois toutefois, c’est avec sa casquette de leader de Gros Mené qu’il retourne sur les planches de la salle du boulevard Saint-Laurent. Et ça promet.

« On va se planter », nous dit Fortin en rigolant, avant de nous expliquer qu’il a à peine eu le temps de répéter le nouveau spectacle avec ses complices Olivier Langevin (guitare), Robbie Kuster (batterie) et Tonio Morin-Vargas (percussions et claviers).

En fait, le spectacle de ce vendredi aux Francos sera le troisième de la tournée Pax et Bonum, le quatuor ayant commencé son rodage avec deux spectacles à Mont-Louis et à Rimouski au début du mois de juin. « C’est vraiment tripant, et c’est quand même pas mal brut du début à la fin, la foule va voir Robbie avoir chaud comme jamais, nous assure le Vieux Brochet. Mais on n’a pas pu répéter comme on pouvait, la COVID s’en est mêlée, j’ai eu un test positif au printemps. On est donc pas mal sur le radar actuellement, j’ai le CPU pas mal accoté ! »

Surtout que Fortin a décidé de se charger de la basse pour la plupart des chansons du spectacle, un défi passager pour le multi-instrumentiste de Saint-Félicien. « C’est la première fois que je joue les chansons à la basse en chantant, j’avais enregistré l’album en pistes séparées », explique-t-il.

Je me suis dit : “Pourquoi je m’inflige ça ?” Mais défaire des nœuds, c’est quelque chose que j’aime faire, j’ai donc travaillé fort. Et j’aime beaucoup ça, jouer de la basse.

Fred Fortin

Qu’à cela ne tienne, Fortin et sa bande sont de vieux routiers, ils connaissent le tabac. D’autant qu’ils ont joué plusieurs chansons de Gros Mené en formule trio l’an dernier, à l’occasion d’une tournée spontanée qui les a menés un peu partout au Québec.

« C’était comme une bulle à part, parce que la pandémie était encore là, c’était pour manifester notre joie de pouvoir enfin rejouer, nous dit Fortin. On recommençait à jouer, on ne voulait pas refaire ce qu’on avait présenté en duo pour la tournée Microdose. On s’est donc permis de piger dans les deux répertoires, mais au final, je finis toujours par refaire un peu de tounes de Gros Mené. »

« C’est le fun de replonger là-dedans »

Jouer du Gros Mené, justement, est-ce que ça nécessite un autre état d’esprit ? « Quand même oui, d’une certaine façon, l’implication émotive des chansons est différente, nous dit Fortin. Le propos est léger, plus loin de moi encore que dans mes tounes en solo, c’est comme du théâtre psychédélique, je suis d’ailleurs encore en train d’apprivoiser ce qui se passe !

« Mais c’est le fun de replonger là-dedans, juste de jouer de la musique et amener ça où on veut, enchaîne-t-il. Il y a un côté juvénile à faire du rock, à improviser, à jammer. Et on se considère chanceux de faire encore de la musique de grands ados, on tripe encore avec nos pédales et nos amplis, on a du fun à se conter les mêmes jokes depuis 25 ans et à les rire encore. La tournée, on l’appelle d’ailleurs le Radotour ! »

PHOTO ÉDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La dernière tournée de Gros Mené remontait à 2012 à l’occasion de la sortie de l’album Agnus Dei

Composer du Gros Mené nécessite aussi de faire un pas de côté pour Fred Fortin, bien que cela se fasse sans trop d’efforts. « Je fonctionne souvent par batchs de tounes, et quand j’en fais une pour Gros Mené, j’en fais trois ou quatre. Ça fait donc un bout de temps que l’album marinait, explique-t-il. Pour Gros Mené, à la base, je pars avec des beats de drum. Le contenu harmonique va aussi être différent, c’est plus comme du blues. »

Mes chansons solos sont plus élaborées, construites avec des suites d’accords de guitare plus complexes. Mais je sais que ça peut être proche des fois, y a des tounes qui pourraient basculer d’un bord ou de l’autre.

Fred Fortin

Si les chansons de la nébuleuse Fortin ont des choses en commun, c’est aussi en raison des mélodies inclassables du chanteur de 51 ans. « Je vais toujours avoir un beat en tête, mais autant en solo qu’avec Gros Mené, je fais exprès pour avoir des choses qui évoluent au fil de la chanson, nous confie-t-il. Un peu comme les rappeurs le font, je veux mettre du dynamisme et du mouvement dans la mélodie. Je vais slanger de quoi en baragouinant un peu, j’arrive avec quelque chose qui ressemble à une cible de mélodie. Ensuite, la langue française ne m’amène pas nécessairement où je voulais, ça aboutit à autre chose. »

Des évolutions inattendues et un peu chaotiques qui enrichissent son œuvre, comme on a justement des chances d’en voir ce vendredi soir au Club Soda. « À mesure que la tournée avance, il arrive des accidents que l’on décide de s’approprier, reconnaît-il. Ça va arriver vendredi, il va y avoir des accidents, heureux et malheureux. » Heureux, c’est certain, malheureux, on en doute fortement.

Gros Mené est au Club Soda ce vendredi à 20 h dans le cadre des Francos et le 8 juillet au Théâtre de la Vieille Forge, à Petite-Vallée.

Consultez le site du spectacle aux Francos