Des milliers de fans de tous âges se sont donné rendez-vous au Théâtre St-Denis pour admirer les étoiles de Révolution, la populaire émission de TVA. Ils ont eu droit à une suite de numéros aussi exaltants que touchants, malgré des faux pas à l’animation et à la mise en scène.

Commençons par saluer l’impressionnante somme de talents réunis pendant deux heures. Du breakdance au ballet en passant par le hip-hop, le contemporain et un peu de voguing, la variété des styles était belle à voir, même si on s’est ennuyé des interprètes en danse sociale, qui font toujours belle figure à l’émission.

D’entrée de jeu, le b-boy Samuel Cyr a repris son numéro de breakdance contemporain dans lequel il s’exécute en robe de chambre avec une tasse à café sur du Aznavour. Incarnation parfaite de la désinvolture rigoureuse, il possède un charisme et un humour qui le rendent spécialement attachant. Bonne idée du metteur en scène Serge Denoncourt de l’utiliser en ouverture et de lui demander de revenir pour des interventions à mi-chemin entre la danse et le jeu, tel un fil conducteur.

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, LA PRESSE

Yannick et Eliana à la représentation de jeudi

On pourrait énumérer des milliers de superlatifs pour décrire le travail de Yannick et Eliana, alias Tom & Jerry, dont la musicalité, la précision et la fluidité sautent aux yeux. Néanmoins, c’est leur côté rafraîchissant qu’on souhaite honorer.

Quand on voit ces deux-là danser avec des feux d’artifice dans les yeux et un sourire en coin, on craque, tout simplement.

Finaliste de la troisième saison, le duo Willow éblouit par son unicité, sa légèreté et sa capacité à nous transporter dans un univers onirique sans jamais larguer le grand public. Tout cela, en faisant preuve de la même justesse quand on le sort de son monde pour l’inviter dans un numéro de groupe.

Parlons aussi de Janie et de Marcio, grands gagnants de la deuxième saison, qui représentent la grâce, la virtuosité et une facilité à nous couper le souffle, avec ou sans musique, tant l’alliage de leurs corps suffit à nous séduire.

L'absence se fait sentir

Mention spéciale à Marcio, qui s’est joint à Alex Francoeur dans l’un des numéros les plus puissants de l’histoire de Révolution : l’affrontement entre un père et son fils sur la chanson Kid, une critique de la masculinité toxique d’Eddy de Pretto. Si on sentait les portions risquées un tantinet plus placées qu’entre les deux Alex (Francoeur et Carlos), qui dansent ensemble depuis des années, l’interprétation de Marcio en père homophobe et castrant était saisissante. Ils ont merveilleusement mis la table pour un numéro encore plus fort – si c’est chose possible – alors que tous les garçons étaient réunis dans un numéro sur le tube de Stromae Papaoutai, en illustrant différentes facettes de la masculinité.

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, LA PRESSE

Le duo Marcio et Janie, à la représentation de jeudi

Parlant de Francoeur, il était surprenant de le voir si peu. Même si le spectacle est surtout consacré à certains finalistes des saisons deux et trois, ainsi qu’aux premiers gagnants (Team White), c’est dommage de ne pas utiliser son talent davantage.

On se questionne aussi sur la sous-utilisation de Bianca (son partenaire Vincent, présent dans la foule, était-il blessé ?) et l’impression d’un manque de représentation féminine. On aurait bien pris l’énergie survoltée de T.acos ou de Krankyd.

Nous étions néanmoins servis par le géant de souplesse d’émotions Tommy ; la force et l’intensité de Cindy ; le caractère explosif et réjouissant de Break City All Stars ; la puissance et le raffinement de Yoherlandy, ainsi que l’extraordinaire joie de danser de Team White qui, bien que ses numéros pâtissent légèrement de l’absence des jeux de caméra, a récolté certaines des ovations les plus fortes du spectacle.

Le pot maintenant. L’absence de transition entre les numéros est criante. On a presque toujours l’impression d’avoir droit à une séance de zapping sur YouTube. Malgré les efforts de l’équipe de création pour rassembler les chansons, qui s’enchaînent bien, on a souvent le sentiment de passer d’un univers à l’autre de manière brutale et décousue.

Par-dessus tout, l’animation de Jean-Marc Généreux plombe le spectacle à de nombreuses reprises. On l’adore quand il danse avec Bianca. On le sait passionné par sa discipline. Mais plusieurs de ses interventions sonnent faux. Sa voix est criarde. La portion évoquant les moments de jugement de l’émission est interminable, chargée de malaises, pleine de rimes pauvres et de métaphores prévisibles, et donne l’impression qu’il prend le public par la main. On en aurait pris à petites doses. Pour mieux se concentrer sur ce qui fait de ce spectacle un incontournable : les danseurs.

Notre journaliste a assisté à la représentation du 8 mai dernier.