Arrivé en Grande-Bretagne le 5 octobre, l’auteur-compositeur-interprète québécois Alex Henry Foster est l’un des premiers artistes nord-américains à fouler les scènes du Vieux Continent, dont les affiches sont de plus en plus garnies à la faveur des derniers assouplissements concédés par les autorités sanitaires européennes. En première partie du groupe The Pineapple Thief, pilier de la nouvelle scène progressive britannique, le chanteur de Drummondville s’est entretenu avec La Presse entre deux concerts à Varsovie et à Cracovie.

« Être ici nous redonne des émotions qui semblaient un peu latentes, de peur que tout ça nous soit encore arraché, explique le chanteur de son autocar de tournée. On n’avait pas réalisé à quel point on avait perdu nos repères. Le senti face aux chansons, au partage des émotions, ça nous a pris deux shows pour être de nouveau à l’aise dans la “fournaise”. C’est très galvanisant de vivre ça ! »

Après les spectacles de Glasgow et de Manchester, le musicien et son groupe, The Long Shadows, ont mis le cap sur Amsterdam, où Alex Henry Foster avoue avoir été soufflé par l’accueil des gens.

« Ça faisait 18 mois que l’on n’était pas allés sur scène, et l’énergie qui se dégage est tellement particulière », soutient l’artiste qui a sorti en avril dernier un album de chansons enregistrées au Festival de jazz de Montréal en 2019.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Alex Henry Foster

C’est une expérience humaine extraordinaire, des spectateurs pleurent dans la salle, ils nous remercient d’être là. L’émotion est vraiment palpable, et malgré les protocoles stricts, les gens réalisent à quel point le besoin de se retrouver dans l’énergie du rapport à l’autre leur avait manqué.

Alex Henry Foster

Les musiciens des deux groupes sont bien sûr tout à fait conscients que la pandémie n’est pas terminée, et si l’équipe de tournée forme désormais une seule bulle, elle conserve une saine distance avec le public, car l’éclosion d’un unique cas de COVID-19 au sein de leurs rangs sonnera le glas de la tournée. D’ailleurs, Alex Henry Foster a voulu tâter le pouls de ses admirateurs quand est venu le temps d’annoncer qu’il rejoignait The Pineapple Thief en Europe.

« Je me suis même demandé si cela allait me freiner dans la façon dont je communique ma musique, avoue-t-il. Mais j’ai sollicité le feedback des fans, j’ai eu des conversations directes avec eux, ça a donné lieu à de très beaux échanges. Je ne m’attendais pas à ce que ça soit aussi riche comme exercice, respectueux de part et d’autre, ça m’a rassuré. »

Émotions semblables, approches différentes

Alex Henry Foster a beau avoir mis en veilleuse son projet post-punk Your Favorite Ennemies à la faveur d’un son plus expérimental et progressif, il continue sa route avec le même groupe de musiciens. En spectacle, leurs compositions peuvent s’étirer sur près de 20 minutes, une formule qui doit être un peu plus contenue puisqu’ils jouent en lever de rideau. Mais Alex Henry Foster tient à préciser qu’il n’est pas là simplement pour réchauffer la foule – il affirme être en étroite collaboration avec The Pineapple Thief et son leader, Bruce Soord.

PHOTO STÉPHANIE BUJOLD, FOURNIE PAR ALEX HENRY FOSTER

Alex Henry Foster and The Long Shadows jouent en lever de rideau du groupe The Pineapple Thief en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas, en Pologne, en Hongrie, en Allemagne, en Suisse, en Italie, en Belgique et en France.

« Quand il m’a demandé, avec tellement de gentillesse, si on avait envie de faire la tournée avec eux, j’ai vraiment aimé ce que j’ai ressenti, explique le musicien québécois. Retourner sur scène avec eux dans un moment très unique a renforcé nos liens, et il y a certainement le désir commun de poursuivre au-delà. » D’ailleurs, il est de plus en plus probable qu’Alex Henry Foster and The Long Shadows accompagnent The Pineapple Thief en Amérique du Nord au printemps – des spectacles sont prévus en avril à Montréal et Québec, les billets sont déjà en vente.

« C’est d’autant plus génial que nos approches sont très différentes, poursuit l’artiste. On rigole beaucoup parce que nous sommes très “old school” avec tous nos amplis et notre équipement analogue alors que pour eux, c’est complètement moderne, aseptisé, il n’y a rien sur scène, tout est dans leurs oreillettes. Et même s’il s’agit de véritables virtuoses [le batteur Gavin Harrison est une référence en la matière], ils ont la même perception que nous. On parle un langage différent, mais la racine est la même, on s’exprime à travers des fils d’émotion semblables. »

Des dates s’ajoutent

Jusqu’à maintenant, le public européen semble très réceptif à l’offrande musicale d’Alex Henry Foster, si bien que le groupe a déjà ajouté quelques dates en tête d’affiche, notamment à Paris et à Nottingham, sans compter une tournée en bonne et due forme prévue en juin 2022, dans la foulée du lancement d’un nouvel album qui sera enregistré en janvier et février dans l’église achetée par le groupe à Drummondville.

« L’accueil est extraordinaire, c’est au-delà de nos espérances, les réactions sont d’une extrême générosité, affirme Alex Henry Foster. Déjà on voit une accélération dans la vente des billets de notre prochaine tournée européenne. Je suis pas mal certain que l’on va jouer à guichets fermés et c’est très certainement en raison de ce qu’on fait là, en ce moment. Si j’avais des a priori, ils sont tous en train de tomber. »