Les festivals se suivent et la musique manouche rassemble : après le succès de The Lost Singers au Festival de jazz, c'est au tour de Thomas Dutronc, aux FrancoFolies de Montréal, de faire un petit malheur aux couleurs tsiganes, si on en juge par sa très chouette première hier, sous le chapiteau du Pavillon Air Transat. Où il sera jusqu'au 1er août. Yaou.

Thomas Dutronc, c'est bien sûr le fils de Jacques Dutronc et Françoise Hardy. Mais exactement une minute et quart après le début de son spectacle, hier, tout le monde l'avait oublié tant le jeune homme a du bagout, du talent (tant comme auteur-compositeur que comme guitariste), de l'admiration heureuse pour Django Reinhardt et du plaisir. Un plaisir contagieux, communicatif, celui de cinq copains de longue date - Thomas Dutronc (guitare, voix), Pierre Blanchard (violon), Jérôme Ciosi (guitare), Bertrand Papy (guitare, basse, voix) et Stéphane Chandelier (batterie) - réunis à la fois pour faire de la musique et se tirer la pipe mutuellement. S'il fallait résumer leur démarche, disons que le quintette a les doigts sérieux et la tête déconnante. Et employons ici une expression galvaudée qui pourtant colle tout à fait à l'atmosphère du spectacle: c'est convivial rare.

Devant un «décor» qui se résume à un drap tendu entre deux poteaux - qui permet la projection de toutes sortes d'images mais aussi de faire des ombres chinoises absurdes -, les cinq potes jouent principalement les bien bonnes chansons du premier album de Dutronc (Comme un manouche sans guitare), mais aussi du Django Reinhardt, un pot-pourri qui mêle notamment Billie Jean de Michael Jackson, C'est bon pour le moral de la Compagnie Créole et un «moment médiéval» («Plus tard, nous vous ferons un medley, vous verrez que ce n'est pas pareil», a précisé Dutronc pince-sans-rire), du Bach, un très bon solo de batterie, un «medley» autour de la musique des Triplettes de Belleville (Dutronc jouait sur la trame originale), des envolées à la guitare manouche ou au violon, des blagues... tout cela par des gars qui étaient pourtant «décalés horaire», hier.

Parmi les moments forts de la soirée, on retiendra Jeune, je ne savais rien (avec participation très active de la salle), la très belle chanson Solitaires, l'hilarant monologue à la défense du gras qu'est Les frites, bordel (avec un texte remanié pour les spectacles ici, où il est question de Québec libre, de spare ribs et de L'été indien de Joe Dassin) et le violon extraordinaire de Pierre Blanchard pendant Veish A No Drom, un instrumental manouche très inspiré, composé par Dutronc lui-même.

Je n'en dis pas plus, ce serait gâcher le plaisir que de révéler tout ce que cette soirée compte de petites trouvailles dont l'objectif est simple: pendant quasi deux heures non-stop, rendre heureux aussi bien ceux qui donnent le spectacle que ceux qui le reçoivent. Jusqu'à samedi, le bonheur n'est pas dans le pré, il est sous le chapiteau des FrancoFolies.

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Jacques Dutronc, dans le Pavillon Air Transat, angle de Maisonneuve Ouest et de Bleury, 20 h 30, jusqu'au 1er août.