Des plus grands malheurs peuvent naître de belles idées. De bien drôles également. Si les tours du World Trade Center de New York ne s'étaient pas effondrées, François-Xavier Demaison ne serait jamais devenu comédien. On s'explique...

L'humoriste a d'abord embrassé une carrière de fiscaliste qui l'a mené dans une firme d'avocats de la Grosse Pomme. Les attentats du 11 septembre 2001 lui ayant fait réaliser à quel point la vie était fragile, Demaison a senti qu'il était temps de se réaliser complètement. De donner corps à ce qu'il aimait faire lorsqu'il était jeune : monter sur les planches et faire le bouffon.

Pourquoi ne pas faire d'une pierre deux coups? Demaison s'envole raconte, de façon cynique et loufoque, l'histoire d'un fiscaliste dévasté comme bien d'autres par les attentats et qui décide de tout plaquer pour tenter sa chance au théâtre. Il croisera, au fil de sa quête artistique, une vingtaine de personnages tous plus typés les uns des autres. Ah! oui, un castor aussi... tous incarnés par Demaison, sans artifices autre qu'un fichu, un veston et une chaise.

Pourquoi des masques et du maquillage quand on a le visage de l'emploi? En quelques secondes, Demaison imite un joyeux animateur de séminaires, une grand-mère russe, une actrice intense, un rigide acteur allemand, un chauffeur de taxi antillais, un boxeur qui en a vécu des difficiles... Il y a du caoutchouc dans ces joues-là! Et bien du talent naturel pour quelqu'un qui a d'abord fait des études en sciences politiques avant de monter sur scène.

Demaison joue très bien ses personnages dans des sketches gonflés d'humour faisant autant écho à la culture américaine qu'européenne, Il en a de belles à livrer sur les Américains à la fois ultra-patriotiques et croyants («Jésus, il t'aime, même si tu n'es pas Américain!») et sur le surmenage des carriéristes («Quand on a du sommeil en retard, rien ne vaut 15 jours de coma!»).

Demaison s'envole n'a l'air de rien, au départ. Qu'un cri du coeur d'un gars qui a mal digéré ce qu'il a vécu à New York, il y a sept ans. Puis, lentement, l'humoriste prend son envol. Ses personnages s'amènent un à un sur scène pour déconner et faire état de toutes la palette de sentiments humains : la tristesse, la nostalgie, la rancune, la jalousie, le narcissisme, l'égocentrisme, le bonheur...

En les incarnant, Demaison en fait parfois un peu trop. Mais tout semble calculé chez celui qui a présenté en France ce spectacle de 90 minutes (sans entracte) des centaines de fois. Ça valait le coup, pour lui et pour nous, qu'il balance une grosse pomme à la poubelle!

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Demaison s'envole, jusqu'au 12 juillet, à la Maison Théâtre.