Au même titre que le pianiste israélien Yaron Herman, une seconde révélation s'inscrit à notre palmarès mi-festival: le superbe pianiste afro-américain Marc Cary, qui roule sa bosse depuis un bon moment et qui n'avait pas encore été repéré comme soliste ou leader par notre grand festival.

Lundi soir au Gesù, le contrebassiste David Ewell et (particulièrement) le batteur Sameer Gupta ont soutenu ce pianiste moderne de tradition black. Nous étions catapultés dans un univers fort différent de celui de Brad Mehldau et autres pianistes caucasiens bien que Cary se permette une exploration fort intéressante des Gnossiennes d'Erik Satie - dans sa pièce Voyage to the Inside.

Le style percussif et certains choix harmoniques de Marc Cary évoquent un tantinet McCoy Tyner (reprise singulière de A Love Supreme au rappel, sans compter la pièce So Gracefully, de son cru), mais son doigté et sa précision révèlent beaucoup plus de souplesse et de fluidité. Les petites dissonances qui se glissent dans son jeu virtuose (et non moins fervent) sont-elles savamment planifiées? Chose certaine, le résultat s'avère on ne peut plus séduisant. Les compléments free le sont tout autant, jeu de coudes sur les ivoires en prime!

Hilario Duran

La veille, même heure même salle, le pianiste Hilario Duran a fait en sorte que les amateurs de jazz latin soient rassasiés. Sa technique impeccable et son approche foudroyante n'ont rien, absolument rien à voir avec le jazz plus contemporain et plus exploratoire de son compatriote Gonzalo Rubalcaba. Chez le véloce Hilario, la facture pianistique est mise essentiellement au service du patrimoine latin, auquel ce virtuose ajoute quelques touches nord-américaines - vu, notamment, la contribution d'une section rythmique torontoise, constituée du contrebassiste Roberto Occhipinti et du batteur Mark Kelso.

Dianne Reeves

Dans un tout autre registre, Dianne Reeves s'est amenée sur la scène du Théâtre Maisonneuve, lundi soir. Comme il fallait s'y attendre, la puissante dame a asséné à son public de puissantes salves vocales, en plus de lui offrir des improvisations vocales plutôt intéressantes et un répertoire beaucoup trop prévisible. Il faut tout de même dire que le contexte musical de cette soirée était plus favorable que celui de son récent album When You Know, un de ses pires depuis les débuts de sa carrière. Oui c'était moins jazz-variétés que sur le CD, mais on ne peut conclure que la dame nous a menés ailleurs...

À la suite de cette représentation qui sera vite oubliée, on a changé de galaxie: au Monument-National, le Corkestra du pianiste hollandais Cor Fuhler, soit neuf avant-gardistes d'expérience (basse, cymbalum, flûtes, guitare électrique, saxophone, bidouillages variés, etc.), ont offert l'un des rares bons moments de musique actuelle dans ce festival. Ces alternances subtiles entre références connues et envolées free étaient loin d'être inintéressantes... On se serait cru à Victo ou aux Suoni per il Popolo!