Cassandra Wilson n'est pas persuadée que ses deux plus récents albums, Thunderbird (2006) et Loverly (lancé le mois dernier), marquent le début d'un nouveau cycle, mais quoi qu'il en soit, elle accepte volontiers de parler de ce qui a inspiré, même inconsciemment, sa plus récente création.

La musicienne et chanteuse Cassandra Wilson proposera ce soir au Théâtre Maisonneuve du matériel essentiellement tiré de son plus récent album, Loverly, dont elle parle avec enthousiasme, presque pièce par pièce.

Lover Come Back To Me: «Avec Bruce Lundvall (le patron de l'étiquette Blue Note) j'ai longtemps causé du répertoire de cet album. Il m'avait préparé une liste d'une quarantaine de chansons, qu'il pouvait toutes chanter lui-même. Il m'a dit de choisir ce dont je me souvenais depuis l'enfance. Des chansons avec lesquelles j'avais une vraie connexion. Par exemple, ma mère me chantait Lover Come Back To Me quand j'étais toute petite.»

A Day in the Life of a Fool (Manha de Carnaval) est une chanson brésilienne qui fut créée pour la trame sonore du film Orfeu Negro (d'où le titre Black Orpheus sur l'album). «Dans les années 80, on l'a beaucoup entendue lors des jam sessions auxquelles je participais. J'ai toujours été saisie par les mélodies et les harmonies de cette grande chanson.»

Wouldn't It Be Loverly: «C'était une de mes chansons préférées du film My Fair Lady. D'ailleurs, on trouve dans mon nouvel album d'autres standards tirés de musiques de films, comme Sleepin' Bee tirée de la comédie musicale House of Flowers

On lui fait remarquer que ça devient de plus en plus fort en groove au fur et à mesure qu'on avance dans l'écoute de Loverly. Les standards St-James Infirmary et Caravan, par exemple, sont marqués par des rythmes très africains: «Cela est attribuable au batteur Herlin Riley ainsi qu'au percussionniste Lekan Babalola. Ils ont créé ce cadre extraordinaire dans lequel nous avons pu nous glisser.» 'Til There Was You: «La cellule rythmique y est très moderne. Le bassiste Lonnie Plaxico s'y est inspiré du Chicago stepping, une danse des années 90 qui s'inspirait d'autres danses afro-américaines modernes.»

The Very Thought of You: «Ce fut dur pour moi de la chanter, difficile à rendre. Au plan émotif, j'étais très fatiguée lorsqu'on l'a enregistrée. J'étais aussi triste car c'était la fin du processus de création, ce qui engendrait chez moi une sorte de dépression post-partum.»

Issue d'une avant-garde de musiciens new-yorkais au cours des années 80, Cassandra Wilson a explosé sur la scène internationale lorsque l'album Blue Light'Til Dawn, un tournant dans la façon de jazzifier le répertoire de la pop fut lancé en 1993.

«J'étais assez mature pour absorber le succès», estime-t-elle 15 ans plus tard, et près d'une décennie après avoir été lauréate du prix Miles-Davis (en 1999). Malgré cette gloire et cette reconnaissance, Cassandra Wilson dit ne pas avoir le recul nécessaire pour évaluer sa propre contribution au jazz.

«Tout ce que je peux dire, c'est que je me sens très bien. Il est impossible pour moi de juger mais j'ai énormément de plaisir de travailler avec des musiciens aussi formidables, peu de chanteuses peuvent en dire autant. Voyez ce que je veux dire? Alors je tends à conserver un noyau de création, comme le guitariste Marvin Sewell et le contrebassiste Reginald Veal.»

Cassandra Wilson se produit ce soir, 18h, au Théâtre Maisonneuve. La plupart des musiciens qui ont enregistré Loverly seront sur scène.