Le Ballet nacional de Cuba revient à Montréal présenter Don Quixote de Léon Minkus. La Presse a rencontré la prima ballerina assoluta Alicia Alonso, fondatrice et directrice de la compagnie, et trois de ses danseurs qui partagent sa passion de la danse. À l'âge de 95 ans, Alicia Alonso accompagne encore sa troupe. En tant que danseur professionnel, «on veut rencontrer les gens partout dans le monde. C'est la récompense du fait d'être un danseur. C'est ma vie et j'en suis heureuse, dit-elle. J'ai parfois l'impression de vivre dans un avion, mais la danse, c'est ma vie».

Viengsay Valdes

Née à La Havane

39 ans

Rôle favori: Odette/Odile dans Le lac des cygnes

Si elle n'était pas danseuse, elle serait: pianiste

«La danse, c'est une vocation pour moi. Ce n'est pas une profession plus difficile qu'une autre. Quand on devient première ballerine et qu'on domine tout le répertoire classique, on garde toujours en nous, malgré tout, la version cubaine d'Alicia Alonso, qui est très forte. Cela se voit sur scène, je crois. Nous avons une manière extravertie de danser avec les expressions du visage et du corps. On amène notre corps à ses limites. Cela exige beaucoup de préparation physique. Avec le temps, l'expérience a fait en sorte que je sais quand respirer, me reposer, me réchauffer. À Cuba, il n'y a pas d'anorexie chez les danseurs, mais nous ne recevons pas le même genre de soutien que dans le sport. Nous n'avons pas de physiothérapeute, de massothérapeute ou de nutritionniste au sein de l'équipe. Quant à l'ouverture récente avec les États-Unis, ça ne changera pas grand-chose. Nous n'avons jamais cessé d'avoir des relations culturelles avec eux.»

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

«La danse, c'est une vocation pour moi», confie Viengsay Valdes.

Anette Delgado

Née à Isla de la Juventud 

37 ans 

Rôle favori: Giselle dans Giselle

Si elle n'était pas danseuse, elle serait: avocate

«À Cuba, la danse est une vraie profession. On commence dès l'âge de neuf ans et la formation dure huit ans. Donc, j'ai toujours dansé. C'est un travail complexe, difficile, qui demande beaucoup de sacrifices, mais danser est une passion que j'ai depuis que je suis toute petite. Après Montréal, nous avons des représentations à La Havane, puis nous allons à Porto Rico présenter Giselle. Nous n'arrêtons pas longtemps de travailler avec la compagnie. Cela exige beaucoup de nous, physiquement et mentalement. Il reste du temps pour visiter les villes où l'on va. De toute façon, le but, c'est d'être heureux sur scène, de le vivre pleinement. C'est ça qui nous fait vibrer. Chaque danseur est un monde en soi. Certains se retirent tôt parce que leur corps ne le leur permet pas. L'avenir est donc incertain dans cette profession. Moi, j'ai eu la chance de travailler avec des enfants. Je crois que j'enseignerai plus tard, mais la scène me passionne toujours pour le moment.»

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Anette Delgado danse depuis qu’elle a 9 ans.

Dani Hernandez

Né à Villa Clara

27 ans

Rôle favori: Escamillo dans Carmen

S'il n'était pas danseur, il serait: militaire

«La programmation du Ballet nacional dure presque toute l'année. Nous avons peu de temps pour penser à nous. Si on veut une famille, il faut y réfléchir à l'avance afin de trouver le moment opportun. Je peux passer huit, neuf mois sans voir ma famille qui vit à 300 km de La Havane. Je m'ennuie d'eux, mais maintenant, j'ai Anette [il est marié à Anette Delgado] et mes amis dans le Ballet. On s'entraide. Mais c'est aussi une profession qui comprend de la compétition. Personne ne se veut du mal, mais il faut se battre pour se faire remarquer. Je crois que les sacrifices valent le coup lorsqu'on reçoit les applaudissements du public. Je veux continuer à danser le plus longtemps possible. Pour ça, il faut faire de nombreuses heures d'exercice physique. Je me suis blessé au tibia et j'ai dû m'absenter pendant sept mois, qui ont été les plus longs de ma vie. Je me sentais très mal de voir mes collègues continuer à danser alors que moi, j'étais au repos total.»

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

«Personne ne se veut du mal, mais il faut se battre pour se faire remarquer. Je crois que les sacrifices valent le coup lorsqu'on reçoit les applaudissements du public», partage Dani Hernandez.