Près d'un demi-siècle après avoir foulé le sol montréalais lors de l'Expo universelle, le Ballet de l'Opéra de Paris est de retour à Montréal avec Paquita. Un événement en soi, ponctué de costumes et décors grandioses et porté par des danseurs à la technique irréprochable. On n'en attendait pas moins de cette grande institution française.

Le fil narratif de Paquita, opéra créé en 1846 à l'Opéra de Paris et sorti des oubliettes par Pierre Lacotte, qui l'a reconstitué en 2011 pour le Ballet, ne s'embarrasse pas de subtilités. Se déroulant au coeur d'une Espagne occupée par les troupes napoléoniennes, il raconte l'histoire d'un amour impossible entre un officier français, Lucien d'Hervilly (Josua Hoffalt), et une jeune gitane, Paquita (Amandine Albisson lors du soir de première, tout simplement sublime et d'une grâce infinie).

Amour qui, par un heureux concours de circonstances, sera rendu légitime lorsque la jeune fille, après avoir sauvé l'officier d'une tentative d'assassinat, découvrira ses nobles origines grâce à un pendentif lui appartenant, elle qui avait été enlevée par des gitans durant son enfance. Elle pourra ainsi s'unir à son bel officier lors d'un grand bal fastueux.

Se déroulant en deux actes et trois tableaux, Paquita est un ballet pantomime, dont l'histoire et ses rebondissements sont racontés par le jeu appuyé des danseurs, qui nous font comprendre, à force de gestes et d'expressions faciales, l'essentiel de ce récit au romantisme suranné joliment cousu de fil blanc.

Éblouissante technique

Qu'à cela ne tienne, l'intérêt de Paquita ne réside pas dans sa trame narrative ni dans ce pantomime quelque peu archaïque. Le tout sert plutôt de prétexte à une enfilade de tableaux dansés permettant de faire l'étalage de la technique irréprochable des danseurs étoiles, mais aussi des demi-solistes et de l'imposant corps de ballet (83 interprètes au total foulent les planches de la production). Tous sont d'une précision hallucinante, sur pointes (pour ces dames) ou en collants (pour ces messieurs).

Porté par des jeux de jambes complexes, rapides, éreintants et de toute évidence d'une grande difficulté technique, le ballet se décline en une succession de battements, coupés, tendus, tours, portés, fouettés, pirouettes, chassés, grands jetés, piqués, pas de deux ou de trois... Jusqu'à en donner le tournis au spectateur, ébloui par autant de prouesses et de contrôle.

Prenant des airs de grande fresque dansée - appuyée par la musique de l'Orchestre des Grands Ballets canadiens -, le ballet convie sur scène des dizaines d'interprètes à la fois. Les décors sont plus grands que nature, créés avec un souci de réalisme, que ce soit la reproduction d'une campagne espagnole ou d'une fastueuse salle de bal lors du tableau final, grandiloquent.

Quant aux costumes (il y en a plus de 350 !), ils reproduisent fidèlement l'époque - des gitans aux officiers français, en passant par les danseuses espagnoles. Et que dire de ces somptueux tutus ornés de pierres scintillantes portés par les demi-solistes durant le grand pas qui conclut la pièce ? Un vrai régal pour les yeux.

> À la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts samedi soir et dimanche