Le flamenco sera en vedette sur les scènes montréalaises en ce début d'année avec deux spectacles qui prendront l'affiche à partir du 16 janvier: Medianoche et HomoBLABLAtus, deux créations bien différentes qui vous feront découvrir les multiples facettes de cet art ancestral andalou.

Myriam Allard et son compagnon Hedi Graja (avec qui elle a fondé la compagnie La Otra Orilla en 2005) présenteront à la Cinquième Salle HomoBLABLAtus, une pièce de flamenco contemporain composée de neuf tableaux pour deux danseuses et trois musiciens-comédiens qui creuse les rapports entre le vide et le trop-plein dans un monde de surabondance de signes, par l'entremise des médias et des réseaux sociaux.

«Hedi est chanteur, mais aussi metteur en scène de théâtre, alors on a une utilisation de l'espace bien différente du flamenco traditionnel. On a cassé le côté statique des musiciens en arrière-scène et des danseurs en demi-cercle pour HomoBLABLAtus, avec un élément de scénographie: les musiciens sont toujours en mouvement et on a même de la vidéo. On est loin de la tradition et le poids de l'argument qu'il y a derrière rend le tout très contemporain», explique Myriam Allard.

En ce qui concerne la musique, la danseuse et chorégraphe est également allée au-delà des traditions. On trouve diverses influences musicales, avec la présence de deux musiciens (Hedi à la voix et un percussionniste), de la musique enregistrée et même un duo virtuel avec le danseur Antonio Arrebola. «C'est assez éclaté et drôle, ce sont des côtés du flamenco qu'on est moins habitués de voir, car c'est habituellement plus centré vers le drame ou la fougue», explique Myriam Allard.

«J'ai fait les tablao pendant six ans en Espagne et je me sentais toujours comme si je n'étais pas moi avec cette robe à pois et cette fleur dans les cheveux. Nous ne sommes pas des artistes espagnols, on aime le cinéma et le théâtre, alors on s'est réapproprié le flamenco», ajoute-t-elle.

Tradition

Le chorégraphe Martin Santangelo et sa femme, la danseuse étoile Soledad Barrio, se réclament de la branche la plus traditionnelle du flamenco. Ils font escale à Montréal au Cabaret du Mile End avec leur troupe Noche Flamenca pour y présenter Medianoche avec une seule règle: le chanteur avant tout.

«Le flamenco est malheureusement souvent réduit à la danse. Depuis les 15 dernières années, les Espagnols ont commencé à avoir peur de ne pas être assez modernes. C'est correct, mais ça ne devrait plus s'appeler du flamenco. Le flamenco, c'est le chanteur. Tout le spectacle dépend de la manière dont il se sent: le guitariste va s'ajuster en conséquence, tout comme les danseurs», explique Martin Santangelo.

Le directeur artistique respecte en effet scrupuleusement les préceptes du flamenco par souci d'authenticité. «En flamenco, toutes les chansons ont été créées il y 250 ans. Les palos sont des types de chants traditionnels et ils ont tous une structure rythmique et une tonalité définie. Leur message ne peut être changé, comme Soledad par exemple, sur la solitude et la perte: il peut y avoir plein de paroles différentes, mais elles seront toujours autour de cette thématique. Si on change ça, c'est un sacrilège!», s'exclame-t-il.

Si, dans certains autres styles de danse, la musique accompagne le danseur, quand il est question de flamenco, c'est celui-ci qui interprète la musique.

Au programme de Medianoche, Soledad Barrio sera accompagnée sur scène par deux chanteurs, deux guitaristes et deux danseuses, mais aussi un danseur invité, Antonio Jiménez. «Il n'a jamais suivi de cours! Il a trouvé sa propre manière d'accompagner la guitare et la voix. Ça fait de lui un danseur très humain», précise le directeur artistique de la compagnie.

«Medianoche parle de ce sentiment qui s'installe bien après minuit, à l'heure où certaines choses mystérieuses prennent vie. Il y a un numéro musical qui porte aussi ce nom dans le spectacle que j'ai composé avec Salva de Maria», ajoute-t-il.

Toujours fidèle à la tradition flamenco, le spectacle propose des numéros qui parlent d'amour comme La mansa lluvia (duo entre Soledad Barrio et Antonio Jiménez), mais aussi Encuentro, solo d'Antonio Jiménez dans lequel il dit se trouver lui-même. Avec Quebradas, Soledad Barrio rend quant à elle hommage à sa mère et aux femmes qui ont vécu pendant la guerre civile sous Franco «alors que les hommes étaient absolument abominables avec elles», précise Martin Santangelo, qui pense ajouter un numéro de son adaptation de la pièce Antigone de Sophocle, version flamenco, qu'il est en train de monter pour juin prochain à New York.

Medianoche, Cabaret du Mile End, les 16 et 17 janvier

HomoBLABLAtus, Cinquième Salle, du 16 au 26 janvier