Jusqu'à ce soir, à la salle Maisonneuve, le chorégraphe et danseur montréalais José Navas présente Diptych, sa dernière création de groupe. On laisse ici de côté le Navas théâtral et baroque pour renouer avec celui qui nous offre une danse purement abstraite.

Dans le prologue, intitulé Prélude à Diptych, le chorégraphe rend un bel hommage à ses interprètes. Puis, il annonce ses couleurs: «Je veux créer de la danse qui danse!», lance Navas, en voix off, tout en exécutant un solo net et intense comme lui seul sait le faire.

Diptych est construite en deux sections. La première partie, dansée sur des extraits de Clavier bien tempéré de Jean-Sébastien Bach, se déploie en angles, les mouvements bien détachés les uns des autres. On y reconnaît la gestuelle linéaire, précise et tout en bras et en jambes de Navas, en parfait contrepoint au phrasé hachuré du piano.

On détecte aussi un amusant clin d'oeil à Balanchine, dans le rapport à la musique, les justaucorps, les unissons et les variations qui s'entrecroisent et se répondent et, surtout, dans les éclairages de Marc Parent, qui joue avec des couleurs unies en fond de scène.

Puis, tout à coup, Diptych prend une autre allure. Pour un instant, cette seconde partie laisse enfin poindre une touche de surréalisme, si propre à Navas, et son penchant pour le travestissement, alors qu'il glisse ses danseurs dans les mêmes nuisettes que ses danseuses. Du piano, on passe aux Suites pour violoncelle de Bach. Le nouvel instrument appelle la rondeur, la sensualité et la liberté. La gestuelle et le phrasé hachurés demeurent presque inchangés, mais maintenant, les membres se dénouent et les colonnes vertébrales s'assouplissent.

Avec cette oeuvre pour grand plateau, Navas flirte, en connaissance de cause, avec le lyrisme et se positionne, plus que jamais, dans la lignée des chorégraphes néoclassiques... au risque d'y perdre son unicité. Dans tout ce foisonnement, il manque à Diptych ce supplément d'âme, cette intensité incisive et cette épure qui font la renommée de Navas.

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Diptych de José Navas/Compagnie Flak. Ce soir, à la salle Maisonneuve de la Place des Arts.