Dans la vie, comme sur scène, se cachent parfois de petits moments parfaits. Pour Jean-Michel Anctil, venu présenter jeudi soir au Théâtre St-Denis Je4n-Michel, son quatrième spectacle en carrière, ces instants de grâce semblent se retrouver un peu partout dans son quotidien et il les énumère au cours du premier quart d'heure de son spectacle. Mais il nous faudra attendre la fin de la soirée pour pouvoir à notre tour en savourer réellement un. Et c'est seulement quand Jean-Michel Anctil renoue avec ses personnages de Priscilla et de Râteau que la magie opère finalement.

Après 20 ans de carrière, Jean-Michel Anctil a décidé pour son quatrième spectacle de faire un changement de cap en délaissant ses personnages pour briller seul sur scène. Un choix motivé par son désir de ne pas s'enliser dans de vieilles habitudes, de changer et d'adopter le style chouchou des humoristes du deuxième millénaire : le stand-up.

Jean-Michel Anctil a sans contredit un talent de conteur : le récit de son escale catastrophe à San Francisco, de son premier baiser ou de l'aventure qui a mené à sa cicatrice au-dessus de l'oeil le prouve bien. Mais on le sent nettement moins à l'aise dans de plus courtes anecdotes ou dans le format « une ligne, un punch » propre au stand-up.

« 400 $ pour quatre coussins griffés ? Les coussins sont à 12 $ chez Walmart, j'ai un chat, il va te les griffer ! »

- Extrait d'un numéro où l'humoriste critique les designers d'intérieur

À vouloir trop changer pour plaire, Jean-Michel Anctil semble s'être dénaturé. Ironique pour un humoriste qui aborde la question du regard des autres avec un sourire en coin dans son spectacle. Mais dès qu'il revient à ses racines et imite un pigeon ou son oncle soûl sur scène, Jean-Michel Anctil tape dans le mille.

Ses numéros sur le Défi Pierre Lavoie, son père dépassé par la technologie ou encore sa tentative de reprendre contact avec son adolescente font sourire mais ne tirent pas leur épingle du jeu. On attendait plus d'originalité de la part de Jean-Michel Anctil que des blagues sur les touristes qui font pipi dans la mer.

ENFIN, LES PERSONNAGES...

C'est après avoir dressé la longue liste de ses défauts que l'humoriste dépoussière rapidement son personnage de Priscilla, toujours aussi drôle, avant de ressusciter à notre grand plaisir celui de Râteau, plus réussi que jamais en abordant le thème de la différence. « T'es mieux d'être un différent d'ici qu'un différent d'ailleurs parce que ça fait peur », lance-t-il sur scène. À peine son dentier chaussé, l'humoriste brille alors plus que lors de toute l'heure et demie qui a précédé ce dernier numéro.

Jean-Michel Anctil est l'un des derniers humoristes à maîtriser l'art de la personnification, aujourd'hui si délaissé et parfois dénigré par les jeunes humoristes. Au risque de jouer les saboteurs de moment parfait, on regrette fortement dans Je4n-Michel que l'humoriste ait jeté les personnages avec l'eau du bain. Il y a de ces recettes que l'on ne devrait jamais trop changer, de grands classiques.

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Je4n-Michel

Jean-Michel Anctil

Samedi soir au Théâtre St-Denis et en tournée au Québec jusqu'en 2018

2 étoiles et demie