Le raccourci facile pour présenter Nora Ephron, journaliste et scénariste américaine morte en juin 2012, est de dire qu'elle était une sorte de Woody Allen au féminin. Elle posait sur les relations entre les hommes et les femmes un regard pénétrant, mais empreint d'un humour à la fois vif et spirituel, comme le savent ceux qui l'ont lue ou ceux qui ont vu When Harry Met Sally.

Or, rien de tout cela ne ressort de L'amour, la mort et le prêt-à-porter, pièce que Nora Ephron a cosignée avec sa soeur Delia, à l'affiche au Rideau Vert. La «tradaptation» québécoise signée Danièle Lorain et mise en scène par Denise Filiatrault vide cet univers de sa classe et de son humour pince-sans-rire pour en faire une comédie à l'humour appuyé. Exit Madison Avenue, matante va «mégasiner» sur la Plaza St-Hubert!

L'idée à la base de la pièce est pourtant intéressante: évoquer les étapes de la vie d'une femme à travers sa garde-robe, de la belle robe à laquelle elle rêvait enfant à celles qu'elle a possédées pour séduire, se marier, etc. Sans oublier les chaussures, puisque bien des femmes ont ce qu'on pourrait appeler des «émotions de soulier». Et souvent mal aux pieds...

Tout ça peut sembler bien futile. Ce l'est, très souvent. Ce qui est pourtant révélateur de notre culture, du regard que les femmes posent sur elles-mêmes (et les autres) ou encore de la façon dont se transmettent cette quête de perfection et cet amour du beau linge. Mais c'est aussi une façon d'aborder des thèmes plus durs tels le viol ou le cancer du sein.

Cette part de drame, qui donne sa profondeur à la pièce, n'est cependant aucunement mise en valeur dans cette production à laquelle participent Pierrette Robitaille, Valérie Blais, Geneviève Schmidt, Adèle Reinhardt et Tammy Verge. La direction d'actrices ne vise qu'un seul objectif: faire rire, coûte que coûte. Comme au théâtre d'été.

Ainsi, le jeu est une affaire de répliques appuyées, d'autodérision accentuée et de regards de biais lancés au public l'air de dire «la pognes-tu?». Pierrette Robitaille s'en donne à coeur joie dans cette absence de mesure, d'ailleurs encore mal contrôlée le soir de la première. La salle a ri, il faut bien le dire. Beaucoup par moments.

Ce même public aurait-il moins ri si la pièce avait gardé son caractère new-yorkais? Si la courbe dramatique avait été plus nuancée? Si l'humour avait été moins caricatural? Parions qu'il aurait ri autant. D'un rire différent, qui délasse, mais donne la permission d'avoir des arrière-pensées.

Jusqu'au 1er juin.