Ils se laissent tomber sur le dos, s'élancent contre un panneau de plexiglas avant de s'écraser au sol, s'empilent les uns sur les autres, plongent à plus de 20 pieds dans les airs pour atterrir sur le ventre, multiplient les acrobaties sur une scène en rotation ou encore esquivent une poutre métallique qui pourrait bien les défigurer.

Pendant près d'une heure trente, ils tombent. Ce sont des chutes planifiées, bien sûr, mais des chutes tout de même. Sans poésie, sans trame narrative non plus. De la performance brute.

À la fois gymnastes, danseurs, acrobates et cascadeurs, ce sont des adeptes d'action extrême. Une troupe dirigée par la New-Yorkaise Elizabeth Streb qui enchaîne ces numéros dangereux à un rythme endiablé, sous les encouragements d'un animateur de foule qui nous demande d'être bruyants: «Nous n'aimons pas les shows tranquilles», hurle-t-il. Ça a le mérite d'être clair...

En vérité, on se croirait par moments dans une arène de lutte extrême de la WWF (World Wrestling Federation), avec en sus des effets sonores où le bruit des chutes de corps sont amplifiés! Vous vous souvenez de Rowdy Roddy Piper? Macho Man Randy Savage? Ultimate Warrior? Stone Cold? Même combat. Même subtilité aussi, sauf qu'ici, il faut bien l'admettre, le danger est réel.

Les thèmes dictés par l'animateur donnent le ton: Hit, Fall, Escape, Tumult, Rocket, Ninja Turtle. Chaque fois les interprètes s'exécutent devant des spectateurs incrédules.

Entre chacun de ces «charmants» tableaux, celle qu'on surnomme la «Evel Knievel de la danse» explique sa démarche dans des capsules vidéo projetées à l'arrière-scène. Elizabeth Streb, dont la maxime est: «Si c'est trop sûr, ce n'est pas de l'action», vante les mérites de ceux qu'elle surnomme les «héros de l'action».

Ces segments vidéo sont très intéressants et donnent un certain sens à ce déploiement de forces tous azimuts dont on finit par se lasser. Elle cite Evel Knievel, le fil-de-fériste Philippe Petit ou encore les frères Wright pour faire l'apologie de la prise de risque. Elle admet même candidement s'intéresser au crash des corps, beaucoup plus qu'à leur envol.

Deuxième partie

Elizabeth Streb, qui est toujours à la recherche d'appareils défiant la gravité, fait partager en deuxième partie le fruit de ses recherches.

Que ce soit avec cette poutre à l'extrémité de laquelle virevolte à une vitesse folle l'une des interprètes ou encore avec le spectaculaire numéro de roue de hamster - aussi appelée roue de la mort et vue dans les spectacles du Cirque du Soleil - l'objectif demeure le même: s'approcher le plus possible de ce qui peut constituer un danger pour l'humain.

C'est aussi en deuxième partie qu'on assiste aux plus belles performances dansées du groupe, d'abord avec une chorégraphie aérienne sur fond de projections d'immeubles, puis lorsque le mur du fond s'abaisse jusqu'à se transformer en scène inclinée. Ces segments nous rappellent que nous sommes bel et bien en présence de danseurs.

Forces, qui aurait pu être programmé au festival Montréal Complètement cirque, a le mérite de pousser l'audace et la prise de risque sur scène au-delà de ce que vous pourriez imaginer.

Aussi épatantes soient-elles, ces performances extrêmes ont quelque chose de rébarbatif et d'insensé. De bruyant aussi. Bien qu'elles soient principalement destinées aux amateurs de sensations fortes, qui nourrissent le feu de ces artistes intenses, on capte tout de même le désir profond exprimé par sa conceptrice en ces termes: ne pas rester passif et regarder la vie passer. Son invitation à faire le saut a été plutôt bien reçue.

Jusqu'au 26 juillet au Monument-National.