Quelques semaines à peine après avoir lancé Séquence 8 à Montréal Complètement cirque, Les 7 doigts de la main en remettent, jeudi soir, à Mexico avec la création d'A Muse, spectacle familial qui sera présenté pendant cinq étés à l'Auditorio nacional.

Ça fait près de deux ans que la cofondatrice des 7 doigts, Gypsy Snider, planche sur ce spectacle de cirque interactif, qui s'adresse aux enfants et à leurs familles. Un spectacle conçu à la demande de l'Auditorio nacional de Mexico, qui fête ses 60 ans cette année, et qui souhaitait rajeunir son public. C'est d'ailleurs une première incursion des 7 doigts dans le monde de l'enfance. Avec 23 interprètes sur scène, c'est leur plus imposant spectacle. Leur plus coûteux aussi, la production d'A Muse s'élevant à 3,3 millions.

«Dès le départ, notre objectif était de concevoir un spectacle qui parle aux enfants. Mais aussi à l'enfant en chacun de nous. C'est un spectacle qui recrée exactement l'esprit du cirque, détaille Gypsy Snider, dans une entrevue téléphonique de Monterrey, où le spectacle est présenté en rodage depuis dimanche. Mais on a travaillé fort pour que même dans cette immense salle (configurée pour accueillir 5000 personnes), ce soit un spectacle intimiste et une expérience humaine, deux qualités qui sont la marque des 7 doigts.»

Celle qui a cosigné la mise en scène de Loft et de Traces a notamment trouvé son inspiration dans un exposé de Ken Robinson (sur TED Talk), à propos de la créativité. «L'éducation part du principe que lorsqu'on pose une question à un enfant, il y a une bonne et une mauvaise réponses, commence par dire Gypsy Snider. Il reste qu'à bon nombre de questions, il peut y avoir des réponses à l'infini. C'est ça, la créativité. Dans A Muse, je me suis demandé comment encourager cette créativité.»

L'autre source d'inspiration de Gypsy Snider: l'émission Kids Say The Darndest Things qu'animait Bill Cosby. «C'était une émission que je regardais souvent À San Francisco lorsqu'elle était animée par Art Linkletter. Mes parents rigolaient autant que moi. On interrogeait les enfants sur des questions liées au monde des adultes. On leur demandait par exemple, ce qu'ils pensaient de l'amour. Et les réponses étaient souvent plus intelligentes et plus honnêtes que ce qu'un adulte aurait répondu.»

C'est donc à partir de ses réflexions sur la créativité et avec l'idée de laisser s'exprimer de jeunes enfants sur les grands thèmes de la vie, qu'a été construit A Muse.

Concrètement, un maître de cérémonie (le Québécois d'origine espagnole Roberto Sierra) fait des entrevues avec des enfants, pendant que le public rentre dans la salle et même pendant le spectacle. Chaque soir, on les sonde sur différents thèmes: l'amour, la peur, le jeu, la vieillesse, la dispute, le talent, l'aventure. Un mime invite également les enfants à faire un tour de chant ou de danse avant le début du spectacle. Toutes les vidéos de ces entrevues et de ces performances sont intégrées au spectacle, et projetées sur la scène.

Les numéros de cirque correspondent à ces thèmes. Par exemple, le numéro de main à main a été conçu sur le thème du premier amour. «En voyant le numéro, avec les vidéos, les enfants ont un peu l'impression d'avoir participé à sa création, explique la metteure en scène. Cette interaction avec le public - des photographies des spectateurs sont aussi intégrées à des animations projetées sur scène - crée un rapport d'intimité avec le spectateur.»

Les 23 interprètes, parmi lesquels se trouve la fille de 10 ans de Gypsy Snider et Patrick Léonard, sont des finissants des écoles de cirque de Montréal, Québec et Rotterdam. Quelques-uns des artistes de PSY feront partie de cette première distribution. Les disciplines de cirque, elles, sont variées: main à main, planche sautoir, roue allemande, mât chinois, cerceau, jonglerie. Il y a aussi un duo sur trapèze ballant et un numéro de trampomur exécuté par six artistes du collectif de Québec Cat Wall.

Le décor est assez minimaliste avec ses blocs disposés en piles sur la scène. Mais les projections vidéo, conçues par la firme Geodezik, créent des décors numériques au coeur de la scénographie. Les costumes, flamboyants, ont été inspirés par les mangas japonais, une première pour les 7 doigts. «Pour un public d'enfants, on trouvait que c'était approprié de voir nos artistes de cirque costumés», dit Gypsy Snider.

Chaque année, les numéros vont changer. «Rien ne nous empêche de faire un numéro de main à main pour aborder le thème de la rage, précise Gypsy Snider. C'est la beauté du concept. On laisse toujours s'exprimer les enfants, mais nous pouvons changer le spectacle en abordant de nouveaux thèmes avec eux. Et en créant de nouveaux numéros. Pour ne pas refaire exactement le même spectacle pendant cinq ans!»

À partir du 26 juillet à l'Auditorio nacional de Mexico.