Présenté ce soir, en première mondiale, à New York, le documentaire Wagner's Dream lève le voile sur la production de l'opéra Ring par Robert Lepage au Met. La réalisatrice Susan Froemke revient sur cette incroyable odyssée.

Quand Susan Froemke a pris la décision de réaliser un documentaire sur la nouvelle production de Der Ring des Nibelungen par Robert Lepage au Met, elle savait qu'elle tenait un bon filon. «Très peu de compagnies d'opéra peuvent monter une nouvelle version du Ring. Il s'agit d'un défi colossal», explique-t-elle alors que son film est présenté au Festival du film de Tribeca.

«Je savais que toute nouvelle version du Ring susciterait la controverse», précise-t-elle.

Ce que Susan Froemke ne savait pas, par contre, c'est à quel point son sujet allait se révéler fascinant, controversé et plein de rebondissements. Les mille et un déboires du projet ont transformé son documentaire en véritable drame aux proportions épiques.

«Le projet s'est révélé beaucoup plus riche que ce que j'anticipais, avoue-t-elle. Ce fut une aventure absolument magnifique. Robert Lepage et son équipe sont des sujets fascinants», poursuit-elle.

Au centre de son documentaire, on retrouve le «personnage» le plus controversé du projet: l'impressionnant décor de plus de 40 tonnes imaginé par Lepage et surnommé «la Machine» par les employés du Met. Capricieuses et gigantesques, les 24 pales mobiles du décor ont en effet créé une pléthore de problèmes qui n'ont cessé de défrayer la chronique au cours des dernières années. Le Met a même dû consolider sa salle afin d'accueillir l'immense structure rotative.

Wagner's Dream retrace pas à pas le développement de l'ambitieux décor, conçu afin de présenter tous les volets du Ring et les idées scénographiques délirantes de Wagner.

En août 2008, la réalisatrice assiste notamment à un test sur une mouture embryonnaire de «la Machine», à Québec. Loin d'être un succès, ce test révèle une structure difficilement domptable et qui produit de terribles bruits de craquement. «Beaucoup, beaucoup de choses restent à régler», reconnaît alors Bernard Gilbert, collaborateur de Lepage.

400 heures de film

Ayant un accès presque illimité à la production, aux chanteurs et aux coulisses du Met, Susan Froemke filme tout. En quatre ans, elle et son équipe ont amassé plus de 400 heures de films! Des pépins techniques, des acteurs qui chutent, des chanteuses qui frémissent à l'idée d'être suspendues dans les airs: le film montre ensuite dans les détails comment la pression augmente graduellement au cours des semaines menant à la première de l'opéra en septembre 2010.

«À l'époque, nous nous demandions vraiment si Lepage et son équipe allaient être prêts. Je dois avouer qu'on n'en était pas sûr, on ne savait vraiment pas s'ils allaient y arriver», se souvient la réalisatrice, qui cosigne le documentaire avec le monteur Bob Eisenhardt.

Bien que les quatre volets du Ring n'aient pas fait l'unanimité à New York, Susan Froemke se dit, elle, particulièrement impressionnée par le travail du metteur en scène québécois et par le courage du Met d'avoir monté une telle production. «Robert Lepage est incroyablement ambitieux, il cherche à réaliser l'impossible. C'est ce qu'il est, c'est ce qui le motive et c'est ce qui le fait avancer», dit-elle.

Présenté en primeur au Festival du film de Tribeca, Wagner's Dream doit prendre l'affiche le 7 mai dans de nombreuses salles en Amérique du Nord, en avant-goût des versions filmées des quatre volets du Ring. À New York, le Met continue quant à lui de présenter la production de Lepage jusqu'au 12 mai cette année, et en avril et en mai 2013.