Après avoir fait le tour du monde avec le spectacle Victoria, l'inclassable Dulcinea Langfelder fait sa rentrée montréalaise francophone à la fin de l'automne à l'Espace GO. Avec La complainte de Dulcinée, l'artiste «méga-low-tech» jette un regard critique et humoristique sur le parcours de l'humanité, à travers la muse de Don Quichotte, Dulcinée du Toboso.

Q : Cela fait plusieurs années que vous n'avez pas présenté une nouvelle création à votre public montréalais. Comment est née votre collaboration avec Alice Ronfard, la metteure en scène de La complainte de Dulcinée?

R : La dernière fois que j'ai joué à Montréal, c'était en 2002, pour présenter Victoria en reprise. J'ai connu Alice Ronfard il y a très longtemps: elle m'a dirigée dans mes deux premières pièces. Ensuite, nous nous sommes perdues de vue. Il y a quelques années, après 15 ans, je l'ai appelée pour lui parler de ce projet de nouvelle pièce, parce qu'Alice était la seule personne sur terre qui pouvait m'aider!

Q : On dit souvent de vous que vous êtes une artiste inclassable. Qu'est-ce que cela signifie?

R : Ce que je fais n'est pas vraiment de la danse, ni du théâtre, ni du cirque, de la variété ou de l'opéra... C'est un mélange de tout ça. Je fais ce qui me vient tout naturellement, alors je ne me pose même pas la question. Je me bute pourtant à l'obstacle de la classification, lorsqu'il s'agit de diffuser mon travail, parce que tout est catégorisé. Quand je fais des spectacles, je m'inspire du phénomène du rêve. Nos rêves ne sont pas que dans une dimension gestuelle ou musicale; on mélange tout. En fait, ceux que je trouve bizarres, ce sont les artistes unidimensionnels!

Q : Qu'est-ce que les tournées internationales apportent à votre création artistique?

R : Quand je crée, j'ai le monde entier dans ma tête. Je sais comment les Sud-Américains, les Asiatiques, les Européens réagissent. Je dois ainsi dire les choses dans un langage que tout le monde comprend. En vieillissant, j'ai envie d'aborder des problématiques plus vastes, moins nombrilistes. Ma vie amoureuse, ma relation avec mes parents et toutes ces préoccupations individualistes m'intéressent désormais moins que ce qui se passe dans le monde.

Q : Qu'advient-il de votre spectacle Victoria?

R : Il est fort probable que nous irons présenter Victoria dans un festival de théâtre au Zimbabwe, en avril prochain. Sinon, Victoria vient de percer au Mexique. Nous prévoyons d'ailleurs faire la tournée avec les deux pièces (Victoria et La complainte de Dulcinée).

Q : Que veut dire l'expression spectacle «méga-low-tech»?

R : Nous utilisons des technologies récentes, mais rien de révolutionnaire. Dans les spectacles, on essaie de faire croire que les éclairages ou les effets techniques ne viennent de nulle part. Dans La complainte de Dulcinée, j'ai décidé de laisser une place aux techniciens sur scène. Un peu dans l'esprit de Don Quichotte, qui recréait des fantasmes. J'adore créer des imageries fantastiques, mais je veux que l'on voie, comme dans l'esprit de Don Quichotte, qu'il n'y a pas de magie.

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La complainte de Dulcinée sera présentée à l'Espace GO du 4 au 14 décembre.