Événement toujours attendu, le grand concert du Vendredi saint de la Société Philharmonique de Montréal offrait cette année un intérêt particulier. Créé en 1875 sous le nom de Montreal Philharmonic Society et dissout en 1899, l'organisme fut réanimé en 1982 par Miklós Takács. Cette fois, le chef montréalais d'origine hongroise avait choisi l'unique oratorio de Beethoven, Christus am Ölberge -- Le Christ au Mont des Oliviers --, que la Philharmonic monta en 1893, soit 90 ans après la création, à Vienne, en 1803.

Placée après l'entracte, l'oeuvre totalisa 55 minutes. La deuxième et plus courte des six Messes latines de Schubert occupait de ses 25 minutes la première moitié du concert, qui avait attiré plus de 2000 personnes à l'église Saint-Jean-Baptiste.

On avait laissé l'église bien éclairée. Pour le Beethoven, on avait pris la peine d'imprimer dans le programme le texte chanté et sa traduction. Les auditeurs pouvaient ainsi les suivre sans s'arracher les yeux! Ici, une petite leçon pour l'OSM et l'OM...

L'oratorio de Beethoven est rarement donné. C'est aussi le cas du Schubert, bien que Boris Brott l'ait dirigé il y a quelques semaines; l'autre exécution connue remonte à 1997, sous la direction de Dutoit. Peu jouées, donc, ces deux oeuvres, et la chose s'explique facilement : elles n'offrent pas un grand intérêt. Beethoven lui-même se disait insatisfait de son travail, effectué à la hâte, et le révisa plusieurs fois. Quant au Schubert, c'est une messe comme il en existe tant d'autres.

Cette année encore, Takács dirigeait un orchestre recruté auprès de diverses formations locales, y compris l'OSM et l'OM, et un choeur où se fondaient trois ensembles. Au total, 44 instrumentistes et 200 choristes, constituant deux masses puissantes que Takács maintint à un excellent niveau. Aucun problème à l'orchestre. Du côté du choeur, un rien de timidité, dans le Beethoven, chez les choristes représentant les soldats venus arrêter Jésus.

Les trois solistes figuraient dans les deux oeuvres. La plus sollicitée des trois, Aline Kutan donna une prestation remarquable. Oublions quelques légers problèmes d'intonation et un ou deux ratés au suraigu. Cette petite femme possède encore un registre élevé étonnant à la fois de puissance et de justesse conjuguées. Dans le Schubert, sa voix planait avec aisance au-dessus du ténor et du baryton; dans le Beethoven, sa virtuosité était parfois stupéfiante.

Peu à dire sur les deux hommes. Patrick Mallette conduit intelligemment une belle voix grave de baryton. Le ténor Steeve Michaud n'est pas sans talent, mais il chante presque toujours d'une voix forcée.

ORCHESTRE DE LA SOCIÉTÉ PHILHARMONIQUE DE MONTRÉAL, CHOEUR DE L'UQAM, MONTREAL WELSH MALE CHOIR et CHANTRES MUSICIENS. Chef d'orchestre : Miklós Takács. Solistes : Aline Kutan, soprano, Steeve Michaud, ténor, et Patrick Mallette, baryton. Vendredi soir, église Saint-Jean-Baptiste.

Programme :

Messe no 2, en sol majeur, pour trois voix solistes, choeur et orchestre, D.167 (1815) - Schubert

Christus am Ölberge, pour trois voix solistes, choeur et orchestre, op. 85 (1803) - Beethoven