En 2012, ils finissaient deuxièmes au concours des Francouvertes et enregistraient un EP de cinq chansons. Depuis, les membres de Gazoline ont franchi la vingtaine et déménagé à Montréal. Ils livrent mardi un premier album qui sent le rock, le cuir et les filles qui dansent. La Presse a suivi David Dufour, Xavier Dufour-Thériault et Jean-Cimon Tellier-Dubé à cinq étapes cruciales menant à la sortie de leur disque.

Entrevue et répétition

Pour faire une analogie avec le poker, les membres de Gazoline y vont all in depuis leur deuxième place au concours des Francouvertes, il y a deux ans.

Ils ont déménagé à Montréal et jouent le tout pour le tout pour vivre du rock. À quelques jours du lancement de leur premier album officiel, mardi, David Dufour, Xavier Dufour-Thériault et Jean-Cimon Tellier-Dubé sont affamés.

Les trois amis du secondaire veulent aller plus loin qu'avec l'EP Futurbabymama, lancé en janvier 2012. «On ne considère pas l'EP comme un album, mais comme un prélude», précise Jean-Cimon.

«On a fait l'EP comme un compte rendu de ce qu'on était à ce moment-là. Cinq tounes d'un band de garage qui fait du rock minimaliste ultra-adolescent», ajoute Xavier.

Cafeïne investi

Depuis la finale des Francouvertes (remportée par Les soeurs Boulay), Gazoline a fait quelque 80 spectacles. Le trio a multiplié les essais et les erreurs pour ne garder que le meilleur. «On a écrit un album, puis Cafeïne l'a écouté. Personne n'était emballé. On l'a jeté et on a recommencé à zéro. On voulait faire de la musique glam en français et se sortir du folk cheap ou du post-Radiohead ambiance. Faire un rock plus carré avec moins de jams, mais avec des progressions et des harmonies plus complexes», raconte Xavier, le coloc de Cafeïne, dont le prénom est aussi Xavier.

Ce dernier ne s'investit dans aucun projet à moitié. «Cafeïne voit Gazoline comme un prolongement de ce qu'il fait. On veut tous faire du rock sophistiqué et ambitieux.»

«À cause de son expérience, Cafeïne a des idées qu'on ne peut même pas s'imaginer avoir, comme utiliser des cloches ou une chorale d'enfants à la fin d'une toune, ajoute Jean-Cimon. C'est le rôle du réalisateur d'aller chercher des idées folles de plus.»

En termes d'écriture, le jeune Xavier a beaucoup appris de Xavier son aîné. «Le premier album était adolescent. Quand tu es adolescent, tu fantasmes. Là, je suis tombé amoureux et je me suis brisé le coeur, donc je peux en parler.»

Pour le chanteur et ses acolytes, le rock est une vocation. «Un rockeur est une sorte de prêtre qui dédie sa vie à ça», explique Xavier avec son accent du Saguenay et son attitude de rockeur-né.

Sur une chanson comme Du feu, Gazoline profite néanmoins des vertus de la pop. «Même si le rock et le punk nous collent à la peau, il reste que ceux qui font des albums sans côté pop font des albums qui ne sont pas vraiment bons», lance Xavier.

Cafeïne a donné ce conseil précieux à Gazoline. «Entre les tounes, voulez-vous que des gars avec des cheveux longs viennent vous parler de leurs pédales, ou voulez-vous voir des filles qui dansent?»

Un quatrième membre

Avec les claviers et les couches d'arrangements qui étoffent les nouvelles chansons, un quatrième membre (Marc Landry) se joindra à l'occasion au trio sur scène. «On a un peu pété les plombs. On a ajouté des guitares et des synthés et, à trois paires de bras, on ne peut pas lui rendre justice live», explique Jean-Cimon.

Vous l'aurez deviné: David Dufour, Xavier Dufour-Thériault et Jean-Cimon Tellier-Dubé sont prêts à tout pour vivre à fond l'expérience rock'n'roll. Pour le meilleur et pour le pire. «On se connaît depuis des années. Nous sommes de bons chums et nous sommes rendus au point où, même si on se tape sur la gueule, on s'embrasse après», conclut David, la voix sage de Gazoline.

Tournage d'un vidéoclip

Il est 14 h en ce lundi après-midi gris et déprimant. «Que Dieu te bénisse et te garde/Qu'il te montre sa face et t'accorde sa grâce», lit-on sur une affiche.

Une odeur d'hôpital flotte dans l'ascenseur qui nous mène à la chapelle des Petites Franciscaines de Marie, où Gazoline tourne un clip avec John Londono.

Le réalisateur de renom et le chanteur Xavier Dufour-Thériault ont élaboré ensemble le concept du clip de la chanson Ces gens qui dansent.

«D'un côté, il y a un show qui a l'air d'une messe plate et, de l'autre, il y a un personnage [joué par Xavier] qui s'emmerde dans sa chambre et qui se met à chanter et danser devant son miroir. Il va ensuite venir prendre la place du chanteur qui est en fait un double de lui-même», explique John Londono.

Le tournage a débuté à 9 h et doit «en théorie» se terminer à 21 h, nous indique Stéphanie Merizzi, directrice de production de la boîte Roméo et fils. Son équipe jongle avec un budget modeste de 6000 $, précise-t-elle.

À notre arrivée à la chapelle tirée d'une autre époque, un chorégraphe dirige une troupe de 15 jeunes danseurs qui portent une combinaison de protection. David, Xavier et Jean-Cimon doivent faire du lip-sync sur leur chanson en affichant un air placide.

John Londono et son équipe se trouvent au balcon. «On le fait une dernière fois», lance le réalisateur.

Matin de spectacle

«On sait que c'est rough. Nous aussi, on vient de se lever», lance Xavier aux étudiants assis au café l'Exode du cégep du Vieux Montréal. Il est 11h30, le mardi 11 mars. Trop tôt pour donner un show rock. Mais Gazoline y met toute la gomme. «Bouchez-vous pas les oreilles. Il y a sept micro-ondes ici. C'est pas mal plus dangereux!», lance Xavier à la foule. C'est la première fois que David, Jean-Cimon et lui se produisent avec leur quatrième membre de tournée, Marc Landry. Tout se passe bien de ce côté et tout le monde est rassuré pour le lancement.

Réception des albums

Jeudi 13 mars. C'est aujourd'hui que les premiers exemplaires de l'album de Gazoline sont livrés chez Ambiances Ambiguës, la boîte de gérance et de promotion du groupe (et aussi celle de Keith Kouna, Cafeïne et Chantal Archambault). Nous avons rendez-vous dans ses bureaux du Mile-Ex à 14h. Le guitariste de Gazoline, Jean-Cimon Tellier-Dubé, y travaille. Il fait du pistage radio pour différents artistes (Alexandre Désilets, Phantogram, Mordicus), du graphisme et de la rédaction de communiqués de presse. «J'ai étudié en journalisme au cégep de Jonquière», explique-t-il, avant d'ajouter à la blague: «Quand je prends congé, mon boss se fait une cote.»

Dans le milieu de la musique, Fred Poulin, imprésario de Gazoline, n'a plus besoin de présentations. C'est lui qui se charge de vendre Gazoline aux stations commerciales, pendant que Jean-Cimon sollicite la cinquantaine d'antennes régionales partout en province. «Je ne dis pas que je suis dans le groupe», dit-il avec un sourire en coin.

Tout va pour le mieux à présent: Gazoline est le Buzz NRJ du mois, alors que sa chanson Ces gens qui dansent figurait comme «Réaction forte de la semaine» dans le palmarès Nielsen BDS de la semaine dernière.

«Vu le virage rock de NRJ, nous sommes chanceux de ne pas avoir sorti l'album à l'automne dernier comme prévu», souligne Fred Poulin.

À 15h, il est temps de se déplacer sur le Plateau dans les bureaux de l'étiquette de disques L-A be, le label de Gazoline. Le chanteur Xavier Dufour-Thériault arrive en même temps que nous.

«Qu'est-ce qu'il faut faire?», lance-t-il, en enlevant ses bottes. Tout simplement envoyer par la poste les centaines d'exemplaires de l'album réservés aux journalistes et membres del'industrie.

Autour de la table, tout le monde se réjouit du design de la pochette, conçue par Alex Ortiz du groupe We Are Wolves.

«Le mailing, c'est plate si on n'a pas de bière», lance Fred Poulin en se débouchant une Pabst Blue Ribbon.

En promo

La cinquième étape à lire ici.

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ROCK. Gazoline. L-ABE/Ambiances Ambiguës. Lancement mardi soir au théâtre Sainte-Catherine.