Choix original et tout à fait dans l'esprit d'un festival, les Lagrime di San Pietro de Roland de Lassus étaient donnés en première ici par le Studio de musique ancienne de Montréal jeudi soir en l'église plus que centenaire du village de Sainte-Mélanie, dans le cadre du Festival de Lanaudière.

Première, en fait avant-première puisque le Studio reprendra l'oeuvre la saison prochaine. Il est aussi question d'un enregistrement.

Ces Larmes de saint Pierre datent de 1594, l'année de la mort du génial polyphoniste flamand. Le texte, du poète italien Luigi Tansillo, contemporain de Lassus, se veut l'expression du remords éprouvé par l'apôtre qui, par trois fois, renia le Christ. Il s'agit d'un texte exalté et même philosophique auquel notre sensibilité moderne s'identifie assez mal. La traduction française fournie aux auditeurs de jeudi contenait des envolées comme celle-ci: «En reniant mon Seigneur, j'ai renié ce qu'est la vie dont provient toute vie. Si j'ai renié la vraie vie, je ne désire pas son ombre.»

 

Peu importe que l'on soit croyant ou non: la beauté de ce texte est indéniable, comme d'ailleurs la grandeur de la musique qu'y a greffée Roland de Lassus (ou Orlando di Lasso, selon l'orthographe italienne du nom utilisée par le Studio).

L'oeuvre, qui totalise une heure, est constituée de 21 pièces, soit 20 madrigali spirituali décrivant la souffrance de saint Pierre et un motet final où le Christ en croix lui reproche sa trahison. Les Lagrime sont pour choeur à sept voix (ou parties), que Christopher Jackson avait distribuées entre 10 de ses choristes. Chacune des deux parties de soprano était chantée par une seule personne. Les deux parties d'alto étaient confiées respectivement à un haute-contre et à deux mezzos, les deux parties de ténor étaient prises respectivement par un seul chanteur (Michiel Schrey, bien connu comme soliste) et par deux chanteurs, cependant que deux chanteurs assuraient l'unique partie de basse.

Cette répartition peu orthodoxe, imposée par les circonstances, produisit les plus heureux résultats: un ensemble à la fois homogène et plein de relief et de couleur. Les Lagrime furent précédés d'un court motet et suivis, comme rappel, d'un autre motet.

Malgré la distance (Sainte-Mélanie est à une heure et demie de Montréal) et malgré l'austérité du programme proposé, les Lagrime avaient attiré quelque 250 personnes pour ce concert, l'un des sommets de Lanaudière 2009.

CHOEUR DU STUDIO DE MUSIQUE ANCIENNE DE MONTRÉAL. Dir. Christopher Jackson. Jeudi soir, église de Sainte-Mélanie. Dans le cadre du 32e Festival de Lanaudière. Programme: Lagrime di San Pietro (1594) - Roland de Lassus