Ses fans canadiens l’espéraient depuis des mois, leurs vœux seront enfin exaucés. Taylor Swift a annoncé jeudi qu’elle sera en concert au pays en novembre 2024. La chanteuse américaine se produira six soirs à Toronto. Décryptage d’Eras, la tournée la plus lucrative de l’année jusqu’à maintenant.

Ce qu’il faut savoir 

  • Taylor Swift a lancé la tournée Eras en mars dernier, à Glendale, en Arizona.
  • Jeudi, elle a ajouté quatre villes à son calendrier, dont Toronto, son seul arrêt au Canada.
  • Près de 150 concerts sont prévus jusqu’en novembre 2024.
  • Avec des recettes de 300 millions, Eras est de loin la tournée la plus lucrative des six premiers mois de l’année.
  • En novembre dernier, la prévente de billets aux États-Unis, organisée par Ticketmaster, a connu des ratés et a poussé certains fans à poursuivre l’entreprise en justice.

Vers des recettes de plus de 1 milliard

1,4 milliard de dollars. Voilà l’impressionnant chiffre que pourraient atteindre les recettes de la tournée Eras lorsqu’elle prendra fin en 2024, selon les estimations de Pollstar, publication spécialisée dans l’industrie musicale. Formulée en juin dernier, cette prévision pourrait même être revue à la hausse, puisque Taylor Swift a ajouté une trentaine de dates à son calendrier depuis, pour un total de près de 150 concerts.

Déjà, la tournée lancée en mars 2023 est la plus lucrative de l’année… et de loin ! Les 22 premières représentations aux États-Unis, auxquelles ont assisté 1,2 million de personnes, ont engrangé des recettes de plus de 300 millions, selon les données de mi-année de Pollstar.

La tournée de Bruce Springsteen occupe la deuxième place du palmarès avec des recettes de 142,6 millions. Love on Tour d’Harry Styles arrive troisième, avec 124 millions.

En comparaison, en 2022, c’est le rappeur portoricain Bad Bunny qui avait enregistré les recettes les plus élevées, soit 373 millions.

PHOTO SCOTT STRAZZANTE, ASSOCIATED PRESS

Une jeune fan s’est procuré un t-shirt orné de portraits de Taylor Swift avant le concert de son idole au Levi’s Stadium de Santa Clara, en Californie, le 27 juillet dernier.

L’influence des fans

« Enfin ! », ont probablement crié de joie de nombreux « Swifties » canadiens ce jeudi, alors que Taylor Swift annoncait qu’elle s’arrêterait à Toronto six soirs au Centre Rogers en novembre 2024, soit du 14 au 16, puis du 21 au 23.

Il faut dire que depuis le printemps, chaque fois que l’interprète d’Anti-Hero et de Lavender Haze ajoutait de nouvelles villes à son calendrier, la déception était grande parmi les fans d’ici.

Sur les réseaux sociaux, ils ont été nombreux à demander à leur artiste préférée de présenter au Canada son concert d’une durée de 3 heures qui reprend 44 chansons tirées de ses 10 albums. Même le premier ministre Justin Trudeau a interpellé la chanteuse sur Twitter dans un message truffé de clins d’œil à ses chansons.

L’engouement des fans a-t-il pu pousser l’équipe de Taylor Swift à ajouter des concerts au Canada ? « C’est sûr, parce que ça montre qu’il y a un marché. Quand il y a autant de pression, elle sait que si elle ajoute des dates, elle va vendre des billets », analyse Stéphane Mailhiot, président de l’agence de création Havas Montréal.

Pourquoi Toronto ?

« Mais pourquoi Toronto et non Montréal ? », se demandent assurément de nombreux fans québécois. Encore une fois, il s’agit d’une question de marché, croit Stéphane Mailhiot. « C’est le plus gros marché au Canada », fait-il valoir. Et ce, non seulement par sa population, mais également par sa richesse.

La chanteuse aurait-elle pu faire quatre concerts à Toronto et deux à Montréal ? « Pour l’artiste, c’est toujours plus simple de se déplacer le moins possible, souligne Alexis Perron-Brault, professeur au département de marketing de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Le déplacement de la tournée, ce sont des coûts. […] Il y a des éléments de scénographie assez complexes. Déplacer ça à chaque fois, ça coûte cher. » Et lorsqu’un artiste ne s’arrête qu’à un seul endroit au Canada, Toronto est souvent la ville choisie, remarque l’expert.

La Presse a tenté de joindre les promoteurs de la tournée de Taylor Swift pour savoir si un arrêt était prévu ou possible à Montréal, mais n’a pas obtenu de réponse.

PHOTO MARK BLINCH, REUTERS

Taylor Swift est allée à la rencontre de ses fans lors de son passage au Festival du film de Toronto en septembre 2022.

Les messages des dirigeants

Dans les villes où elle s’arrête, la tournée Eras entraîne des retombées économiques très importantes. Selon une étude effectuée par la firme QuestionPro et publiée dans le magazine Fortune, les fans américains de Taylor Swift ont dépensé en moyenne 1300 $ en billet, hôtel, transport, nourriture et vêtements pour assister au concert de leur idole. La firme avance que la tournée pourrait générer 4,6 milliards en dépenses de consommation aux États-Unis.

Voilà peut-être pourquoi, en plus de Justin Trudeau, tant de dirigeants interpellent la chanteuse pour l’inviter à se produire dans leur pays ou leur ville. Le président du Chili, Gabriel Boric, qui se décrit comme un « Swiftie », a publié une vidéo sur YouTube, alors que le maire de Budapest, Gergely Karácsony, lui a envoyé une lettre pour lui demander de passer par la Hongrie.

Lisez le tweet de Justin Trudeau

Les Swifties montréalais devraient-ils inciter la mairesse Valérie Plante à faire de même ? Alexis Perron-Brault doute que les messages des dirigeants influencent Taylor Swift. Selon lui, les politiciens « essaient de se servir de l’image positive de l’artiste pour avoir l’air branchés et sympathiques ».

Les prix des billets dénoncés

PHOTO MARIO ANZUONI, REUTERS

Le prix moyen d’un billet aux États-Unis pour un concert de Taylor Swift est de 250 $.

Si la tournée Eras est si lucrative, c’est, bien entendu, en raison de l’enthousiasme énorme des fans, mais aussi à cause des prix très élevés des sièges. Selon Pollstar, le prix moyen d’un billet aux États-Unis est de 250 $. Le système de tarification dynamique implanté par Ticketmaster a d’ailleurs été pointé du doigt par de nombreux spectateurs frustrés.

« Vous ne payez pas nécessairement la même chose que votre voisin, en fonction du moment où vous avez acheté le billet et selon qui était prêt à payer davantage », explique Stéphane Mailhiot, de Havas Montréal.

Essentiellement, les artistes sont en train de réintégrer dans la vente traditionnelle de billets le marché secondaire, les scalpers […]. Le prix des derniers billets augmente selon la demande.

Stéphane Mailhiot, de Havas Montréal

Or, pour les premières dates américaines, une flambée des prix a été observée dès la prévente en novembre dernier. Des bogues du système informatique et des attentes interminables ont également mis la patience des fans à rude épreuve. Une douzaine d’entre eux ont même intenté une poursuite contre le conglomérat formé de Ticketmaster et de Live Nation, et des politiciens américains ont dénoncé le monopole de l’entreprise fusionnée, qui a dû se défendre devant le Sénat en janvier.

Il y a quelques semaines, la vente de billets en France a également connu des ratés. Elle a dû être mise sur pause en raison de « problèmes avec un fournisseur ».

Comment acheter des billets pour les concerts à Toronto ?

La vente de billets au Canada se déroulera-t-elle plus rondement qu’ailleurs ? On l’espère. Ticketmaster invite dès maintenant les gens qui souhaitent se procurer des billets à s’inscrire pour la prévente des « fans certifiés ». Les inscriptions sont ouvertes jusqu’à 17 h samedi. Parmi toutes ces personnes, une certaine proportion recevront, le 8 août, un courriel les informant qu’elles auront accès à la prévente. Du 9 au 11 août, ces chanceux pourront acheter des billets lors d’une plage horaire déterminée qui leur sera communiquée. Selon Ticketmaster, cette façon de faire permet de départager les vrais spectateurs des robots.

Consultez la marche à suivre pour acheter des billets (en anglais) Consultez les dates des spectacles de Taylor Swift (en anglais)