Intercepté le matin du 24 décembre, Yves Lambert se dirigeait vers son domicile de Lanaudière afin d'y préparer son repas de Noël. Avec sa Françoise, il y a reçu ses proches, dont quelques soliloques de l'entourage. « On est privilégiés, il faut en faire profiter. Il faut être charitable, estie! » Le festin aussitôt digéré, de retour à l'ouvrage : jeudi et vendredi au Lion d'Or.

Comme c'est le cas dans un album récemment mis en vente (label La Prûche libre), Yves Lambert (voix principale, accordéons, harmonica chromatique) sera accompagné  de ses « premiers ex-Bottine», « joueurs de concession » qu'il respecte au plus haut point : Olivier Rondeau (guitares acoustique et électrique, banjo, voix)  et Tommy Gauthier (violon, mandoline, banjo, basse, pieds, percussions, voix).

Ce trio est sa priorité, en fait.

« De temps en temps, on fait en quintette mais on vise l'international en trio; le 11 janvier prochain, par exemple, on aura à New York une belle plateforme pour se faire valoir. En mai passé, on a donné à la Grande Rencontre un spectacle qui a très bien marché, des tourneurs internationaux y ont assisté...»

Ce trio ne fait pas dans l'exotique, comme on l'a constaté à la sortie de l'album. « Retour aux sources dans la modernité » se plaît à répéter son leader. Au programme, effectivement, folklores européens, français, celtiques, « assez américain comme groove ».

« On ne s'en apercevait pas au départ, on se rend compte maintenant que le temps fort y est très présent. On travaille le gros 4/4, on bâtit là-dessus. Par le passé, mes expériences de métissage consistaient à intégrer les rythmes exotiques en fonction de la musique québécoise, alors que cette fois, on ne dénature pas la base rythmique de cette musique. Cette base en est son essence ! Moi en tout cas, je suis rendu là: respecter la source, valoriser cette musique importante pour le Québec. »

Lambert ne cherche donc pas à explorer hors de la source comme il l'a déjà fait : « Dans le métissage,l'exploratoire et les grosses formations, j'ai donné. En vieillissant, j'essaie d'épurer, et c'est compliqué d'être simple!  C'est ce qu'il y a de plus dur. »

Bâtir en respectant la source n'exclut pas l'innovation, fait  néanmoins remarquer notre interviewé.

« Cette musique provient surtout du répertoire traditionnel mais on peut y créer. On prend un reel ou une chanson, Tommy compose un air en fonction des accords que suggère la chanson. Et plus encore : son Air de Kildare, c'est complètement original. Olivier aussi compose. Tout ça est fait dans l'esprit d'aujourd'hui, ça peut être d'esprit plus rock et aussi dans la continuité de ma démarche. L'intégration est naturelle, il n'y a rien de forcé. »

Respecter la source revient aussi à faire valoir l'expertise locale en la matière.

« La reconnaissance n'est pas évidente chez nous, elle l'est plus à l'extérieur, fait observer Yves Lambert. Je suis bien content pour le Vent du Nord, Prix Charles-Cros. Je suis content de ce qui se produit présentement en musique traditionnelle d'ici. Je reste passionné, embarqué là-dedans plus que jamais! Je joue avec des petits gars motivés et talentueux au boutte. »

Une décennie de travail a conduit le cofondateur et ex-membre de la Bottine Souriante à se tailler une autre place sur la planète trad.

« La Bottine était connue, mais Lambert... a fallu qu'il se fasse un nom!  Dans la vie, il faut travailler. Rester là en menant d'autres projets m'aurait facilité les choses mais... je ne n'avais pas le choix et je suis content de voir où je suis rendu. Je reste passionné et très reconnaissant.  À 56 ans, je me trouve privilégié de pouvoir gagner ma vie dans la musique et faire marcher ma petite business avec Françoise et notre fils - qui travaille avec nous du Chili où il vit.

« Je suis encouragé au boutte, je suis prêt à faire du développement, j'aime encore voyager.. J'aime ce qu'apporte la musique, langage universel et baume sur l'existence. »

Les jeudi 27 et vendredi 28 décembre, Yves Lambert Trio se produit au Lion d'Or. L'ensemble D'Harmo assure la première partie.