Notting Hill, When Harry Met Sally, Love Actually, The Holiday, The Devil Wears Prada ou les premiers Bridget Jones, pourquoi le cinéma ne fabrique-t-il plus des comédies romantiques de ce calibre élevé, remplies d’humour, d’intelligence, de Julia Roberts et de quiproquos ?

Avec les années 1990 qui ne décollent plus de la culture populaire et le vent Y2K (les horribles vêtements du début des années 2000, au secours) qui souffle très fort, on aurait pu croire que cette nostalgie sucrée et attendrissante tapisserait le grand écran, telle une mer de camisoles superposées dans un bar en 2005.

Mais non. La comédie romantique a migré vers le petit écran, où elle fleurit sur les plateformes numériques, tandis que les superhéros musclés et moulés dans du lycra servent à vendre des billets de cinéma à 15 $ et des chaudières de popcorn chez Guzzo.

Mise en garde : le film The Idea of You (L’idée d’être avec toi) d’Amazon Prime Video ressemble à un film craquant dans lequel aurait joué Cameron Diaz en 1998. C’est un piège.

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Nicholas Galitzine et Anne Hathaway dans L’idée d’être avec toi

Personne ne croit à la mère célibataire incarnée par Anne Hathaway, qui se morfond en amour (bien oui, c’est ça) et qui reconnecte avec son éros dans les bras de la version Temu d’Harry Styles. Les scènes campées au festival de musique Coachella sont extra « cringe », tout comme les chansons originales du faux groupe August Moon, le pendant Fashion Nova de One Direction, qui sonneraient peut-être mieux sur les champignons magiques.

Bref, tout ça pour dire que les meilleures comédies romantiques se déplient maintenant en plusieurs saisons, plutôt qu’en format de 90 minutes. Netflix manufacture Emily in Paris, Never Have I Ever, Heartstopper et One Day. Prime Video mise sur The Summer I Turned Pretty et Normal People. Et il y a La chronique des Bridgerton, qui évolue dans une classe royale à part. C’est toujours aussi savoureux, sirupeux, sexy et savonné.

Le populaire feuilleton de la régence anglaise remonte dans son luxueux carrosse pour quatre nouveaux épisodes, offerts en anglais et en français, sur Netflix. Le reste de la troisième saison arrivera, sur un petit plateau doré, le 13 juin.

Cette nouvelle saison mondaine s’articule autour de Colin Bridgerton (Luke Newton) et de sa meilleure amie d’enfance – et voisine d’en face – Penelope Featherington (Nicola Coughlan), jeune femme vive, comique, lettrée et non mariée. Pas de ruse ici : les fans de Bridgerton savent déjà que Penelope écrit secrètement le journal à potins le plus scandaleux de Mayfair sous le pseudonyme de Lady Whistledown, la Gossip Girl de l’aristocratie corsetée.

La fougueuse Eloise Bridgerton – la sœur de Colin, ne perdez pas le fil à broder – le sait également, ce qui a provoqué une chicane nucléaire, la saison dernière, entre les deux meilleures copines, qui ne partagent plus la même ombrelle. Quel gâchis. Eloise et Penelope, mes deux idéalistes préférées du XIXsiècle, formaient le duo le plus moderne et le plus amusant de la série Bridgerton. Vous vous doutez sûrement qu’une promenade de réconciliation se trame, en chemin vers la modiste bavasseuse, Genevieve Delacroix, la fausse Parisienne.

Mais revenons à Colin. À la fin de l’été 1815, il revient d’un voyage de quatre mois quasiment plus confiant et Casanova que son frère Benedict. Au premier d’une longue série de bals somptueux, il butine dans un parterre de débutantes rougissantes, qui battent des cils et de l’éventail à une vitesse surprenante.

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Colin (Luke Newton) et Penelope (Nicola Coughlan) dans la troisième saison de Bridgerton

Évidemment que Penelope Featherington en pince pour son beau Colin. Tannée que son carnet de danse ne se remplisse pas, Penelope s’offre un relooking complet, façon What Not to Wear en 2007. Fini les robes jaune citron et les chignons sévères. Penelope embrasse ses boucles rousses sautillantes et montre plus de décolleté grâce à une garde-robe rafraîchie. Ah oui, Penelope sollicite aussi l’aide de Colin pour (enfin) se débarrasser de son étiquette de vieille fille. Elle a 19 ans dans la série, je tiens à le rappeler, merci.

Bien sûr que Colin et Penelope partageront le même titre de noblesse. C’est exactement ça, Bridgerton, de la fantaisie Harlequin enveloppée dans un costume bouffant et accompagnée d’une montagne de politesses. Oh, plaît-il, mama ! D’où nous provient cet entraînant air de piano-forte ?

C’est prévisible, élégant et réconfortant, Bridgerton. Et quel délice pour les yeux et les oreilles : les robes scintillantes, le langage châtié, les quadrilles endiablés, les courbettes à se barrer le dos, les décors majestueux et assurément une chanson pop contemporaine (Cheap Thrills de Sia) reprise par un quatuor à cordes.

La deuxième intrigue principale de Bridgerton 3 concerne Francesca Bridgerton, la plus plate des huit enfants Bridgerton, qui déploie ses plumes pour la première fois devant la reine Charlotte. Francesca ne parle que de musique classique et de partitions rares et c’est ennuyant sur un moyen temps. Bebye, ma lady.

Les personnages secondaires rehaussent toujours le marché du mariage de Bridgerton. Je pense aux deux sœurs niaises de Penelope Featherington, à leur mère ultramémère, à la méchante Cressida Cowper, à la ratoureuse Lady Danbury ainsi qu’à Violet Bridgerton, la bonté incarnée qui encourage ses enfants à écouter leur cœur plutôt que de se fier au CV de leurs prétendants.

Seule depuis la mort de son époux Edmund Bridgerton, piqué par une abeille meurtrière, Violet n’a pas encore flirté avec les comtes, ducs et barons célibataires de son riche cercle social. Et si Violet se mettait à entendre les petits battements de son grand cœur ?

Pour la suite de cette histoire sentimentale, chers lecteurs bien-aimés, faites un petit espace dans votre calendrier estival. La nouvelle saison de la haute société ne fait que commencer.