Même avec cette dernière semaine suffocante qui a englué tout le Québec, n’oublions pas que la ratoureuse fée automnale saupoudrera bientôt ses épices à la citrouille sur toutes les maudites formes de nourriture imaginables chez Starbucks, que des parents en veste Patagonia utiliseront (sans gêne) leurs enfants dans des séances photo au verger et que des chandelles au parfum de « feu de bois et sapin fraisier » brûleront dans plusieurs salons très hygge.

Oui, c’est la rentrée, c’est le temps des potages réconfortants, des tricots à grosses mailles, des albums Folklore et Evermore de Taylor Swift, des tuques portées à l’intérieur, des immenses foulards qui nous avalent la tête, la base automnale façon Gilmore Girls, quoi.

C’est aussi le début de la saison de télé québécoise (enfin !), et ça, c’est pas mal moins tristounet que de regarder la pluie de novembre tomber en écoutant du Bon Iver et en pleurant l’été où personne n’est vraiment devenu joli, évidemment.

Sans surprise, j’ai super hâte à lundi pour me rasseoir devant la thérapeute Louise Sigouin et ses célibataires en quête a) de toilette lave-cul, b) d’un meilleur monde intérieur et c) d’un plateau de charcuteries à déguster au lit, en pyjama de soie, avec Émily Bégin et Guillaume Lemay-Thivierge.

Évidemment, j’ai hâte de vibrer collectivement avec les millions de téléphages qui se branchent, en même temps, sur STAT et Indéfendable à Radio-Canada et TVA. Il s’agit d’un phénomène quasi unique au monde, alors que les deux séries de fiction les plus populaires du petit écran québécois se déplient en format quotidien, du lundi au jeudi.

L’attrait éclatant de STAT et Indéfendable démontre que la télé québécoise généraliste, même si elle perd de la vitesse, réussit encore à créer des rendez-vous rassembleurs, qui génèrent un paquet de discussions en télétravail, ce que l’on appelait jadis des conversations de machine à café.

En épluchant les grilles automnales de TVA et Radio-Canada, un constat saute aux yeux, tel un bracelet d’amitié accroché au poignet de Jean-Philippe Wauthier : les deux grandes chaînes puisent joyeusement dans leurs plateformes numériques payantes pour garnir leurs soirées télévisuelles.

TVA a sorti du Club illico Les temps des framboises (mercredi à 21 h), Mégantic (mardi à 20 h) et la deuxième saison de Portrait-robot (mardi à 21 h). De très bonnes séries qui méritent d’obtenir un meilleur rayonnement. Et plus besoin de payer pour les enfiler.

Même chose à Radio-Canada, qui pompe son Extra de Tou. tv pour offrir la quatrième saison de Plan B (mercredi à 21 h) de même que la série Fragments (mardi à 21 h) de Serge Boucher. Rien ne se perd, tout se recrée – sans abonnement !

Avant que la nouvelle vague québécoise nous engloutisse, j’ai eu le temps d’absorber plusieurs séries américaines et étrangères dont Qui est Erin Carter ?, un des titres les plus visionnés de Netflix depuis trois semaines. Comment dire ?

PHOTO SAM TAYLOR, FOURNIE PAR NETFLIX

Scène de Qui est Erin Carter ?

C’est mauvais bon. Dans le sens : vous enclenchez le premier épisode (sur un total de sept) de ce thriller d’action et vous savez immédiatement que, malgré l’intrigue débile et biscornue, vous allez vous rendre jusqu’au bout. C’est comme ça.

Nous rencontrons l’Erin Carter de cette minisérie britannique alors qu’elle enseigne, en suppléance, dans une école privée de Barcelone. Jolie maison de banlieue, mari infirmier sympa, la belle Erin mène une vie normale jusqu’au jour où elle se retrouve, par hasard, au cœur d’un braquage de supermarché. D’un coup, notre douce Erin se métamorphose en espionne violente de type Killing Eve qui rencontre Jason Bourne.

D’où sort Erin, cibole ? Qui a formé cette agente secrète ? Pour quelle agence bosse-t-elle ? En français et en anglais, les sept épisodes de Qui est Erin Carter ? débordent de cascades, de bagarres, de poursuites endiablées et c’est irrésistible, même si ce n’est pas du tout plausible.

Toujours sur Netflix, j’ai englouti d’une traite la deuxième saison de Selling the OC, la petite sœur de plage de Selling Sunset (Du soleil à revendre). Honnêtement, cette téléréalité romantico-immobilière se consomme comme un sac de croustilles. Vite et avec beaucoup de remords.

En fait, il s’agit d’un feuilleton-savon masqué – et scénarisé – en docuréalité. La recette originale et vitaminée de Selling the OC (Du soleil à revendre : Orange County) ne bouge jamais : la caméra agile nous montre des villas de bord de mer ultra luxueuses, tandis que les courtiers immobiliers, qui sortent tous d’une pub de parfum de Jean Coutu, se disputent autour d’horribles bureaux en métal brossé.

PHOTO FOURNIE PAR NETFLIX

Selling the OC. avec Polly Brindle, Gio Helou, Brandi Marshall, Jason Oppenheim, Alex Hall, Austin Victoria, Kayla Cardona, Brett Oppenheim, Alexandra Jarvis et Tyler Stanaland

Bonus : quelques apparitions des jumeaux maléfiques Jason et Brett Oppenheim, les deux têtes chauves dirigeantes de l’agence immobilière au cœur des « intrigues » avec de gros guillemets.

On sent que les producteurs de Selling the OC ont davantage poussé la machine pour provoquer des conflits entre les agents, qui ne parlent que d’argent, combien ils en gagnent, combien ils en dépensent, c’est limite obscène.

Mais bon, il y a aussi du potinage du bureau, de la romance télégraphiée et des ruptures professionnelles sur fond de musique pop générique. Comment ne pas aimer ça, sérieux ?

En plus, les images gorgées de soleil de Selling the OC prolongent, en quelque sorte, l’été avant l’arrivée de la #$ % @ de fée automnale du latté à la citrouille épicée, au secours, bloquez-la à la douane.