Cette fin de semaine, les galeries d’art canadiennes sont au diapason de la très attendue foire Plural.

« La foire a connu un essor les dernières années », mentionne Anie Deslauriers, la nouvelle directrice générale de l’Association des galeries d’art contemporain (AGAC). L’édition 2024, présentée de ce vendredi à dimanche, recevra près de 8000 visiteurs et accueille pas moins de 46 exposants de 7 villes canadiennes ainsi que 480 artistes.

« Plural s’inscrit dans l’effervescence postpandémique ! » Si l’on voit que les indices économiques vont moins bien depuis 6 mois, la lourdeur économique ne semble pas atteindre le marché de l’art. « Ça ne s’est pas rendu dans le milieu des foires. Le marché de l’art est stable au Québec », précise à nouveau la directrice de l’AGAC entrée en poste le 19 février dernier.

Anie Deslauriers parle en connaissance de cause : celle qui a été directrice adjointe à la galerie Blouin Division a eu la chance de faire l’expérience de Plural, anciennement nommée Papier, sous toutes ses formes, y étant présente depuis sa première édition. Elle connaît donc bien l’association qui organise chaque année cet évènement d’envergure.

Une chose est à souligner selon elle concernant le marché de l’art. S’il y a des fermetures de galeries montréalaises, il y en a, parmi celles-ci, qui déménagent dans des locaux deux fois plus grands. C’est le cas des galeries Robertson Arès, Nicolas Robert et Eli Kerr, entre autres. D’autres sont présentes dans les foires internationales, dont Bradley Ertaskiran, qui a récemment exposé à l’Art Basel Miami Beach.

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Anie Deslauriers, directrice générale de l’Association des galeries d’art contemporain

Ça va bien dans le marché montréalais. Jusqu’à maintenant, on reste optimiste !

Anie Deslauriers, directrice générale de l’Association des galeries d’art contemporain

Élargir la vision

La programmation de Plural était déjà finalisée lorsqu’Anie Deslauriers a pris les rênes de l’association organisatrice, mais elle reconnaît que la foire se distingue. « Plural s’inscrit par son contenu dans une ligne intéressante. Au Canada, il y a la foire Art Toronto, la Grande foire de Québec et nous, Plural ! »

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« Les visiteurs à Plural vont se rendre compte qu’il y a un foisonnement de photos, de sculptures… », explique Anie Deslauriers, directrice générale de l’Association des galeries d’art contemporain.

Plural souhaite élargir davantage sa vision cette année. « Les visiteurs à Plural vont se rendre compte qu’il y a un foisonnement de photos, de sculptures… », précise la directrice.

Outre le nombre de galeries exposantes, qui reste stable depuis les quatre dernières foires, l’évènement propose également quatre projets spéciaux à l’étage des exposants. Une attention a entre autres été portée aux œuvres qui sont marginales, soit trop grandes pour être présentées dans les kiosques, par exemple.

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When is a fence a ladder ?, Melanie Colosimo, 2022, nylon réfléchissant et polyester, 90" x 37" x 9"

Un espace est réservé au travail des étudiants au baccalauréat à Concordia. Ceci est sans compter la programmation étoffée de tables rondes – dont celle avec deux collectionneurs, Julia Zhu et Andrew Booth –, de visites guidées et d’ateliers. Pour les visiteurs VIP, des visites de collections privées, d’entreprises ainsi que des visites d’expositions sont prévues.

Pour le grand public, les activités qui portent sur les pratiques artistiques d’aujourd’hui sont multiples : des ateliers d’initiation au collectionnement d’art contemporain, une introduction à l’écosystème pour les artistes émergents, des discussions qui portent sur l’écoféminisme ou sur les perspectives artistiques autochtones.

Deux choses retiennent l’attention cette année. Plural a consacré une partie du deuxième étage à des espaces atypiques qui n’ont pas pignon sur rue ou qui ont des opérations dans des endroits autres. Cette vitrine fera en sorte qu’ils pourront présenter leurs projets. De plus, un espace est réservé à l’exposition Mémoire matérielle, assurée par la commissaire evlyne Laurin. « C’est fascinant ce qu’elle a préparé », selon Anie Deslauriers.

Des galeries sous le signe de l’entraide et de la collaboration

Cette exposition présentée dans le Pavillon de Plural, ayant été supportée par Artys Transit et le Fonds Hamelys pour le commissariat, est un projet fort ambitieux, distinct de la formule de l’an dernier. Au lieu de former un comité, Plural accueille une commissaire pour l’édition 2024. L’évènement s’est conçu en dix semaines seulement. « Je croyais en ce projet qui pouvait vraiment être une collaboration avec les galeries, une entraide », ajoute evlyne Laurin.

L’exposition mise sur la matérialité des œuvres. « Créer un dialogue entre les pratiques plutôt que d’y aller avec un thème, c’est une façon de commissarier qui est différente », souligne la passionnée d’art contemporain.

L’exposition réunissant plus de trente productions, c’est l’occasion pour evlyne Laurin de rejoindre une diversité de voix et de perspectives, de techniques, de médiums ainsi que d’artistes. Très peu de galeries ne sont pas présentes dans l’exposition. Si c’est le cas, il s’agit de contraintes matérielles et logistiques, mais rarement de choix commissariaux.

Je voulais aller dans l’effet de pluralité. Je voulais présenter quelque chose qui allait être rassembleur, plus en profondeur. Présenter un Alexandra Levasseur à côté d’un Shary Boyle. L’idée était de montrer que la pratique au Québec est vivante.

evline Laurin, commissaire de l’exposition Mémoire matérielle

Le public pourra prendre connaissance des projets d’une diversité d’artistes canadiens de galeries variées. Une particularité est à souligner : beaucoup de socles sont des caisses de transport tournées à l’envers. L’équipe a usé d’originalité, créant un attachement avec les couleurs de Plural.

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Beaucoup d’œuvres ont comme socle des caisses de transport tournées à l’envers, comme Metis Soup, par Judy Charland.

Certaines productions sortent des lieux communs : alors que Ancestry DNA Bag de Nico Williams entre dans le creux d’une main, Métis Soup de Judy Charland propose une boîte de conserve de soupe autochtonisée.

Les visiteurs découvriront notamment des créations de Shary Boyle, Chun Hua Catherine Dong, Janet Macpherson, Manuel Mathieu, Charlène Vickers, et bien d’autres. La commissaire a également fait certains choix audacieux pour compléter sa sélection, dont la sculpture monumentale When is a fence a ladder? de Melanie Colosimo (2021-2022), qui provient de la galerie The Blue Building d’Halifax.

L’idée de Mémoire matérielle est de créer une conversation. « J’espère que les gens vont acheter ces œuvres-là ! J’espère que ça va amener de nouveaux collectionneurs », mentionne la commissaire.

Est-ce que cette exposition de trois jours ira chercher d’autres publics ? Dans tous les cas, elle ouvre la vision, fournit une nouvelle perception sur le marché de l’art, dans un esprit de soutien, de dialogue.

Plural, foire d’art contemporain, au Grand Quai du Port de Montréal, 200, rue de la Commune Ouest, jusqu’à dimanche

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