L’artiste visuelle Shary Boyle est bien en vue ces jours-ci à Montréal. En plus d’avoir une exposition individuelle à la galerie Patel Brown, son œuvre rien de moins que monumentale, Scentime, est maintenant installée au siège social de la Banque Nationale, rue Saint-Jacques.

Vesseling est la première exposition de l’artiste à Patel Brown à Montréal. Pour sa directrice, Roxanne Arsenault, il s’agit d’un grand privilège : « [Patel Brown] est une galerie qui est basée à Toronto et Shary [Boyle] vient de Toronto. J’aurais pu penser que [la première exposition] aurait été à Toronto, mais finalement, elle se passe à Montréal. C’est extraordinaire et très excitant pour moi. »

La présentation regroupe entre autres quatre séries réalisées depuis le projet d’envergure de l’artiste, Devant le palais de Moi [Outside the Palace of Me]. « On a été intéressés à présenter ces corpus ensemble. Shary [Boyle] était ouverte à ça, parce que même s’ils sont très différents, il y a des idées qui entrent en dialogue et il y a des relations formelles assez intéressantes », précise Roxanne Arsenault.

L’artiste, qui a représenté le Canada à la 55e Biennale de Venise, demeure fidèle à elle-même dans ces nouvelles productions, tout en sachant se renouveler et explorer de nouveaux langages.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

La directrice de la galerie Patel Brown, Roxanne Arsenault, au milieu des œuvres de l’exposition Vesseling, de Shary Boyle

C’est assez excitant pour nous de voir une artiste du calibre de Shary [Boyle] continuer de se réinventer, de faire de nouvelles propositions.

Roxanne Arsenault, directrice de la galerie Patel Brown

Inspirées du jeu, du rituel et de la métamorphose, les œuvres de Vesselling propulsent le public dans des mondes fantaisistes, dans des lieux imaginaires à la fois intrigants et troublants. Il s’agit d’interroger, à travers les propositions, l’identité hybride et la fluidité du soi. Dans la série Grafter, les peintures truffées de personnages étranges sont rehaussées de masques en céramique, créant un effet théâtral. Parmi les productions, certaines sont plus sobres, comme The Florist (2022) qui rappelle notamment un voyage en Lituanie de l’artiste. D’autres sont plus excentriques, dont Cabaret (2022) qui évoque la performance, l’acrobatie, le cirque, la mise en scène.

  • Shary Boyle, Wishing Well, 2022, 53 cm x 23 cm x 23 cm, porcelaine, billes de verre, cristal Swarovski. Sur la photo, la directrice de la galerie Patel Brown à Montréal, Roxanne Arsenault, présentant l’intérieur de l’œuvre.

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Shary Boyle, Wishing Well, 2022, 53 cm x 23 cm x 23 cm, porcelaine, billes de verre, cristal Swarovski. Sur la photo, la directrice de la galerie Patel Brown à Montréal, Roxanne Arsenault, présentant l’intérieur de l’œuvre.

  • Shary Boyle, Cabaret, 2022, 76 cm x 91 cm, gouache acrylique, céramique, textiles et encre sur lin

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Shary Boyle, Cabaret, 2022, 76 cm x 91 cm, gouache acrylique, céramique, textiles et encre sur lin

  • Shary Boyle, The Florist, 2022, 81 cm x 66 cm x 10 cm, gouache acrylique, céramique sur lin, porcelaine, lustre d’or, fil, bouton

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Shary Boyle, The Florist, 2022, 81 cm x 66 cm x 10 cm, gouache acrylique, céramique sur lin, porcelaine, lustre d’or, fil, bouton

  • Vue d’ensemble de l’exposition Vesseling, de Shary Boyle

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Vue d’ensemble de l’exposition Vesseling, de Shary Boyle

  • Vue d’ensemble de l’exposition Vesseling, de Shary Boyle

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Vue d’ensemble de l’exposition Vesseling, de Shary Boyle

1/5
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Dans un second temps, des récipients anthropomorphes « dysfonctionnels » en porcelaine entrent en dialogue avec ces premières œuvres. Le contenant se boit lui-même dans Sistern (2022) ainsi que, de manière plus subtile, dans Atrium & Ventricle (2022). « C’est toute une réflexion sur l’eau qui est une ressource naturelle précieuse, sur le corps comme contenu. Il y a beaucoup de charges émotives et conceptuelles dans ces œuvres-là », indique Roxanne Arsenault.

Pour l’artiste, ces préoccupations environnementales demeurent bien ancrées au sein des œuvres les plus récentes. Flood (2024) renvoie au petit village au Nouveau-Brunswick entouré de nature où réside l’artiste. Surtout, pour reprendre les mots de la directrice de Patel Brown, « Sackville est un marécage qui sera porté à être inondé ». L’œuvre amène alors les visiteurs à développer des réflexions sur le sujet.

Wishing Well (2022) est sans doute l’une des sculptures les plus surprenantes : le contenant, relativement sobre, s’ouvre. On y découvre alors rien de moins qu’un cristal Swarovski, apparaissant au bout d’une chaîne perlée. « Il ne faut jamais sous-estimer ce qui se trouve à l’intérieur », rappelle Roxanne Arsenault.

Hors les murs

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Vue d’ensemble de la sculpture Scentime, de Shary Boyle, à la Place Banque Nationale, grand hall, rue Saint-Jacques

Par ses rapprochements du point de vue de la forme, Wishing Well semble faire écho à Scentime, la sculpture monumentale de l’artiste récemment acquise par la Banque Nationale à la suite du dernier concours. Située dans l’atrium de la Place Banque Nationale, Scentime fait partie des six œuvres exposées dans le lieu du nouveau siège social aux côtés des artistes Myfanwy MacLeod (Le chant du Dodo), Beth Stuart (Les Tendresses), Fabienne Lasserre (Bruits-couleur), Jen Aitken (Presque vu) et Rochelle Goldberg (Monkey, Monroe). La pièce de Shary Boyle est sans doute l’une des plus imposantes, mesurant près de 7 mètres de haut. Et bien paradoxalement, elle s’inspire de récipients miniatures décoratifs utilisés au XVIIIe siècle pour les fragrances.

Si la tête dorée en métal coulé à l’extrémité de Scentime semble pouvoir s’ouvrir et dévoiler un contenu, comme c’est le cas pour Wishing Well, il ne faut toutefois pas se faire prendre. Les contraintes liées aux proportions de l’œuvre Scentime amènent plutôt à imaginer qu’il pourrait y avoir un contenu, comme le suggère Roxanne Arsenault.

On pense aux possibilités de l’œuvre : est-ce qu’il y aurait quelque chose dedans ?

Roxanne Arsenault, directrice de la galerie Patel Brown

Il s’agit ainsi, d’une manière toute poétique, de repenser la fonction et la symbolique des récipients, utilisés par de nombreuses cultures pour préserver nourriture et eau, entre autres.

Alors que l’exposition de Shary Boyle se termine cette semaine à la galerie Patel Brown et qu’il faut s’y rendre imminemment pour en faire l’expérience, les visiteurs pourront prendre tout leur temps pour admirer le projet colossal de la Banque Nationale au cours des prochains mois, et plus précisément, Scentime, puisqu’il s’agit d’un projet permanent.

L’exposition à la galerie Patel Brown se termine le 20 avril.

Consultez la page de l’exposition à la galerie Patel Brown

La collection de la Banque Nationale

La Banque Nationale est engagée dans l’art depuis 1971. Sa collection d’œuvres d’art, sous l’égide de la conservatrice, Jo-Ann Kane, renferme près de 7000 réalisations d’artistes professionnels importants, dont les deux tiers sont des créateurs du Québec.

Consultez la page de la collection de la Banque Nationale