Souvent associés au « wokisme », les appels au bannissement de personnalités ou à la censure d’œuvres d’art ont également fusé de la droite cette année. De toute évidence, la culture de l’annulation a de beaux jours devant elle… même si certains artistes au lourd passif semblent y être imperméables.

L’affaire Depp-Heard, un revers pour #moiaussi

PHOTO TOM BRENNER, ARCHIVES REUTERS

Amber Heard à sa sortie du tribunal de Fairfax, en Virginie, le 1er juin

Le procès de vedettes le plus médiatisé des dernières années s’est conclu en faveur de l’acteur Johnny Depp, qui portait plainte pour diffamation contre son ex-femme Amber Heard. Cette dernière avait dénoncé dans le Washington Post en 2017 les agressions physiques et psychologiques subies, se qualifiant de « figure publique représentant la violence domestique », sans toutefois nommer Depp. L’interprète de Jack Sparrow a tout de même décidé de la poursuivre et, des mois durant, le public a pu suivre le procès télédiffusé. Sur les réseaux sociaux, une large portion des internautes a dépeint Amber Heard comme une menteuse, analysant ses faits et gestes durant les audiences. La victoire (et la réhabilitation) de Johnny Depp et l’ostracisation de Heard sont considérées par certains comme un recul pour le mouvement #moiaussi.

Marissa Groguhé, La Presse

Barbada non grata à Saint-Laurent

PHOTO GRAHAM HUGHES, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

La drag queen Barbada

Barbada a essuyé des vents de face cette année, mais elle a tenu tête à ses détracteurs. En août, le conseil d’arrondissement de Saint-Laurent a d’abord voulu suspendre l’activité de contes offerte par la drag queen dans deux de ses bibliothèques. Après une rencontre avec Sébastien Potvin (l’ancien enseignant en musique qui se glisse sous la perruque de Barbada), le conseil s’est rétracté et ce dernier a pu reprendre ses lectures. Son apparition en fée des Étoiles aux côtés du père Noël lors du dernier défilé au centre-ville de Montréal a aussi fait quelques vagues. Tant pis pour les grincheux. La fée avait sorti son plus beau costume…

Stéphanie Morin, La Presse

Pas de blackface dans Les filles de Caleb

PHOTO ARCHIVES RADIO-CANADA

Marina Orsini et Roy Dupuis dans Les filles de Caleb

La série historique adaptée du roman d’Arlette Cousture s’est retrouvée sur Netflix à l’automne, mais le deuxième épisode a été tout bonnement retiré de la plateforme en raison d’un blackface. Dans l’épisode en question, le personnage d’Ovila, incarné par Roy Dupuis, participe à un spectacle de Noël sur la Nativité. Il revêt le costume du roi mage noir, Balthazar, et se peint donc le visage en noir. En entrevue avec La Presse, l’acteur s’était dit choqué par la situation. « C’est un manque de respect pour l’histoire, pour l’auteure, pour la série elle-même, nous avait-il confié. La série se passe à Saint-Tite, au XIXe siècle, il n’y avait pas de Noirs à cette époque-là… »

Jean Siag, La Presse

Le trio toxique d’OD quitte les villas

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Isaack, l’un des trois candidats d’Occupation double qui ont dû quitter l’aventure

L’émission de téléréalité Occupation double a vécu son lot de rebondissements au fil des ans, mais la mouture 2022 est à marquer d’une pierre blanche. Des candidats ont été accusés par les téléspectateurs d’avoir intimidé un de leurs colocataires, Jonathan, en se liguant contre lui et en complotant finalement pour le faire sortir de l’aventure. La grogne populaire a eu raison des trois candidats concernés, qui ont dû plier bagage et quitter l’aventure sur ordre de la production. Occupation double avait entre-temps perdu de nombreux commanditaires. La production a finalement présenté ses excuses, notamment pour ne pas avoir sévi plus tôt.

Marissa Groguhé, La Presse

The Crown perd sa couronne

PHOTO SCOTT GARFITT, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Elizabeth Debicki, Dominic West, Imelda Staunton et Jonathan Pryce à la première mondiale de la cinquième saison de la série The Crown, à Londres, en novembre dernier

La série The Crown a (presque) fait couler autant d’encre que l’illustre famille qu’elle dépeint. Sa cinquième saison s’est attiré les foudres de plusieurs proches du clan royal avant même d’atterrir sur Netflix, en novembre. Même l’actrice Judi Dench et l’ancien premier ministre britannique John Major ont participé au lynchage public des nouveaux épisodes, qui s’intéressent aux années 1990, une décennie particulièrement éprouvante pour Élisabeth II. La mort de la monarque en septembre dernier n’a certainement pas joué en faveur du drame historique. Avec son accession au trône, le roi Charles III a tout sauf besoin qu’on rappelle son comportement moins princier envers Diana.

Marc-André Lemieux, La Presse

L’autodestruction de Kanye West

PHOTO EVAN AGOSTINI, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Kanye West

Harcèlement en ligne du (futur ancien) petit ami de son ex Kim Kardashian. Port controversé d’un t-shirt avec le slogan « White Lives Matter » à la Paris Fashion Week. Propos antisémites. Et pour coiffer le tout, confession de son adoration pour Adolf Hitler et les nazis à une émission d’Alex Jones. Kanye West a fait un bien mauvais usage de sa liberté d’expression cette année. Le rappeur, qui souffre de bipolarité, a ainsi démoli à coups de massue le capital de sympathie résiduel que lui procurait encore son génie artistique. Ses partenaires d’affaires se sont distanciés de lui et même le chantre de la parole libre, Elon Musk, a dû suspendre son compte Twitter pour incitation à la haine.

Frédéric Murphy, La Presse

Les artistes téflon

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, ARCHIVES LA PRESSE

Win Butler, du groupe Arcade Fire, au dernier festival Osheaga

La plupart des personnalités ciblées par la vague de dénonciations de l’été 2020 n’ont pas encore réintégré l’espace public. Exception à la règle : Maripier Morin a fait un retour dans le long métrage Arlette, après une cure de désintoxication et une thérapie. Dénoncé par cinq personnes dans une enquête de Pitckfork pour des inconduites sexuelles et des relations « toxiques », l’ancien enfant chéri de Montréal, Win Butler, a perdu de son lustre. Son groupe Arcade Fire a tout de même pu boucler la tournée de son album WE, malgré la défection de ses invités Feist et Beck. Signe que l’amour de certains fans reste solide comme le roc (k), Éric Lapointe continue quant à lui de remplir ses salles en dépit de sa reconnaissance de culpabilité pour voies de fait sur une femme en octobre 2020. Il va même clore l’année avec son traditionnel party des Fêtes au MTelus. Euh… champagne ?

Frédéric Murphy, La Presse