2020 devait être une grande célébration du 250e anniversaire de naissance de Beethoven. Pandémie oblige, c’est surtout vers le disque que les interprètes se sont tournés pour fêter l’auteur de la Neuvième Symphonie et de la Missa Solemnis. Les symphonies et les sonates pour piano n’ont pas été les seules partitions du maître à en bénéficier. Juste en France, deux enregistrements consacrés à ses œuvres pour violoncelle et piano ont paru dans les derniers mois : l’intégrale Altstaedt/Lonquich chez Alpha au printemps dernier, magnifique mais un peu poseuse, et, fraîchement sorties des presses d’Harmonia Mundi, les deux Sonates de l’opus 5, avec le violoncelliste Raphaël Pidoux, membre de l’excellent Trio Wanderer, et le pianiste Tanguy de Williencourt.

C’est le second album qui a davantage retenu notre attention. Son originalité réside dans l’utilisation d’un magnifique piano Gebauhr fabriqué vers 1855 et conservé au Musée de la musique à Paris. Il s’agit non pas d’un pianoforte, mais d’un authentique piano à queue de facture germanique qui conserve la définition sonore et la charmante verdeur des instruments plus anciens, mais avec un continuum de nuances plus étendu. Le violoncelliste joue quant à lui avec un Guarneri de 1734 issu de la même collection. Autre singularité : le couplage des Variations sur Bei Männern welche Liebe fühlen (de la Flûte enchantée de Mozart) avec un rare et sympathique Nocturne sur des thèmes du même opéra par deux contemporains de Beethoven, Camille Pleyel et Charles-Nicolas Baudiot.

Ce disque s’inscrit dans le courant d’interprétation dit « historiquement informé », dont le meilleur exemple au disque demeure, pour ces œuvres, l’intégrale d’Anner Bylsma et Jos van Immerseel, parue dans les années 1990. Même si le vibrato reste assez contingenté, la sonorité du violoncelle garde une belle rondeur grâce à l’archet diaphane de Raphaël Pidoux. Le son n’est jamais forcé, particulièrement dans les aigus, simplement susurrés. Tanguy de Williencourt alterne pour sa part entre des pianissimos immatériels et des fortes pleins, mais jamais agressifs. Pidoux et lui forment un power couple musical en parfaite communion d’esprit.

IMAGE TIRÉE DU SITE D’HARMONIA MUNDI

Ludwig van Beethoven : Cello Sonatas, op. 5, de Raphaël Pidoux et Tanguy de Williencourt

Il s’agit d’un album de choix à acquérir comme complément d’une version plus « romantique » comme celles de Fournier, Casals ou Rostropovich.

★★★★½

Musique classique. Ludwig van Beethoven : Cello Sonatas, op. 5. Raphaël Pidoux et Tanguy de Williencourt. Harmonia Mundi.